Quatre modes d’implantation sont testés avec, pour chacun d’entre eux, des avantages et des inconvénients. Le choix parmi ceux-ci peut se faire selon les contraintes et les opportunités de chaque exploitant betteravier : matériel ou prestation disponible localement, facilité d’accès à de la main d’œuvre etc.

Le robot Farmdroid

Cette solution permet d’intervenir mécaniquement, à la fois dans l’inter-rang et dans l’intra-rang. L’intervention dans le rang est réalisée grâce à des couteaux qui passent entre les betteraves, géolocalisées au moment du semis réalisé par le robot.

L’ITB l’a testé à Bazancourt (51), en partenariat avec Stecomat. Sur les premières interventions de désherbage mécanique, réalisées avant la levée, et au tout début de la levée des betteraves, les couteaux n’ont pas été positionnés, de crainte de déplacer les graines. Dès la levée établie, ceux-ci ont été utilisés. Le positionnement des graines et leur géolocalisation ont été suffisamment bons pour permettre ces interventions dans le rang, sans pertes significatives de pieds de betteraves. L’efficacité des interventions est conditionnée par le stade des adventices. Dans le contexte de l’année 2021, en raison de l’impossibilité de réaliser une intervention avec les conditions pluvieuses, et donc de maintenir un rythme de passage d’environ 7 à 10 jours, des adventices ont eu le temps de se développer jusqu’à atteindre le stade 4 feuilles. Celles-ci n’ont pas pu être détruites par le robot. Une intervention de désherbage manuel a donc été nécessaire, avec une estimation à 66 h/ha, contre 120 h/ha sur la modalité de semis classique, sur laquelle le désherbage a aussi été géré avec les outils de désherbage mécanique courants. Par ailleurs, le salissement ayant été mieux maîtrisé au cours du cycle cultural, le rendement obtenu est supérieur à celui de la modalité de semis classique (figure 1).

Le semis sous bâche

Sur le même essai, conduit à Bazancourt, des betteraves ont été semées sous bâches noires Samco® avec pour objectifs : un développement des adventices limité à l’inter-bâche et éventuellement aux trous réalisés où sont positionnées les betteraves, et une croissance accélérée du fait d’un réchauffement plus rapide du sol. Un gain de rendement de 16 % a été constaté en 2021 par rapport à un semis classique (figure 1), probablement majoré par le fait que l’essai était situé en terres blanches, lentes à se réchauffer. Pour la gestion des adventices, du désherbage manuel est aussi nécessaire, mais dans une mesure moindre que pour un semis classique (moins de 40 h/ha sur le site de Bazancourt).

Cette technique reste chère à mettre en place : il faut compter environ 1 200 €/ha pour une prestation de semis. De plus, elle est déconseillée dans des parcelles avec une forte présence de vivaces.

Le repiquage de plants

Il permet d’intervenir mécaniquement peu de temps après l’implantation, et de profiter du décalage de développement entre les betteraves et les adventices. C’est la solution permettant d’avoir le recours le plus faible à du désherbage manuel : dans des essais conduits dans l’Aisne, 12 h/ha contre 75 h/ha pour un semis classique en 2018, 9 h/ha contre 102 h/ha en 2019, 5 h/ha contre 65 h/ha en 2020.

Dans l’essai conduit cette année par la délégation ITB de l’Aisne, des difficultés d’implantation ont été rencontrées du fait du temps sec. L’accès à l’irrigation reste donc une sécurité pour assurer la réussite de cette mise en place onéreuse : pour l’achat des plants, il faut compter environ 1 800 €/ha pour une population de 65 000 plants/ha, jugée suffisante. Enfin, même si une avance de végétation est souvent constatée du fait de l’implantation de plants déjà développés, le niveau de rendement ne ressort pas systématiquement supérieur à celui d’un semis classique (figure 1). Les betteraves ont tendance à former une boule, et à avoir un pivot de mauvaise qualité. Le repiquage à un stade précoce du plant (2-4 feuilles) permet de limiter un peu le problème.

Le semis pour binage intégral

Cette solution consiste à aligner les betteraves perpendiculairement à la direction du semis, afin de réaliser des interventions de binage en travers, et ainsi, de limiter le recours au désherbage manuel. Elle est permise par la technologie Geoseed 2®, développée par Kverneland.

L’espacement considéré doit être adapté au matériel de binage disponible. Cela peut conduire à une réduction de la population semée. Sur des espacements de 25 cm (89 000 pl/ha), aucun décrochage de rendement important n’a été détecté dans les essais conduits en production biologique par l’ITB (figure 1). Cette solution permet une réduction importante du désherbage manuel, mais moindre que celle permise par le repiquage.

La difficulté reste d’avoir un semis qui soit bien aligné, ce qui nécessite un signal GPS infaillible et une très bonne maîtrise de la technologie par les opérateurs : plusieurs essais conduits par l’ITB ont été mis en échec par un défaut d’alignement.

La robotique au service du désherbage mécanique

Cette année, l’ITB a testé le robot Farmdroid FD20 pour le semis et le désherbage mécanique de la betterave. Ce robot électrique est entièrement autonome grâce à un panneau solaire et à des batteries. Lors de la mise en place de la parcelle, l’agriculteur enregistre les quatre coins de la parcelle et le robot établit son plan de circulation. Il a la particularité de travailler essentiellement grâce au GPS RTK : lors du semis, la position de chaque graine est référencée. Le désherbage mécanique sur le rang est réalisé avec des lames qui s’escamotent à chaque plante grâce à la position GPS enregistrée au semis. Le robot a été développé en particulier pour la culture de betterave sucrière, mais il est désormais possible de l’utiliser sur d’autres cultures telles que la chicorée ou les oignons.

D’autres acteurs de la robotique s’intéressent également au désherbage mécanique de la betterave sucrière. Naïo Technologies et Strube travaillent sur un robot de binage sur le rang et l’inter-plantes, basé sur de l’analyse d’image en temps réel. Le robot Robotti d’AgroIntelli est un robot porteur sur lequel viennent s’atteler des outils existants tels qu’un semoir ou une bineuse guidée par caméra pour réaliser un désherbage mécanique. Farming Revolution a présenté un robot hybride thermique électrique, avec la particularité d’utiliser une fraise rotative guidée par caméra pour faire le désherbage entre les plants, ce qui lui permet d’intervenir sur des adventices un peu plus développées.

Le prix et le débit de chantier de ces technologies sont aujourd’hui un point limitant pour leur application à grande échelle. Elles sont particulièrement adaptées à l’agriculture biologique car elles permettent de limiter le recours au désherbage manuel, qui est l’un des principaux postes de dépense.