Quels ont été les prélèvements de grand gibier pour la saison 2022-2023 ? L’Office français de la biodiversité (OFB) vient de publier les chiffres et ils sont éloquents.

Les prélèvements du cerf élaphe, du chevreuil et du chamois continuent d’augmenter et battent tous les records. Ceux du sanglier sont en baisse et passent sous la barre des 800 000. Ceux du daim et du sika sont en diminution, alors que ceux du mouflon et de l’isard progressent.

Moins de sangliers, (- 6,3 %) par rapport à la saison précédente, mais c’est quand même près de 790 000 animaux au tableau, ce qui reste plus que confortable !

En ce qui concerne le chevreuil, pour la seconde année consécutive, les prélèvements sont en légère augmentation (+ 1,4 %) et atteignent, pour la première fois, la barre des 600 000 têtes.

Pour le chamois, avec une hausse de 4,6 %, les prélèvements de cette saison (2 771) atteignent un nouveau record historique dépassant ceux de 2016 et 2017.

Les prélèvements de l’isard (2 784) sont en hausse (+ 3,3 %) pour la deuxième année consécutive mais, globalement, depuis une dizaine d’années, on observe une stabilité.

Ceux de mouflons ont, eux, augmenté de près de 10 % pour atteindre 2 687. On a aussi tué 1 215 daims et 86 cerfs sika.

Des cerfs presque partout

Avec près de 82 000 animaux au tableau (+ 8,4 %), le cerf fait une percée royale. Quels sont les départements les mieux pourvus ? On tue plus de 2 000 animaux dans douze départements : Indre-et-Loire, Cantal, Loiret, Indre, Dordogne, Loir-et-Cher, Ariège, Hautes-Pyrénées, Marne, Vienne, Haute-Garonne, et Bas-Rhin. Les tableaux de chasse sont aussi en hausse significative dans la Nièvre, le Loiret, le Calvados, et le Puy-de-Dôme. En baisse : le Var et l’Ille-et-Vilaine. C’est spectaculaire ! Il y a quarante ans « avoir connaissance d’un cerf » en dehors des grandes forêts de l’Île-de-France, de la Sologne ou de l’Alsace mettait tous les chasseurs communaux en émoi. Un cerf ! C’était un événement extraordinaire.

C’est, en effet, le plus prestigieux des grands gibiers. Autrefois, le cerf ne sortait guère des grandes futaies, mais aujourd’hui il prend ses aises un peu partout et on commence à l’observer dans des communes où jusque-là on ne voyait que des chevreuils. En vingt ans, la superficie colonisée a doublé et les effectifs ont plus que quadruplé ! Les régions championnes de l’expansion sont Provence-Alpes-Côte d’Azur (présence multipliée par 8), la Bretagne, Rhône-Alpes (présence multipliée par 6) et Midi-Pyrénées (présence multipliée par 5). Il explose notamment dans les forêts des Pyrénées où les habitants des petits villages de montagne peuvent maintenant s’installer à leurs fenêtres à la saison des amours pour assister au brame.

L’augmentation des populations peut poser des problèmes. En forêt d’abord : les animaux consomment les pousses et les bourgeons des arbres, ainsi que les fruits forestiers (glands, faînes et châtaignes), ce qui pourrait compromettre la régénération. Les comportements de marquage territorial des mâles, ou la frayure de leurs bois, peuvent aussi endommager des jeunes arbres. L’écorçage de tiges peut enfin toucher certains peuplements. Cependant, le cerf n’est pas Attila ! Il reste encore beaucoup de marge avant que l’animal devienne au bois ce que le ragondin est au marais. Il est naturel que le forestier défende l’arbre et que le chasseur et le naturaliste défendent l’animal. Chacun est dans son rôle. Mais pour l’instant ,le cerf contribue surtout à l’enrichissement de la biodiversité et on ne peut que s’en féliciter !

Gare aux accidents

Cela posé, méfiance sur les routes quand elles traversent une zone fréquentée. Dans les départements à haute densité d’animaux, les accidents de circulation sont de plus en plus fréquents. Fin novembre, un automobiliste de 26 ans a ainsi percuté un cerf sur la commune d’Angliers (Vienne). Le véhicule est gravement endommagé, mais le conducteur en sort indemne. Pas de chance : venu à son secours, le véhicule des gendarmes percute lui aussi un animal, une biche cette fois, à quelques centaines de mètres du premier accident ! Là encore, uniquement de la tôle froissée. Mais un an auparavant, et toujours dans ce même département, au cœur de la forêt de Scévolles, non loin de Guesnes, un cerf, en percutant sa voiture, avait causé la mort d’une jeune fille de 20 ans.

Roulez donc très prudemment quand vous traversez ces massifs, surtout aux heures crépusculaires.

Rappelons que le grand gibier cause 40 000 accidents par an, la plupart bénins, mais on compte aussi quelques accidents mortels ou qui handicapent définitivement les conducteurs. J’ai personnellement connu un jeune conducteur paralysé pour le reste de son existence après avoir tamponné un chevreuil sur une route des Landes.

D’une manière plus générale, on ne peut que se féliciter de la bonne santé du grand gibier. Son accroissement montre que la chasse est non seulement compatible avec la vie sauvage, mais qu’elle peut aussi la réguler. Elle est aujourd’hui indispensable pour maintenir les équilibres.