Le calendrier de sortie du glyphosate, planifié au niveau français début 2018, prévoyait une première étape de restriction des usages dès 2021. La procédure exigeait d’identifier et d’évaluer la faisabilité des solutions alternatives disponibles pour chacun. L’analyse et les choix finaux ont fait l’objet d’un rapport de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) en septembre 2020.

L’analyse considère comme première clé d’entrée la pratique du labour, retenue comme technique majeure dans la gestion des adventices en interculture, donc comme alternative disponible dans les systèmes de grande culture. Aussi, les principaux usages en systèmes betteraviers basés sur un labour en automne ou en hiver ont été retirés, tandis que les conduites sans labour voient les usages du glyphosate maintenus. Les nouvelles règles sont résumées dans le tableau ci-dessous.

Comment pallier le retrait des usages en parcelle labourée sur vivaces ?

Les applications de glyphosate post-moisson représentent environ 8% des parcelles de betteraves, destinées surtout à détruire des vivaces, comme les chardons, développées dans la culture d’hiver, ou des graminées annuelles. La destruction des chardons bien installés demande des interventions d’outils à dents travaillant à 15 cm, en conditions sèches, par des passages répétés qui extirperont les rhizomes superficiels et épuiseront les plus profonds. Il est préférable de ne pas intervenir sitôt la moisson, mais d’attendre leur redémarrage, idéalement au stade de l’élongation. En cas de moisson tardive, en particulier en zones d’influence maritime, donner priorité aux chardons impliquera de retarder l’implantation des couverts végétaux. Pour les liserons ou le chiendent, la lutte mécanique en interculture peut être complétée chimiquement dans les cultures de la rotation.

Quelle solution pour les labours reverdis ?

Intervenir avant semis sur des graminées, ou dicotylédones, même avec un outil spécifique comme un déchaumeur scalpeur à pattes d’oie, sera souvent à éviter. L’humidité des sols, qui est justement un facteur favorable aux levées et au développement précoce des adventices, tout en empêchant le semis, limite la possibilité d’intervenir, et le risque de repiquage réduit leur réelle efficacité. Par ailleurs, la technique de faux semis obligerait à retarder l’implantation de la culture, donc une perte de potentiel, et le risque de mauvaise levée en conditions sèches. En sols légers, retarder le labour en février, voire opter pour un labour de printemps, sera une solution de précaution. L’occurrence d’un gel tardif peut ouvrir des fenêtres de tir pour un travail superficiel. Sachant que les herbicides en culture ne seront pas suffisants pour des dicotylédones ayant atteint 4 feuilles, il faudra attendre un binage pour les contenir.

Des conseils de lutte contre les graminées sont donnés dans l’encadré.

Le cas des graminées

Trois questions à Yohan Debeauvais, délégué régional ITB Somme-Oise

Quels étaient jusqu’à présent les usages du glyphosate en parcelle labourée, pour lutter contre les graminées, vivaces ou annuelles?

Le glyphosate est utilisé sur les labours reverdis, bien souvent du fait de la présence de graminées résistantes, ou suite à un mauvais enfouissement des couverts.

L’application est souvent en fin d’hiver, lors des premières journées plus chaudes. A cette période, les températures restent quand même fraîches, un minimum d’un mois est nécessaire pour une bonne efficacité du glyphosate.

Quelles conséquences de l’arrêt de glyphosate vis-à-vis des graminées ?

L’arrêt du glyphosate peut amplifier le problème de résistance, avec une augmentation de la population. Pour les situations en terre difficile et peu profonde (argile à silex), où le travail du sol est difficile, où parfois le labour n’est pas possible, le maintien de l’usage était souhaitable ; l’arrêt dans ces situations pourrait être catastrophique. Et généralement, les alternatives agronomiques sont difficiles à effectuer.

Quels moyens de lutte peut-on conseiller ?

Tous les leviers disponibles, l’alternance culture automne/printemps, le labour non systématique pour diminuer le stock de semencier, éventuellement choisir les cultures permettant la meilleure lutte contre les graminées.

Avant betteraves, la technique consistera à augmenter le nombre de déchaumages, en laissant le temps aux graminées de lever. Tout en respectant la législation, on peut alors retarder le semis des couverts. Lors du choix du couvert et de sa mise en place, attention à ne pas laisser les graminées prendre le dessus. Ensuite, il faut veiller à bien régler la charrue pour éviter les repousses, toujours difficiles à détruire, intervenir sur le labour si des graminées apparaissent, en ayant les meilleures conditions de ressuyage et de dessèchement après l’intervention.