A Villeblevin, dans l’Yonne, Xavier Venard produit 4,5 hectares de miscanthus sur les parcelles les moins fertiles de son exploitation. Cette année, une partie de sa production récoltée et stockée en avril dernier est destinée à la fabrication de bioplastique.

Les tiges de miscanthus spécialement broyées et stockées en avril dernier seront livrées à la société Polybiom à Moret-Loing-et-Orvanne (Seine-et-Marne). En septembre prochain, une nouvelle usine flambant neuve sera dédiée à cette nouvelle activité industrielle (voir Le Betteravier français n°1129 p 20).

Dans un premier temps, ces fibres seront transformées en microbilles. Ces agro-composites serviront ensuite à élaborer des résines, des colles et des enduits. Thermoformées, ces résines permettront à leur tour de fabriquer des boîtes d’emballage, de godets et des assiettes biodégradables.
Pour alimenter l’usine Polybiom, Xavier et ses collègues regroupés au sein de la SAS Biomasse environnement système (BES) réaffecteront (au départ) la production de miscanthus, habituellement destinée à la fabrication de litière, à la transformation en microbilles (avant de réimplanter de nouvelles surfaces).

D’ici un an, la société Polybiom contractualisera, avec les agriculteurs partenaires (BES) du projet, la production de 20 hectares (voire plus si nécessaire) de miscanthus pour sécuriser son approvisionnement. En rythme de croisière, l’objectif est que chaque tonne de tige de miscanthus soit valorisée à 100 €.

100 €/t

Jusqu’à présent, Xavier vend sa production de miscanthus 85 €/t à la SAS BES. La contractualisation de la production lui apporte des revenus réguliers depuis plus de dix ans, alors que les prix des grains étaient particulièrement volatiles. La SAS BES (membre de l’association France Miscanthus) transforme et commercialise la production de 200 hectares de miscanthus des 45 agriculteurs membres. Une partie de leur récolte alimente la chaufferie de Montereau. Le reste est destiné à la fabrication de paillis (sous la marque Hortimis) ou de litière pour chevaux (Litabox).

Une fois entrées en rythme de croisière, les parcelles implantées de miscanthus ne demandent aucun entretien ni travail du sol particulier. La fertilisation azotée est fournie par la décomposition des feuilles en mulch. Et les autres éléments fertilisants (K, P) sont apportés par les rhizomes où ils ont été stockés pendant la période hivernale. Aussi, les exportations à la récolte de N, P et K sont réduites car les tiges fauchées sont essentiellement composées de cellulose.

Toutefois, Xavier recommande d’apporter 80 unités de potasse et de phosphate tous les cinq ans, sur les parcelles implantées depuis de nombreuses années, pour limiter l’épuisement des sols.

La production des microbilles livrées à la société Polybiom exige une micronisation du broyat de miscanthus sorti d’ensileuse. Les agriculteurs travaillent aujourd’hui sur cette étape importante et coûteuse, qui devra obligatoirement se répercuter dans la valorisation finale des produits.

Le rendement d’un hectare de miscanthus varie entre 10 et 15 tonnes de MS selon les années. Il dépend de la capacité des rhizomes à s’être constitué des réserves pendant la saison hivernale, puis la durée de la phase végétative de l’été qui a suivi.

La culture de miscanthus a trouvé très vite sa place dans l’exploitation de Xavier Venard. Le chantier de récolte s’intercale très bien entre les périodes de semis de betteraves et de maïs.

La plantation de miscanthus exige une mise de départ importante (3 000 € par ha) pour financer les 20 000 rhizomes à implanter. La première année, Xavier entretient la parcelle pour qu’elle ne se salisse pas. La production entre en rythme de croisière la troisième année de la plantation.

Sur les parcelles couvertes de miscanthus, Xavier Venard perçoit des aides PAC. En se lançant dans cette production en 2009, il commençait à convertir son exploitation à l’agro-écologie. Pour lui, cette évolution paraissait déjà inéluctable.Toutefois, cette inflexion ne pouvait être associée qu’à un projet économique, d’où la production de miscanthus.

Aujourd’hui, l’exploitation de Xavier Venard répond déjà aux critères requis pour toucher les aides éco-régimes de la nouvelle réforme de la PAC qui sera mise en œuvre en 2023. L’introduction du miscanthus diversifie les cultures de l’exploitation. Les surfaces implantées sont assimilées à des surfaces d’intérêt écologique, tout en étant productives avec un revenu à la clé. Et l’indice de fréquence de traitement de l’exploitation diminue, puisque la culture de miscanthus ne nécessite aucune intervention chimique.

Couplée à des projets agro-industriels, cette activité ouvre de nouveaux horizons à Xavier et à son métier d’agriculteur. Un tiers de son activité est consacré à la SAS BES et à Polybiom.

(1) Pour en savoir plus : https://www.polybiom.com/ et http://www.bes-site.fr/