Quelles décisions avez-vous prises depuis votre élection ?

Depuis un an, nous avons travaillé avec une équipe de professionnels pour être prêts le jour J. Deux grands chantiers sont mis en place : une réforme de la gouvernance et un retour à la profitabilité. La gouvernance doit exprimer notre statut de coopérative. Ce n’était pas le cas jusqu’à présent. Cela a provoqué un fossé entre les coopérateurs et leur coopérative d’une part, et le conseil de surveillance et les élus en région, d’autre part.

Notre nouvelle organisation va se décliner au niveau des commissions, des comités et des filiales. Les filiales doivent être sources de revenus pour les coopérateurs. Il est donc normal qu’il y ait une présence d’élus dans nos activités de diversification, comme au Brésil, en Chine et pour l’amidon. Désormais, le conseil de surveillance va s’appuyer sur les conseils de région pour fonctionner. Auparavant, l’information était uniquement descendante. Il faut que le flux soit à double sens entre les élus de terrain et le conseil de surveillance.

Allez-vous revenir à une gouvernance plus traditionnelle avec un directeur et un président de conseil d’administration ?

Oui, nous souhaitons quitter le statut de conseil de surveillance et de directoire. Cela devra être validé par les élus d’ici au mois de juin. Nous pensons que Tereos a un rôle à jouer dans l’évolution de la gouvernance des coopératives. Les membres du conseil de surveillance doivent être davantage acteurs que par le passé de la stratégie de leur coopérative. Dès le mois de février, des formations en finance et en management leurs seront proposées.

Comment réconcilier les deux clans qui se sont affrontés durant de longues semaines ?

Pour les personnes de bonne volonté, cela va aller très vite. Le 5 janvier, un conseil de surveillance s’est tenu au complet avec les 25 élus. Certains membres ont été confirmés dans leurs fonctions, comme le président du comité d’audit. On s’est retrouvés pour avancer ensemble !

Nous avons également partagé des informations financières détaillées, notamment sur les filiales, qui ne l’étaient pas jusqu’à présent. Cela a mis en exergue les difficultés de profitabilité de certaines activités.

Comment retrouver la rentabilité ?

Tereos s’appuie sur trois piliers stratégiques : le sucre en France, l’amidon et la canne à sucre au Brésil. Nous devons retrouver une profitabilité et faire en sorte que la dette ne soit plus une inquiétude. Certaines activités au sein de ces trois piliers sont périphériques. Nous devons nous poser la question de leur intérêt pour l’entreprise et pour les coopérateurs. Quand on a des foyers de perte importants dans une entreprise endettée, il faut essayer de les régler au plus vite. Perdre 20 à 25 M€ par an sur une activité, comme au Mozambique, n’est pas durable. Cela représente un euro la tonne de betterave perdu pour les planteurs. Au Brésil, la situation opérationnelle s’est améliorée et doit se poursuivre, même si l’endettement est élevé. Tereos est une belle entreprise. Il faut qu’elle retrouve la profitabilité qu’elle mérite. Nous souhaitons que les coopérateurs soient à nouveau fiers de leur coopérative.

Le projet d’ouverture du capital est-il abandonné ?

Une ouverture de capital ne peut se faire que si l’entreprise est profitable. Cela est donc inenvisageable pour le moment. Si elle se fait, ce ne sera pas pour l’activité sucre France. Ce sera peut-être le cas pour certaines diversifications.

Le retour à la rentabilité peut-il entraîner des fermetures d’usines ?

Il n’y a aucune fermeture envisagée en France, ni de rapprochement avec un autre groupe, comme l’intention nous en a été prêtée avant notre arrivée. Les directeurs d’usines et les collaborateurs sont prêts à relever le défi de la profitabilité et à poursuivre les efforts déjà engagés. Il faut que les coopérateurs aient bien conscience qu’il est nécessaire de saturer les usines pour écraser les charges fixes. Il faut donc suffisamment de betteraves en 2021. Nous allons laisser à chaque président de région le soin de convaincre les planteurs de semer autant qu’en 2020.

Cela va-t-il passer par une meilleure valorisation de la betterave ?

Oui, mais il est trop tôt encore pour donner des précisions. Nous venons d’arriver. Nous ne sommes pas opposés au système de grille précédent, s’il est suffisamment rémunérateur. Le prix de base de la betterave doit être rémunéré par les activités de Tereos France, auquel s’ajoutent des dividendes issus de la diversification. C’est notre objectif. Nous allons travailler dessus.

Allez-vous présenter un plan stratégique dans les prochains mois ? Que contiendra-t-il ?

Nous venons de lancer un audit pour donner des lignes d’avenir à Tereos. Il y aura trois volets : financier, industriel et commercial. À la suite de cela, nous nous demanderons quelle est la meilleure voie pour assurer la pérennité et l’intégrité de la coopérative, ainsi que le meilleur revenu des coopérateurs. Le groupe Tereos est un outil collectif que l’on a reçu des générations précédentes et que l’on doit transmettre aux suivantes. Notre devoir est qu’il soit le plus compétitif possible au profit des exploitations agricoles. Nous devrions avoir les résultats de cet audit fin mars. Un compte rendu sera fait aux élus du conseil de surveillance et des conseils de région. Un plan stratégique sera dévoilé ensuite, mais il est trop tôt pour en parler tant que l’audit n’est pas terminé.

Quel bilan faites-vous de la campagne betteravière 2020 ?

Cela a été une campagne très difficile, en particulier dans certaines zones, où les rendements moyens ont atteint 35 tonnes/ha. Ces mauvais rendements ont une répercussion directe sur la rentabilité de Tereos France. Notre objectif initial de 18 millions de tonnes a été fortement révisé à la baisse. Pour 2021, nous partons sur un objectif de 18 millions de tonnes avec un maintien des surfaces. Les premiers contacts pour les précommandes de semences par les planteurs nous conduisent à être raisonnablement optimistes. Il y aura des ajustements de dernière minute entre semences traitées aux néonicotinoïdes ou non, en fonction du contenu de l’arrêté attendu pour fin janvier.