Le 15 avril, lors d’une réunion de la Commission de l’agriculture et du développement rural (AGRI), Janusz Wojciechowski a déclaré que des agriculteurs, des organisations agricoles et des États membres avaient appelé l’exécutif européen à mettre en œuvre aussi vite que possible des mesures pour aider les différents secteurs agroalimentaires à surmonter la crise sanitaire, dans le cadre de la politique agricole commune (PAC).

Plus spécifiquement, la pandémie a durement touché l’industrie laitière et certaines filières de production de viande. Le marché la floriculture est également presque à l’arrêt et l’agritourisme rencontre les mêmes difficultés que le reste du secteur touristique.

Les mesures de soutien sont inscrites dans la réglementation de l’organisation commune des marchés agricoles (OCM), le filet de sécurité des agriculteurs en cas de crise du marché. L’OCM peut, par exemple, compenser la chute des prix.

L’arsenal de moyens pour concrétiser ces dispositions comprend notamment l’intervention de l’État, l’aide au stockage privé, une possibilité de retrait et d’autres mesures exceptionnelles de soutien prévues par la PAC.

« Ces attentes sont légitimes, et si la Commission possédait une bourse bien garnie, elle puiserait dedans sans attendre », a fait savoir le commissaire polonais aux eurodéputés.

Il a toutefois ajouté qu’une telle somme d’argent n’était pas disponible dans le cadre financier actuel, comme rien ne laissait présager l’arrivée de la crise lorsque le budget a été adopté l’année dernière.

Janusz Wojciechowski a par ailleurs précisé que les mesures d’intervention servaient normalement à régler des problèmes occasionnels qui touchaient un ou plusieurs marchés à la fois, mais que l’ampleur de la crise vécue aujourd’hui dépassait la capacité du budget actuel.

« C’est pourquoi nous cherchons d’autres sources d’assistance », a indiqué le commissaire européen, en soulignant que l’absence de mesures d’intervention sur le marché ne signifie pas que les agriculteurs doivent se débrouiller seuls.

Pas de dépendance unique à la PAC

Selon Janusz Wojciechowski, il faudrait réfléchir à une manière d’utiliser efficacement l’argent disponible — plus précisément, en augmentant les aides publiques et en mettant à profit les ressources non utilisées du Fonds européen agricole pour le développement rural (Faeder), le second pilier de la PAC.

« De mon point de vue, le fonds de développement rural devrait être utilisé dans toute la mesure du possible pour soutenir les agriculteurs pendant la crise, et devrait être transféré à cet effet ».

Mais il a aussi souligné le fait que l’agriculture ne dépendait pas uniquement « de la PAC ou […] de mesures de soutien du marché très limitées ».

À ce titre, la Commission a relevé le plafond des aides d’État à l’agriculture pour encourager le soutien public. Des programmes d’aide ont aussi été lancés partout en Europe.

Janusz Wojciechowski a cependant essuyé les critiques de certains eurodéputés.

Le coordinateur pour la politique agricole du Parti populaire européen (PPE), Herbert Dorfmann, trouve trop facile d’affirmer que le budget est insuffisant pour adopter des mesures. « Je ne pense pas qu’il s’agisse de la bonne approche », a-t-il indiqué.

Le très expérimenté Paolo De Castro, coordinateur du groupe S&D, ajoute que la Commission pourrait aussi débloquer les fonds de gestion de crise prévus par l’OCM, qui s’élèvent à 478 millions d’euros.

Janusz Wojciechowski a répondu que l’utilisation des fonds de réserve était synonyme, à terme, d’une baisse du budget pour les payements directs, l’argent « dont nos agriculteurs dépendent quotidiennement ».

« Cela ne semble pas être une bonne tactique lors de la crise actuelle », a déclaré le commissaire européen.

Selon lui, les États membres ont besoin de plusieurs mois pour appliquer toutes les mesures déjà adoptées, ce qui signifie que la majorité d’entre elles devraient s’inscrire dans le budget 2021.

Pour cette raison, l’accord sur le prochain budget à long terme de l’UE revêt une importance capitale, afin de garantir des fonds suffisants pour la PAC qui permettront de prendre des mesures de soutien du marché adaptées aux crises.

La pandémie a clairement montré à quel point il était crucial de constituer une réserve d’urgence pour venir en aide aux agriculteurs, sans pour autant affaiblir la sécurité alimentaire, a-t-il conclu.

Gérardo Fortuna (Euractiv.com) – traduit par Morgane Detry