Erwin Pardon, le président de McCain Europe continentale, Moyen-Orient et Afrique, entrevoit le redressement de l’activité de ses entreprises aux mois de mai ou juin prochains, lorsque les mesures sanitaires seront levées et les restaurants ré-ouverts. Le retour à une production équivalente à celle de 2019 est espéré à la fin de l’été 2021.

En attendant, les producteurs de pommes de terre membres du Gappi (Groupement d’agriculteurs producteurs de pommes de terre pour l’industrie) qui cultivent pour l’industriel McCain, n’ont pas d’autre choix que celui de faire le dos rond.

Dans les nouveaux contrats conclus pour 2021, le tonnage de pommes de terre vendu à prix fixe a été ramené à 35 tonnes par hectare au lieu de 40 t/ha, le prix payé baisse en moyenne de 5,6 €/t par rapport à 2020 et le doublement de la prime qualité, réservé aux producteurs en exclusivité, est supprimé.

« Dorénavant, produire du blé va devenir plus intéressant que de cultiver des pommes de terre », déplore Bertrand Achte, le président du Gappi, qui animait l’assemblée générale du groupement le 2 février dernier.

En effet, la baisse des prix imposée en 2021 est bien supérieure à celle des coûts de production (1,5 €/t en moyenne) au cours de la campagne passée. Et les producteurs ne sont pas à l’abri de nouvelles hausses des prix des produits anti-germinatifs.
Et surtout, le groupe McCain a décidé de changer de cap. Erwin Pardon engage, à marche forcée, ses producteurs vers l’agriculture durable en les incitant à adopter, à leurs frais, des pratiques agricoles régénératrices des sols. Et pour les motiver, il affecte une partie de la prime d’exclusivité de 5 €/t pour rémunérer à hauteur de 3 €/t les nouveaux itinéraires culturaux à suivre.

Ces nouvelles exigences contractuelles fragilisent quelque peu le lien de confiance entre les producteurs membres du Gappi et le groupe McCain. Les producteurs ont l’impression que la crise de la Covid ne devrait pas justifier une conversion en force à l’agro-écologie entièrement à leur charge !

Valoriser les pratiques agricoles sur le prix de vente

Il s’agit par exemple de traiter les pommes de terre contre le mildiou en s’appuyant sur les instructions lancées par l’OAD Miléos d’Arvalis mais aussi de localiser les apports d’azote et de maitriser l’irrigation. Les planteurs devront aussi implanter des Cipan (au moins trois variétés) et les non-irrigants, des jachères fleuries.

Non seulement les pommes de terre se vendront ainsi moins cher l’an prochain mais en plus, elles coûteront plus cher à produire, puisque les planteurs devront prendre en charge les surcoûts de leur conversion à l’agro-écologie.

En fait, les planteurs ne comprennent pas pourquoi les prix de vente des produits finis, fabriqués à partir de leurs pommes de terre livrées, n’intégreraient pas la plus-value apportée par la conversion de leurs pratiques agricoles à l’agro-écologie pour ne pas en supporter les coûts.

Selon Edwin Pardon, le groupe McCain doit être prêt à réagir dès que l’activité économique reprendra, avec des producteurs à la fois en phase avec les exigences environnementales de la société et réactifs pour relancer la production de pommes de terre.

C’est pourquoi 1 166 ha de plus que l’an passé seront d’ores et déjà mobilisés, en favorisant l’implantation de certaines variétés : King Russet (+214 ha, 1 700 ha) aux dépens de Daisy, pas assez productive, et de la Royal, dont la qualité des tubercules laisse à désirer. Au total, 16 625 ha seront contractualisés par McCain en 2021.

Nouvelle classification

Les variétés sont classées en cinq groupes en fonction de la durée de dormance. Or, celle-ci conditionne le cocktail de traitements qu’il est nécessaire de réaliser pour conserver au mieux les pommes de terre mais aussi leurs coûts de stockage et leurs prix de vente.