La Politique agricole commune (PAC) se prépare à faire peau neuve de 2021 à 2027. Mais la proposition sur la table des négociations européennes ne prévoit pas de grand chambardement. Pourtant le système de soutien aux agriculteurs européens est « à bout de souffle » glisse-t-on à France stratégie.

Le think tank rattaché aux services du Premier ministre français a planché sur un rapport intitulé « Faire de la PAC un levier de la transition agro écologique », présenté le 23 octobre à Paris.

« On a voulu réfléchir à ce que serait une PAC idéale », expliquent ses auteurs. Conçue dans les années 60, la politique agricole commune a alors pour but d’accroître la production agricole européenne et de sécuriser l’indépendance alimentaire de l’Europe. Une réussite.

Mais, face aux enjeux environnementaux et climatiques, la PAC peine aujourd’hui à apporter les bonnes réponses. Et, le constat du côté du soutien au monde agricole n’est guère meilleur : 25% des agriculteurs français vivent en effet sous le seuil de pauvreté.

« Depuis les années 90, les enjeux environnementaux et climatiques ont été progressivement intégrés dans la PAC », reconnait Pierre Dupraz, directeur de recherche à l’INRA. « Mais les instruments ne sont pas adaptés ».

De l’hectare à l’emploi

Pour réorienter les aides vers le verdissement de l’agriculture européenne et le maintien de l’emploi, le rapport de France Stratégie propose deux axes principaux. Le premier est de passer d’une aide calculée aujourd’hui sur la surface d’exploitation à une aide à l’emploi. « Il faut faire évoluer le système de paiement de base vers des paiements en fonction des emplois agricoles et plus du nombre d’hectares cultivés », explique Gilles de Margerie, commissaire général de France Stratégie.

En se basant sur les aides versées en 2018 au titre des paiements directs (5,7 milliards d’euros) et sur le nombre d’équivalents temps plein en 2016 (711 000), l’enveloppe annuelle pour un temps plein agricole s’élèverait ainsi à 8 000 euros par an.

Principe du pollueur-payeur

Autre proposition, celle de refondre le système des aides relevant du deuxième pilier en un système simplifié de bonus/malus. Ainsi, les agriculteurs seraient taxés sur leurs utilisations d’engrais, de pesticides, d’antibiotiques et sur leurs émissions de gaz à effet de serre selon le principe de la taxe carbone.

De l’autre côté, ils seraient rémunérés pour leurs pratiques vertueuses pour l’environnement : les prairies permanentes, la diversification des cultures ou la mise en place de surfaces d’intérêt écologique.

« Ces outils permettront de valoriser davantage la polyculture élevage et les exploitations agro-écologiques, mais aussi les petites exploitations », détaille Julien Fosse, directeur adjoint du département développement durable et numérique de France stratégie.

Malgré le consensus qui commence à se construire autour du basculement de la PAC vers un soutien à l’emploi agricole, le chemin reste long à parcourir. « Aujourd’hui il y a une prise de conscience sur les limites du système actuel et les différents acteurs du secteurs sont prêts à ouvrir le débat », veut croire Gilles de Margerie. Côté européen, le débat sur la future PAC devrait se rouvrir après l’entrée en fonction de la nouvelle Commission européenne, prévu le 1er décembre.

Cécile Barbière (Euractiv.fr)