Modéliser la progression des maladies grâce aux expérimentations historiques de l’ITB

Pour prévoir les futures épidémies de cercosporiose, mieux vaut avoir l’expérience des précédentes campagnes. L’ITB met ainsi à disposition de ses partenaires (voir encadré ci-contre) l’ensemble des observations réalisées au cours de ses essais ou sur les réseaux d’observation, tels que le Suivi biologique du territoire. Le premier objectif est de classer et quantifier les facteurs agronomiques favorisant la maladie. Cela permettra d’actualiser les conseils agronomiques d’évitement des situations à risques. Le deuxième enjeu avec ces mesures est d’étalonner un modèle épidémiologique capable de prédire l’arrivée et l’évolution des symptômes, à partir des données culturales et de la météo. Sur les dernières années, l’ITB a mené plus de 250 essais, dont les résultats seront regroupés et revalorisés. En parallèle, Météo France fournit les variables météorologiques validées et rééchantillonnées, nécessaires à la calibration d’un modèle.

Des caméras connectées pour suivre l’arrivée des symptômes et affiner les prédictions

Le modèle épidémiologique de Cercocap verra sa précision augmentée grâce au couplage des prévisions avec des mesures en temps réel. L’université d’Angers (voir encadré ci-contre) travaillera, en effet, sur la détection automatique des symptômes à partir des images prises quotidiennement par un réseau de capteurs connectés. Un premier état de l’art du matériel a été effectué cet été, avec différents fournisseurs, afin d’accroître le nombre d’images d’entraînement d’un modèle à apprentissage automatisé. Cela a également permis d’évaluer les points forts de chaque dispositif dans l’objectif de dresser une liste de spécifications pour une utilisation à large échelle. Le matériel disposait d’une caméra de bonne résolution (minimum 5 MP) et d’une puce 3G pour l’envoi des images en temps réel. Le développement des algorithmes de traitement d’images pourra s’appuyer sur les résultats du projet Casdar Phenaufol (voir le Betteravier français n° 1116).

Améliorer les formalismes existants pour s’adapter aux conduites culturales

Un travail bibliographique a été réalisé en amont du projet pour identifier les différents travaux de modélisation de la cercosporiose. Cependant, Cercocap devra dépasser ces bases pour devenir un assistant utilisable sur le terrain. Notamment, les équations établies en laboratoire sur la croissance mycélienne devront être validées au champ. Aussi, face à un climat changeant, et à un pathogène dont les souches migrent et mutent, la prise en compte des interactions hôte-bioagresseur-environnement devient obligatoire. Dans ce sens, les données expérimentales vont permettre d’établir les relations entre résistance variétale et propagation de la maladie. De plus, pour être utilisables tout au long de la campagne, les effets des traitements fongicides devront être modélisés. Toutefois, ce modèle complexe pourra compter sur un couplage avec des mesures terrain en cours de culture pour gagner en précision.

Le projet de recherche Cercocap

Cercocap a démarré en janvier 2020 autour de la volonté de gérer durablement la cercosporiose. L’objectif de ces 42 mois est de modéliser précisément la dynamique de la maladie afin de la prévenir ou d’intervenir de la manière la plus adaptée. La qualité de la prédiction est donc tout aussi importante que la stratégie de lutte appliquée pour garantir un rendement rémunérateur, tout en limitant les intrants.

L’Acta (Association de coordination technique agricole) travaille sur l’identification des facteurs agroclimatiques de la maladie, puis sur la modélisation des épidémies. Ce modèle servira de base aux conseils de l’outil d’aide à la décision qui sera développé par la suite.

L’université d’Angers adapte des algorithmes de traitement d’images afin de suivre en temps réel la progression des maladies dans les champs. L’information issue des caméras connectées permettra alors d’ajuster les prévisions épidémiologiques.

L’ITB coordonne le projet et fournit les données expérimentales (résultats d’essais, notations, photos, données météo) pour la mise en œuvre des différentes analyses. L’institut aura également la tâche de piloter le cahier des charges et l’implémentation du futur OAD de manière à le rendre le plus fiable et le plus interactif possible.

Ce projet s’inscrit dans la logique plus globale de l’ITB de recherche de solutions alternatives de lutte contre les bioagresseurs. Il fait ainsi écho au projet Phenaufol orienté phénotypage variétal des résistances, ainsi qu’aux analyses de souches fongiques du projet Sugar, qui a débuté cet automne.