Agriodor est une jeune société créée en 2019 par Ene Leppik, une ancienne chercheuse de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) spécialisée dans les relations plante/insecte, et Alain Thibault, un multi-entrepreneur. Son objectif est de développer des répulsifs pour protéger les cultures des insectes ravageurs. En effet, tout comme les moustiques fuient en présence de citronnelle, les insectes sont très sensibles aux odeurs, que ce soit pour leur orientation, leur alimentation ou leur reproduction.

Depuis la crise de la jaunisse de 2020 et la création du Plan national de recherche et d’innovation (PNRI), Agriodor travaille à la mise en place d’un produit pour protéger les betteraves des pucerons verts. « Les essais menés en 2022 en laboratoire et sur des micro-parcelles ont permis de diviser par trois la population de pucerons présents sur les betteraves. Et nous travaillons à améliorer encore cette performance », explique Camille Delpoux, la directrice des opérations. « L’enjeu de l’année 2023 est de mettre en place des essais sur de plus grandes surfaces, dans de nombreuses localisations et de tester leur efficacité en conditions réelles », ajoute-elle. Par ailleurs, elle précise que le produit n’agit pas que sur la répulsion des vols de pucerons. Il diminue aussi leur reproduction ainsi que leur alimentation sur la plante, et donc, par voie de conséquence, la transmission du virus à la betterave.

Pour l’instant, la rémanence du produit de biocontrôle n’est que d’une à deux semaines, explique l’ingénieur agronome. Mais la société espère commercialiser prochainement un produit efficace sur 8 semaines afin qu’une seule intervention soit nécessaire pour couvrir la période de vulnérabilité de la betterave.

Un produit simple à utiliser

Selon Camille Delpoux, la société Agriodor travaille pour que l’utilisation du biocontrôle soit le moins possible synonyme de complexification de l’itinéraire technique. Ainsi, le produit en cours de développement sera applicable avec un simple épandeur à anti-limace (sur 24 mètres). « Nous travaillons sur la balistique des granulés pour améliorer l’homogénéité de l’apport », explique-t-elle.

Si la société espère débuter la commercialisation du produit auprès des betteraviers en 2025, Camille Delproux reste très humble : « même quand il sera au point, notre produit ne réglera pas tout le problème à lui tout seul. Ce ne sera pas une solution miracle. Il devra être couplé à une tolérance variétale et/ou à des insecticides, voire à d’autres produits de biocontrôle en cas de pression pucerons élevée ». Mais elle note qu’en cas d’infestation très forte comme en 2020, le Teppeki et le Movento ne sont pas assez efficaces si les populations ne sont pas réduites préalablement.

Afin d’assurer la continuité du développement de ces produits pleins d’espoir pour la filière betterave, Agriodor vient de lever 5 millions d’euros, explique Alain Thibault, son PDG. En effet, les fonds touchés dans le cadre du PNRI ne sont pas suffisants et la société n’a pas encore d’activité commerciale. Parmi ceux qui ont répondu présent, on peut trouver CapAgro, le célèbre fonds spécialisé dans l’agriculture et l’agro-alimentaire. À court terme, l’objectif de la start-up est la betterave. Mais par la suite, elle a l’intention de mettre au point des solutions contre d’autres insectes sur d’autres cultures. Une entreprise à suivre de près…

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