Améliorer la fertilité et la porosité du sol, éviter les tassements : autant de leviers pour la réussite de la culture. C’est finalement toute une liste de gestes et d’observations qui peuvent être combinés pour optimiser le fonctionnement du sol et obtenir une meilleure relation sol-plante.

Vérifier la structure du sol

La première étape débute l’hiver précédant la plantation, en évaluant le profil du sol de la parcelle. « Cette évaluation se fait en hiver, lorsque la terre s’est rechargée en eau. Elle ne doit pas se baser sur un seul point d’observation », explique Vincent Tomis, chargé de projet Agro-Transfert. Plusieurs méthodes sont utilisables : des tiges pénétrométriques, un miniprofil 3D par extraction de bloc ou un test-bêche en six points de la parcelle. Selon Agro-Transfert, dans les systèmes spécialisés et betteraviers, un tiers des profils présentent des tassements. L’évaluation indique si la structure est dégradée, sachant que la profondeur d’enracinement des tubercules diminue de façon systématique sous les zones tassées. Ce tassement peut avoir des incidences très négatives sur la croissance, en particulier si la campagne se déroule ensuite dans des conditions très sèches ou, à l’inverse, très arrosées. Et l’irrigation ne permet pas de compenser un état structural très dégradé. Pour y remédier, le premier conseil est de ne pas intervenir dans un contexte humide avant la mise en place de la pomme de terre. Pour la plantation des tubercules, il faut attendre que le sol soit ressuyé sur les 30 premiers centimètres pour pouvoir travailler dans de bonnes conditions. « On a intérêt à opter pour un montage de pneumatiques le plus large et mieux, avec des pneumatiques basse pression, à moins de 1 bar. Ou encore en limitant la charge par essieu », juge Michel Martin, ingénieur Arvalis. Dans les essais menés par cet institut, on relève une baisse du rendement de 30 % pour des chantiers où les buttes sont foulées en haute pression de gonflage par rapport à des buttes non foulées. Pour réduire le risque de tassement, mieux vaut éviter de multiplier les passages et préférer une implantation combinée.

Vie biologique et fertilité

Le fonctionnement correct du sol relève aussi d’éléments biologiques : vers de terre, collemboles et de nombreux micro-organismes. Premier constat : la densité des racines en profondeur croît avec le nombre de galeries de vers de terre, surtout dans un sol tassé. Les fissures et galeries améliorent aussi la porosité du sol, permettant une bonne circulation de l’eau. En plus des vers de terre, un grand nombre d’autres organismes vivants, moins visibles, interfèrent sur la vie du sol. La décomposition de matière organique fraîche par des agents microbiens, notamment, peut renforcer la stabilité structurale du sol. « La matière organique reste l’élément le plus important, car c’est le carburant pour les organismes présents. En augmentant de 0,5% le taux de matière organique, le sol peut libérer plus d’azote (+ 50 kg/ha/an) et de soufre (+ 12 kg/ha/an) », note Alain Bouthier, ingénieur Arvalis. Si la fertilité biologique n’agit pas directement sur le rendement, elle régit plusieurs facteurs de production : stabilité, porosité, fourniture d’azote et éléments minéraux… Mais attention, une activité biologique satisfaisante ne contrebalance pas totalement les effets de zones très tassées.

Limiter l’érosion

Autre enjeu dans les parcelles de pommes de terre : éviter les pertes de terre. Celles-ci se chiffrent parfois lourdement. Dans le Nord-Pas-de-Calais, la chambre d’agriculture estime qu’en moyenne, 10 tonnes de terre/ha/an sont exportées du fait de l’érosion. Les orages printaniers, tout particulièrement, ont des conséquences dévastatrices. La prévention passe par l’aménagement avec des haies, des bandes enherbées et des zones de rétention capables de capter les ruissellements autour du champ. Toutefois, ces moyens n’empêchent pas l’érosion intraparcellaire, surtout dans les secteurs en pente. Il faut alors opter pour des mesures agronomiques afin que l’eau de pluie ne dévale pas en bas du champ. Pour réduire les ruissellements, le système le plus utilisé est celui des barbuttes, qui consiste à faire des cloisonnements par interbuttes. Ces microbarrages de quelque 10 cm de hauteur et espacés d’environ 1,50 m sont mis en place lors de la plantation ou au buttage. Ils peuvent stocker temporairement l’eau et favoriser son infiltration. Plusieurs outils sont proposés par les constructeurs (Grimme, Cottard, AVR…) pour former ses barbuttes. Selon les essais 2019 de la chambre d’agriculture du Nord, la technique des microbarrages ne révèle pas d’écarts de rendement avec les buttes classiques. Et la tubérisation reste sensiblement identique, avec un léger avantage au système barbuttes. Outre l’atténuation du ruissellement, ce système de microbarrages présente d’autres atouts. Il diminue la sortie de terre de la parcelle et évite l’accumulation d’eau dans les zones basses du champ, ce qui peut entraîner des pertes liées aux maladies. Le cloisonnement des buttes s’avère aussi très utile dans les parcelles voisines d’un point d’eau, en préservant celui-ci de tout écoulement après un désherbage. Enfin, les barbuttes permettent une meilleure répartition de l’eau lors des épisodes pluvieux intenses, de plus en plus fréquents ces dernières années.

Le guide d’évaluation du tassement est disponible sur :
http://www.agro-transfert-rt.org/projets/sol-dphy/