L’été caniculaire n’aura guère eu d’impact sur la récolte des oléagineux pour 2022, qui restera peut-être même dans les annales en termes de rendement comme de prix à la tonne pour les producteurs. Certes, les cours de la graine de colza ont fléchi ces dernières semaines pour s’installer sur un seuil plancher de 600 €/t. C’est le cas sur les marchés physiques Fob Moselle et Rendu Rouen, qui affichent le 22 août 602 €/t. Pour les marchés à terme sur Euronext, l’échéance de novembre affiche à peu près le même cours, et les échéances de février, mai et août 2023 se situent entre 600 et 615 €. C’est dire si les prévisions de prix pour les mois qui viennent devraient rester stables, sauf soubresauts liés à l’actualité.

Certes, on est loin des cours extrêmes qui avaient dépassé les 1 000 €/t pendant quelques jours en mai, quand la pénurie s’était installée en fin de campagne. Les cours actuels sont revenus au niveau d’avant la guerre en Ukraine, mais ils étaient déjà en hausse en raison de la reprise économique, après la sortie de crise de la Covid. Pour le tournesol, la tendance est la même. La graine vendue au port de Saint-Nazaire affiche 740 €/t, contre 600 €/t avant la guerre menée par la Russie en Ukraine. Certains pensent que les cours des graines à huile vont baisser en raison de l’accord entre les deux pays, parrainé par la Turquie et l’Onu, pour permettre le chargement de navires de céréales dans le port d’Odessa. Certes, 25 navires ont pu bénéficier de cette mesure, mais il s’agit surtout de transporter du blé et du maïs à destination de l’Afrique. Les graines de colza et de tournesol restent pour l’instant dans les silos, et les infrastructures gravement touchées ne permettront pas une exportation de masse dans les mois qui viennent.

Hausse des surfaces de tournesol

Les producteurs bénéficient ainsi non seulement de cours solides, mais aussi d’une récolte particulièrement abondante, selon France Agrimer. La production de colza est estimée à 4,3 millions de tonnes, avec une surface de 1,2 Mha et un rendement moyen national de près de 3,6 tonnes par hectare, voire plus dans certaines régions. La récolte 2022 est ainsi une hausse de 31,6 % par rapport à 2021 ! De plus, la campagne s’est avérée propice au développement du colza : le taux d’huile moyen de la récolte 2022 devrait s’établir autour de 44,5 %, au-dessus de la moyenne quinquennale (43,2 %). Pour le tournesol, les chiffres restent à affiner, car la canicule a engendré un stress hydrique très néfaste au développement de la graine. Mais on s’attend tout de même à une récolte de 2 millions de tonnes en 2022, comparable à la récolte de 2021, mais en hausse de plus de 25 % par rapport à la moyenne quinquennale. Et il faut noter la très forte augmentation de la surface semée, passée de 698 000 ha à 842 000 ha.

La filière oléagineuse française affiche donc pour cette campagne une très belle forme. Reste à savoir si elle va continuer à développer son potentiel. Les pluies récentes permettent de réaliser des semis pour la récolte 2023 dans de meilleures conditions. Le niveau de rentabilité actuel est favorable à ces cultures, avec des ventes qui tous producteurs confondus atteindraient 2,5 milliards d’euros pour le colza et près d’1,5 milliard d’euros pour le tournesol, avec certes des coûts de production plus élevés liés à l’inflation actuelle en carburants, intrants et machinisme agricole