« L’objectif d’un couvert est de maximiser la biomasse », rappelle Romain Crignon, responsable du projet sur la multifonctionnalité des couverts à Agro-transfert et territoires Hauts-de-France. Et pour cela, il faut optimiser le rayonnement lumineux, la somme de température, l’eau et les éléments fertilisants, dont l’azote.

Semer tôt pour augmenter la somme de température

« Pour profiter au mieux de la somme des températures, il faut allonger la période d’implantation des couverts », insiste Pierre Alban Jacquet, agronome responsable de l’animation sol et vie de Cérésia. Soit en semant plus tôt, soit en récoltant plus tard. Un Cipan « classique » implanté le 8 septembre et récolté le 9 novembre dispose de 737 degrés par jour. En le récoltant le 19 décembre, l’agriculteur multiplie la somme de température par 1,3, avec 938 °C/j. La biomasse sera elle aussi multipliée par 1,3. L’allongement par le début obtient un bien meilleur résultat. Les jours d’été s’avèrent plus longs et plus poussants. Ainsi, un semis réalisé le 30 juillet et récolté le 9 novembre multiplie par deux la somme des températures (1428°c). La biomasse (sous réserve d’une bonne alimentation hydrique et fertilisante) double aussi.

Plus l’agriculteur sème tôt, plus il a de chance d’avoir une somme des températures permettant une bonne biomasse. L’expert de Cérésia préconise de semer avant le 15 août. Ensuite, la biomasse produite baisse fortement.

Reste que l’implantation estivale se heurte de plus en plus au manque d’eau ainsi qu’à une grande quantité de résidus non décomposés en surface. D’où la nécessité de mettre tout en œuvre pour conserver l’eau.

Garder des chaumes hauts

Garder les chaumes hauts permet de conserver 3 % d’humidité supplémentaire par rapport à des chaumes bas. Ils réduisent le rôle desséchant du vent. Des chaumes de 30 ou 60 cm diminuent fortement l’évaporation par rapport à ceux de 10 cm. De même, plus la densité de tiges de l’ancienne récolte est importante, plus l’humidité sera conservée dans le sol. Le second levier consiste à éviter les déchaumages précoces qui augmentent fortement l’évaporation (8 %). Plus le sol est travaillé, plus il se dessèche rapidement et intensément. Les conséquences sont visibles pendant un mois. Si ces pourcentages paraissent faibles, ils sont à rapprocher de l’humidité nécessaire dans le sol pour la levée ( 15 à 20 %). « L’autre avantage de laisser les chaumes hauts », poursuit l’agronome de Céresia, « est de diminuer fortement la consommation de carburant lors de la récolte ». Avec des chaumes à 10 cm, la moissonneuse Lexion 540 C consommera 2 l par tonne de blé, soit 45 l/heure, contre 1,8 l/t (42,5 /h) à 20 cm et 1,7 l/t de blé (40 l/h) à 25 cm.

A contrario, les chaumes hauts gênent les régulateurs naturels des campagnols (problématique en semis direct). Les buses et les renards ne peuvent effectuer leur prédation. Il faudra donc rouler, broyer ou faucher après le semis des couverts. Le mulch créé à la surface limitera l’évaporation de l’eau.

Privilégier le contact terre-graine

Le choix du semoir va jouer sur le contact terre-graine fine. Un semis à disques droits aura tendance à pincer la paille. Il la pousse au fond du sillon, avec un mauvais contact terre-graine. Le recours à un disque incliné permet de soulever la paille grâce à une force oblique. Avec, en fin de compte, moins de paille au fond et un meilleur contact terre-graine. Un semoir direct à dents aura un petit effet chasse-débris, poussant la paille hors du sillon. Par contre, ce système déplace plus de terre. Il augmente donc l’évaporation du sol. En techniques culturales simplifiées (TSC), les taux de levée sont les moins intéressants, avec beaucoup de brassage terre- paille. En semis direct avec semoir à disques droits, le taux de levée de la vesce a été, dans un essai, deux fois plus élevé avec des chaumes hauts. Par contre, cette optimisation n’a pas été remarquée avec la phacélie, dont les petites graines ont un taux de levée faible.

Autre contrainte du semis précoce post moisson : l’azote devient de plus en plus limitant. Dans ce cas, il faut maximiser la présence de légumineuses dans les couverts ou épandre de l’engrais organique.

Reste ensuite à gérer les levées d’adventices. Pour limiter leur concurrence, l’agronome de Cérésia propose de semer le plus tôt possible après moisson. Les déchaumages faux-semis efficaces pour la levée des adventices dessèchent le sol. Plus le sol est travaillé, plus il se dessèche rapidement et intensément. Les conséquences sont visibles pendant un mois. Les meilleures conservations de l’eau sont observées avec un semis direct à disques. Le roulage améliore la vitesse de levée des plantes lorsque le rappui est mauvais (TCS).

L’implantation précoce, si l’agriculteur dispose de la main-d’œuvre nécessaire, est donc à privilégier ; ce qui est parfois difficile (épandage de la matière organique, ramassage de la paille…). L’utilisation d’un semoir de semis direct s’avère un plus.

Des espèces aux besoins différents pour la germination

« Les légumineuses et la phacélie (vesce velue et commune, féverole, pois fourrager, sainfoin, lupin) nécessitent de l’humidité et de la fraîcheur pour germer », selon Romain Crignon. Les ray grass anglais et italien, la cameline, l’avoine rude et de printemps préféreront beaucoup d’humidité et des températures élevées. Les tropicales (nyger et moha) demandent humidité et chaleur.

Quant aux plantes avec des besoins en eau plus modérés (tournesol, moutarde brune et blanche, sarrasin, trèfle incarnat et d’Alexandrie, fenugrec, vesce du Bengale et roquette ), elles se contentent des températures usuelles lors de l’implantation.

Enfin, les seigles et les seigles forestiers, les navettes et les radis fourragers s’adaptent aux conditions difficiles (températures élevées et faible disponibilité en eau).

Des chaumes de 30 ou 60 cm diminuent fortement l’évaporation.