Les variétés Conviso Smart sont des variétés de betteraves tolérantes à des herbicides de la famille des inhibiteurs de l’acétolactate synthase (ALS – famille des sulfonylurées). Elles ont été obtenues de façon naturelle : des méthodes classiques de sélection ont en effet été utilisées pour identifier des variétés naturellement résistantes à ces herbicides puis ont été intégrées aux programmes de sélection. Cette technologie est déjà utilisée dans d’autres productions, comme le tournesol par exemple, ou en betteraves, dans 17 pays européens depuis 2 à 3 ans (cf carte).

Afin de pérenniser durablement l’utilisation de cette technique, l’ITB préconise l’utilisation de cette technologie en fractionnant le Conviso One en deux passages de 0,5 l/ha et en associant systématiquement l’utilisation en mélange d’une matière active partenaire (phenmédiphame ou éthofumésate) différente au groupe HRAC 2 (sulfonylurées).

Les variétés Conviso Smart présentent de nombreux avantages. Tout d’abord, deux applications d’herbicide suffisent, hors anti-vivace et anti-graminée (si présence de graminées résistantes aux sulfonylurées). Cette réduction du nombre de passages permet de réduire significativement l’IFT de la culture (passage d’un IFT de plus de 4 à moins de 2). Cet aspect sera particulièrement appréciable pour les agriculteurs engagés dans des stratégies de réduction de pesticide (HVE 3 ou MAE pesticide par exemple). L’herbicide Conviso One est particulièrement efficace même en condition sèche ; c’est ce qui a pu être observé cette année dans les expérimentations élargies (35 parcelles en zones betteravières pour 262 ha). Les parcelles concernées seront donc plus propres, même si la pression adventice est très forte ou si le champ présente une infestation de betteraves sauvages (betteraves montées non tolérante aux ALS). La technologie Conviso Smart permettra l’implantation de betterave dans des parcelles où cette culture avait été abandonnée. Grâce à la réduction du nombre de passages, une économie de l’ordre 40 à 80 €/ha peut être réalisée sur le coût du programme de désherbage.

L’agriculteur signera un engagement

Pour se prémunir de l’apparition de résistances et de la diffusion du gène, chaque agriculteur qui adoptera ces nouvelles variétés signera, avec son distributeur de semences, un engagement de bonnes pratiques d’utilisation. Il ne devra pas utiliser de variétés Smart dans les parcelles présentant déjà des résistances avérées aux herbicides du groupe HRAC 2. Le planteur sera dans l’obligation de coupler à l’herbicide Conviso One une ou plusieurs matières actives disposant d’un autre mode d’action HRAC (phenmédiphame ou éthofumésate par exemple) pour ne pas développer d’adventices résistantes aux sulfonylurées. Il s’engagera également à retirer les montées à graines de l’année, au plus tôt et avant maturité, et à les sortir de la parcelle ainsi qu’à détruire les repousses potentielles de betteraves dans les cultures suivantes, avant qu’elles ne montent en graines par une molécule d’une autre famille que celle des sulfonylurées. Si ces engagements n’étaient pas respectés, le fabricant de sucre se réserve le droit de traiter ces betteraves de gré à gré.

Outre ces engagements, l’ITB appelle à une grande vigilance de pratique si une parcelle de betteraves Smart était adjacente à une parcelle de variétés classiques : en effet, le produit est très volatil et pourrait détruire des betteraves classiques à proximité. Une attention toute particulière devra être apportée au nettoyage du pulvérisateur puisque le Conviso One est une sulfonylurée. Il est aussi conseillé de diversifier les modes d’action herbicides dans la rotation, en particulier de limiter l’application en solo d’herbicides de la famille des sulfonylurées afin de limiter toute résistance.

Concrètement, la première application herbicide sera à positionner au stade 2 feuilles vraies maximum des chénopodes. Le deuxième traitement sera déclenché 10 à 14 jours plus tard au minimum, toujours au stade 2 feuilles vraies maximum des nouveaux chénopodes. Le programme anti-vivace reste inchangé.

Une productivité amoindrie

Bien que considérée comme une technologie innovante pour les betteraviers, ces variétés présentent aussi quelques inconvénients : sur la base de références européennes, le coût des semences est supérieur d’environ 160 € /ha. En intégrant l’économie du programme de désherbage, cette technologie des variétés Smart présente donc un surcoût de l’ordre de 80 euros par hectare.

Par ailleurs, au regard des résultats de l’expérimentation des essais en micro-parcelles 2022, le rendement de ces nouvelles semences est inférieur de 5 à 15 tonnes par hectare en comparaison aux variétés témoins. Le planteur devra donc intégrer cet élément dans sa réflexion quant à la justification de l’utilisation de ce type de variétés. Par ailleurs, certaines cultures comme le lin ou la pomme de terre ne peuvent pas être implantées derrière une betterave Conviso Smart. Il est important de se référer à l’étiquette du produit Bayer où sont recensées les cultures possibles derrière cette sulfonylurée.

Pour ces raisons, la CGB ne peut recommander l’utilisation de cette technologie qu’en cas de situations bien spécifiques : parcelles à fortes pressions d’adventices où les programmes de désherbage classiques ne répondent plus, parcelles abandonnées par la betterave en raison d’une infestation de betteraves montées sauvages, ou en cas d’engagement dans une réduction de pesticide pour une baisse d’IFT (certification HVE 3, MAEC réduction de phyto,…). Selon le syndicat, cette technologie reste néanmoins une réelle innovation technique présentant un vrai intérêt pour la filière : c’est un outil de plus pour développer des hectares de betteraves.

Garante du maintien de la productivité de la betterave et de la filière, la CGB attend donc encore de ces variétés des progrès en termes de productivité ; le planteur cherche de la rentabilité et non du confort, implanter des variétés Smart simplement pour faciliter le travail n’est pas encore un choix pertinent sur le plan économique. À noter que pour les semis 2023, la disponibilité en variétés Smart sera faible et devrait représenter moins de 2 % des surfaces françaises.

Pour les semis 2023, le semencier KWS proposera des variétés Conviso à la vente mais en quantité très limitée. SES Vanderhave et Betaseed mettront pour leur part seulement quelques centaines d’unités chacun sur le marché, plutôt à titre expérimental. Ils entreront plus significativement sur le marché en 2024. L’entreprise Maribo devrait suivre à partir de 2025, alors que le groupe Deleplanque n’a pas souhaité s’engager dans cette voie. Florimond Deprez ne commercialisera pas de betterave bas intrant avant deux ou trois ans. Le semencier veut attendre que l’écart de productivité soit réduit.