Mieux exploiter la diversité génétique du blé tendre et l’adapter au changement global : tels étaient les objectifs du programme d’investissement d’avenir Breedwheat, qui, durant neuf ans, a rassemblé 28 partenaires. Ceux qui attendaient un déplafonnement des rendements risquent d’être déçus. « Les outils fournis contribuent à maintenir une stabilité des rendements face au changement climatique », estime Jacques Le Gouis, de l’Inrae, coordinateur de ce programme doté de 34 millions d’euros. Selon le chercheur, « rester au même niveau de rendement est aujourd’hui un objectif déjà difficile à tenir ». Depuis quelques années, le progrès génétique apporte pourtant un gain de 0,5-0,6 q/ha/an. Mais ce progrès sert surtout à compenser les écarts du climat. Cela explique la stagnation des rendements dans la dernière décennie.

Résister à la sécheresse

« Deux phénomènes majeurs brident la productivité : la sécheresse pendant la montaison en mars-avril, puis les températures élevées lors du remplissage du grain », résume Jean-Pierre Cohan, chef du service de valorisation des innovations génétiques chez Arvalis. Pour adapter le blé tendre à ces contraintes, les travaux et les marqueurs moléculaires mis au point par Breedwheat ont permis de mieux utiliser le génome. Issues de 13 000 lots différents de blé, 220 variétés élite, répondant aux contraintes majeures (sécheresse, azote, maladies) ont été fournies aux dix obtenteurs participant au programme. « Grâce à Breedwheat, nous avons pu faire le pont entre les banques de gènes et nos programmes de sélection. On caractérise les variétés mieux et plus vite », relève Jérémy Derory, responsable de la recherche chez Limagrain. La première application est une meilleure résistance aux stress dit abiotique, lié à la sécheresse, aux températures extrêmes et aux défauts de nutrition azotée. « En cas de stress hydrique intense, la génétique apporte un gain de 31 kg/ha/an en grain et permet d’avoir des variétés toujours mieux adaptées à leur milieu », constate Jean-Pierre Cohan. La deuxième application concerne la tolérance aux maladies et aux parasites : « une génétique performante va progressivement remplacer des traitements phytosanitaires » ajoute Jean-Pierre Cohan. Un autre volet de Breedwheat a permis d’identifier des gènes impliqués dans l’élaboration des protéines de réserve du grain. Ces recherches auront encore des retombées dans les années à venir, pour les obtenteurs et les producteurs. « Breedwheat a produit de nombreux résultats. Ils serviront de base à de futurs projets touchant la qualité du grain et la tolérance aux maladies », souligne Jean-Pierre Cohan. Du côté des semenciers, l’avancée se mesure déjà : « Breedwheat nous aide à sécuriser les rendements quel que soit le scénario climatique à venir », conclut Jérémy Derory. « C’est déjà un grand pas qui est franchi ».