Quelle sera la place de la betterave dans les futurs assolements ? Plus que jamais, elle dépend de plusieurs paramètres. Les principaux étant les prix annoncés par les industriels, le coût des intrants et les moyens de production disponibles (produits phytosanitaires et variétés tolérantes).

L’analyse qu’en fait la CGB est résumée par son président, Franck Sander, qui se dit « confiant à court terme » si les marchés restent bien orientés et avec une protection néonicotinoïdes attendue formellement d’ici deux mois.

Ce sont en fait les deux années 2024 et 2025 qui seront pleines d’incertitudes, puisque l’efficacité des solutions travaillées par le Plan National de Recherche et d’Innovation (PNRI) n’est pas encore démontrée. Or « il ne reste que 6 mois pour apporter une visibilité aux planteurs », avertit Franck Sander, puisque les décisions d’assolements pour 2024 seront prises l’été prochain. L’arrivée des variétés résistantes à la jaunisse et plus performantes n’est annoncée que pour 2026.

Encourager les surfaces par des prix rémunérateurs

À l’heure actuelle, les marchés (sucre, éthanol et pulpe) permettent de mieux rémunérer les betteraves et de couvrir la forte hausse des coûts industriels et betteraviers. Alors qu’il a déjà progressé de 13 % en 2022, le coût de revient d’un hectare de betteraves devrait encore augmenter de 16 % en 2023.

Heureusement, les sucriers ont annoncé des prix garantis d’au moins 40 €/t pour cette récolte 2022. « Ce sont de belles annonces », reconnaît le président de la CGB, Franck Sander. Et d’ajouter qu’il est important aussi d’avoir de la visibilité pour 2023.

Compte tenu du rendement moyen attendu à 80 t/ha, la marge betteravière s’améliore pour la majorité des planteurs en 2022, à l’exception des zones les plus touchées par la sécheresse de l’été dernier, où les rendements peuvent être compris entre 60 et 70 t/ha.

Pour 2023, le marché mondial du sucre apparaît plus incertain mais « le marché européen restera déficitaire, déclare Nicolas Rialland, directeur général de la CGB. Il est donc nécessaire que les fabricants continuent d’envoyer un signal fort comme cette année pour qu’un rendement correct assure un vrai revenu aux planteurs ».

Mettre en place des outils de sécurisation

Depuis la fin des quotas en 2017, la CGB cherche à sécuriser économiquement cette culture fragilisée. Selon le syndicat, le maintien des bassins de production et de l’industrie sucrière française dans les territoires devra passer par la mise en place de systèmes assurantiels et de protection des revenus. C’est pourquoi la CGB travaille depuis des années sur un instrument qui puisse maîtriser la fluctuation du revenu betteravier. C’est l’ISR (instrument de stabilisation des revenus) qui va être expérimenté en 2023, en Île-de-France et dans le Grand Est (voir encadré).

Préserver les moyens de production

Quant aux rendements, ils sont conditionnés par les moyens de production à la disposition des planteurs. La CGB se bat pour les préserver avec, en premier lieu, l’obtention du renouvellement de la dérogation des néonicotinoïdes pour les semis 2023. L’objectif est d’avoir un arrêté ministériel publié fin janvier. Comme les années précédentes, les semis ne pourront donc pas être très précoces !

Préparer l’avenir

L’avenir, c’est aussi le développement des débouchés. La pulpe redevient un élément important de l’économie betteravière. Entre l’augmentation des coûts de l’énergie, fortement défavorable à la déshydratation et la montée en puissance de la méthanisation, la valorisation de la pulpe doit être optimisée. Enfin, bonne nouvelle : le bioéthanol est en forme. Ce carburant a séduit de nombreux automobilistes avec le SP95-E10, et surtout le Superéthanol-E85.

Un ISR betterave testé dans deux régions pilotes en 2023

L’instrument de stabilisation des revenus (ISR) est un outil de gestion des risques prévu par le règlement Omnibus. Grâce à la mobilisation de la CGB et de deux régions pilotes (Grand Est et Île-de-France), il va être expérimenté en 2023. Cet ISR est un fonds mutuel, cofinancé jusqu’à 70 % par des fonds régionaux issus du second pilier de la PAC. Cet instrument, qui couvrira les risques économiques, viendra enrichir les outils de gestion des risques à côté de la nouvelle assurance récolte qui couvrira les aléas climatiques (voir p 25). Ce nouveau fonds mutuel est une première en France !