Depuis une quinzaine de jours, les cours des céréales stagnent à des niveaux élevés, comparés à leurs valeurs observées l’an passé à la même époque. Le 13 décembre 2021, la tonne de blé se négociait 280 € sur le marché de Rouen, soit 100 € de plus qu’en 2020 à la même date. Mais l’évolution du prix du blé est surveillée par les céréaliers comme du lait sur le feu ! La flambée des prix des intrants réduit considérablement les perspectives de marges de la prochaine récolte 2022 !

L’ensemble des marchés des commodités a dévissé le 23 novembre dernier. La nouvelle expansion de la crise de la Covid-19 et l’émergence du nouveau variant Omicron menacent la reprise économique mondiale. Depuis, ils retrouvent une certaine sérénité.

Mais surtout, la donne a changé sur les marchés mondiaux des céréales depuis un mois. Hormis le blé dur, les menaces qui pesaient sur leur approvisionnement s’estompent au fil des nouvelles.

Les premiers retours de terrain sur les emblavements de la récolte 2022 sont favorables en Russie, mais aussi en France. Par ailleurs, les nouvelles parvenues d’Australie et d’Argentine, en pleines moissons de blé, sont excellentes. Après avoir récolté 33 Mt en 2020, l’île-continent s’apprête à produire 34 Mt de blé. Or, le mois passé, le département de l’Agriculture des États-Unis (USDA) tablait sur 31,5 Mt. Mais ce dernier maintient à 20 Mt sa prévision de production en Argentine.

Au total, les deux pays seront en mesure d’exporter près de 10 Mt de blé de plus qu’en 2020-2021. L’Australie projette de vendre 26 Mt (+ 6,3 Mt sur un an) et l’Argentine 13 Mt (+3,4 Mt). Mais l’île-continent sera concurrencée par l’Inde prête à exporter 5,5 Mt (+ 5 Mt sur 3 ans). En conséquence, les échanges mondiaux de blé porteront sur 206,8 Mt de blé durant la campagne alors qu’au mois de novembre, les prévisions portaient sur 205 Mt. Ces cinq dernières années, les échanges commerciaux de blé (+20 Mt) auront ainsi progressé plus vite que la production mondiale (+16 Mt).

L’Algérie attentiste

Ces dernières semaines, l’Égypte et l’Algérie ont acheté chaque tonne de blé 90 $ à 100 $ de plus que l’an passé. Les niveaux élevés des prix des céréales semblent avoir conduit ces pays méditerranéens à reporter une partie de leurs importations, escomptant des cours plus mesurés durant la seconde moitié de la campagne.

L’Égypte n’a acheté que 3,46 Mt de blé selon FranceAgriMer, alors que ses besoins sont estimés à 12,9 Mt d’ici le mois de juillet prochain (source USDA). L’an passé, l’ex-empire des pharaons avait déjà acheté 4,04 Mt.

De même, l’Algérie n’a importé que 2,8 Mt de blé depuis le mois de juillet (- 400 000 t sur un an). Or, le pays prévoit de s’en faire livrer 7,5 Mt d’ici la fin de la campagne, selon encore l’USDA.

Mais surtout, l’Algérie revoit sa politique d’approvisionnement. La France n’ayant pas été en mesure de lui fournir autant de blé la campagne passée qu’en 2019-2020, l’Algérie s’est tournée vers l’Allemagne, devenue le premier pays fournisseur européen.

Depuis, les tensions diplomatiques entre les gouvernements algérien et français ne favorisent pas un regain d’intérêt pour le blé hexagonal. Pour s’approvisionner, l’Algérie n’exclut aucun pays : l’Argentine, les États-Unis et, bien sûr, la Russie et l’Ukraine reliées au bassin méditerranéen par le détroit du Bosphore.

Pour le blé dur, la situation est plus compliquée. L’Algérie, premier pays importateur au monde, peine à trouver une réelle alternative à la céréale française. Le Canada est dans l’incapacité d’exporter autant de grains que les campagnes passées. Et le Mexique n’a pas les moyens de répondre à la demande algérienne.

Or, bien qu’elle renonce à une partie de ses besoins (200 000 t), l’Algérie doit importer 1,1 Mt de grains d’ici la fin de la campagne. Sinon, ses habitants seront privés de coucous au ramadan !