La récolte 2021 met fin à quatre années d’érosion du revenu des systèmes betteraviers axonais, dévoile le centre de gestion Cerfrance Champagne-nord-est-Île-de-France dans son analyse de conjoncture. Mais, malgré la hausse, il reste en dessous du revenu des polyculteurs à dominante céréalière (75 %). Une situation de plus en plus fréquente depuis 2018, année où les polyculteurs ont atteint le même niveau de revenu que leurs collègues betteraviers.

Les céréaliers mieux lotis

Dans une ferme betteravière type de l’Aisne (160 ha, avec 25 % de betteraves et 1,8 unité de main-d’œuvre), la récolte 2021 a permis un résultat moyen de 330 €/ha. À comparer au catastrophique 180 € l’année précédente, marquée par la jaunisse. Ce résultat courant dépasse la petite moyenne à cinq ans de 210 €/ha, qui intègre l’année 2016 et l’année « jaunisse ». L’excédent brut d’exploitation (EBE) des betteraviers 2021 atteint 540 €/ha, contre 400 la campagne précédente. Le produit/ha a augmenté de 7,3 %, passant de 1910 à 2050 €/ha (moyenne à 5 ans de 1 920 €/ha).

Les céréaliers de l’Aisne (145 ha, dont 60 % de céréales et 15 % d’oléagineux avec 1,6 UTH) s’en sortent mieux que leurs collègues betteraviers. Leur résultat moyen atteint 390 €/ha et l’EBE 640 €/ha (respectivement 130 €/ha et 380 €/ha en 2020). Ils bénéficient de la hausse des cours des céréales. En revanche, les producteurs de légumes de plein champ (35 % de cultures industrielles sur 210 ha) voient leur résultat courant plonger à 146 €/ha, (soit la moitié de la moyenne quinquennale de 300 €/ha) avec un EBE de 515 €/ha.

Une grande hétérogénéité de résultats

Ces résultats moyens par système cachent une grande hétérogénéité. Le quart des betteraviers ayant le plus faible revenu obtient un résultat courant négatif de – 70 €/ha (soit une perte de 11 200 € par exploitation moyenne) avec un produit de 1910 €/ha et un EBE de 290 €/ha. Au contraire, le quart supérieur obtient un produit de 2 200 €/ha, avec un EBE de 760 € et un résultat courant de 560 €/ha. Le gradient des rendements en céréales qui, comme souvent dans l’Aisne, est meilleur dans le nord du département que dans le sud (de 8,8 t/ha dans le Nord à 8 dans le Sud en blé et 3,4 t/ha de colza dans le nord du département contre 2,8 dans le sud), accentue les différences de résultats.

Pour réaliser ces projections, le centre de gestion se sert d’une hypothèse de prix de vente à 180 €/t pour le blé et l’orge de printemps, 26 €/t pour les betteraves et 480 €/t en colza. L’évolution des charges 2021 a finalement été contrastée, avec – 10 % pour les engrais et amendement, + 15 % pour les carburants, +5 % pour l’aliment du bétail. Les salaires gagnent 1 % et le foncier 1,09 %.

Une variation de prix de vente des produits agricoles influe directement sur les résultats économiques. 10 € par tonne de blé supplémentaire font gagner 40 € de résultat à l’hectare. Avec une tonne de blé récoltée en plus par hectare, le résultat gagne 86 €/ha. Idem en betterave, avec 5 t de plus à la sucrerie par hectare, le planteur engrange 32 €/ha supplémentaire. Et un euro de plus payé à la tonne rajoute 20 €/ha !

Des trésoreries en progression

Les systèmes betteraviers améliorent leur trésorerie grâce à l’évolution positive de l’EBE 2021. La ferme de l’Aisne moyenne de 160 ha avec 40 ha de betterave dispose d’un EBE de 87 100 € pour sa récolte 2021. Elle peut rembourser ses annuités professionnelles de 44 100 €. Le solde restant de 43 000 € lui permet de payer la main-d’œuvre familiale, soit 30 500 €/personne, contre 13 900 € en 2020. Ces chiffres moyens demeurent inférieurs à l’EBE dégagé dans le système céréalier. Avec 92 100 € d’EBE moyen, il dégage un revenu par unité de travailleur familiale de 39 300 € après le remboursement des annuités professionnelles de 39 200 €.

Encore une fois, ces estimations types cachent aussi une grande disparité. Pour les flux de trésorerie, le quart des betteraviers ayant des résultats économiques les plus faibles (120 ha avec 1,09 unité de travail familial) dégage un EBE de 34 400 €, qui permet juste de rembourser les annuités (34 300 €). En fin de compte, il ne reste rien pour rémunérer la main-d’œuvre familiale. Pour les planteurs du quart supérieur, l’EBE atteint 128 800 €. Après remboursement des annuités (41 100 €), il reste 77 000 € par Unité de travailleur humain (UTH) familiale.

Le centre de gestion alerte sur la nécessité d’utiliser les outils fiscaux et de gestion pour gérer la volatilité des revenus. Avec la Politique agricole commune (PAC) qui sera mise en place en 2023, il estime que les nouvelles règles engendreront une baisse du résultat courant en 2027 de 9 % pour les systèmes betteraviers et de 6 % pour les systèmes céréaliers. L’aide à l’Unité de gros bétail (UGB) favorisera les systèmes laitiers et défavorisera les systèmes viande. Attention aussi, le non-respect des nouvelles règles pourra être très pénalisant.

Enfin, Cerfrance propose à ses adhérents de se positionner sur les marchés à terme des céréales après le calcul de couverture des charges 2022 en pleine explosion.