L’année écoulée a mis un coup de projecteur particulier sur la filière betterave, ce qui a permis à la fois d’en rappeler l’importance auprès des consommateurs, mais aussi de souligner sa vulnérabilité face aux aléas et le rôle clé de la recherche et de l’innovation.

La jaunisse de la betterave a été sous les feux de l’actualité récente et pourtant, elle ne date pas d’aujourd’hui, ni même d’hier. Son développement incontrôlé, sous l’effet du changement climatique et après l’interdiction des néonicotinoïdes (NNI), a rappelé que c’est main dans la main que la recherche et les professionnels peuvent remporter certains combats. Les équipes de l’Inrae conduisent depuis plusieurs années des recherches pour comprendre les mécanismes des viroses sur les grandes cultures, en particulier les betteraves, et sur les moyens de lutte alternatifs aux NNI.

L’Inrae s’est engagé depuis 2012 aux côtés des acteurs de cette filière emblématique pour développer la recherche sur la génétique de la betterave, en coordonnant le programme AKER. Les résultats ont été à la hauteur des attentes puisque la variabilité génétique du matériel utilisable en sélection a été doublée, permettant d’accélérer l’accroissement annuel du rendement de la betterave en sucre par hectare permis par le choix des variétés. Le programme a ainsi apporté des outils pour répondre au mieux, et au plus vite, à tous les types de questions, présentes ou futures, y compris pour lutter contre la jaunisse, ou plutôt les jaunisses puisque quatre virus distincts sont aujourd’hui identifiés.

Si l’on veut trouver des alternatives aux phytosanitaires, on ne peut pas toutefois compter uniquement sur la génétique. Il faudra la combiner avec tous les autres leviers de l’agroécologie (prophylaxie, pratiques culturales, etc.) en favorisant aussi l’usage des produits de biocontrôle. Il faudra aussi sans doute consentir un certain niveau de maladie acceptable, qui restera en-deçà du seuil de nuisibilité. La volonté de faire du « zéro maladie » a probablement été poussée à l’excès. Le monitoring des populations de bioagresseurs est à considérer pour assurer la durabilité des résistances génétiques déployées.

Si des pistes prometteuses ont été identifiées, il n’existe pas à ce jour de traitements à l’efficacité comparable aux NNI et opérationnels à grande échelle. Il est indispensable d’amplifier les efforts de recherche et innovation. Le plan national Recherche et Innovation, lancé cet automne à la demande du ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, aux côtés de l’ITB, va nous permettre de coordonner un effort de recherche sans précédent focalisé sur la maîtrise de la jaunisse de la betterave sucrière. Le défi nous est posé d’apporter dans les trois ans des réponses opérationnelles pour contrôler les populations de pucerons virulifères et les virus dans la betterave. Il n’existera pas de solutions uniques à efficacité absolue. La réponse passera par la combinaison des leviers.

Notre institut de recherche a pour ambition d’apporter des solutions pour concevoir des systèmes agricoles performants, tant sur le plan économique qu’environnemental, et qui soient socialement acceptables par les agriculteurs et par la société : l’Inrae jouera son rôle pour accompagner la transition de la filière betterave vers un modèle économique durable.