Durant ce premier mois, 44 % de la canne a servi à faire du sucre dans le centre-sud du Brésil, contre 29 % la campagne passée ! Une partie bien moindre servira donc à faire de l’éthanol.Précisons que l’éthanol domestique est à un niveau déprimé, entraîné par un pétrole qui ne dépasse pas les 35 $/baril. En revanche, le sucre raffiné est bien moins abondant. Ainsi la différence entre les deux sucres, appelée la « prime de blanc », devient-elle de plus en importante… On a même dépassé les 130 $/t à la mi-mai : c’est deux fois sa valeur moyenne de la campagne passée, et du jamais-vu depuis sept ans. Car les niveaux de production de sucre blanc ne connaissent pas l’envolée brésilienne. Au contraire, même : l’Europe devra importer du sucre, et l’Inde et la Thaïlande affichent de nettes contractions de production : presque 14 Mt de moins à elles deux ! Cette moindre production est bien plus importante que le regain brésilien, estimé autour de 9 Mt.

Il en ressort qu’un déficit mondial semble toujours d’actualité. Mais de combien ? C’est là toute la difficulté, car l’incertitude sur la baisse de consommation liée au virus est majeure. Et les avis divergent : si LMC vient de revoir son bilan mondial et l’estime à l’équilibre sur la campagne actuelle, les autres analystes continuent à anticiper un déficit, autour de 6 Mt (pour Rabobank ou Czarnikow), voire toujours au-dessus de 9 Mt (pour F.O.Licht ou l’ISO). Cela dit, et dans tous les cas, la monnaie brésilienne a tellement perdu de valeur que la convalescence sera certainement lente.

Côté européen, les dernières données, toujours tardives, portent encore sur mars dernier, et les cours ont encore gagné 6 €/t en moyenne, à 364 €/t. Sur la campagne, on devrait donc bien avoir un prix moyen autour de 350 €/t. Cela reste 50 €/t en dessous du prix de référence, donc de la ligne de flottaison permettant à la filière européenne de se rémunérer et d’investir. La progression continuera-t-elle à l’entrée de prochaine campagne, avec cette pression du marché mondial ?

Timothé Masson, CGB