Quelle chute : alors qu’au début du mois d’avril, le cours du sucre brut dépassait les 22,5 cts/lb, le voilà sous les 20 cts/lb quinze jours après !

La monnaie brésilienne n’y est pas pour rien : il faut désormais presque 5,2 réals pour avoir un dollar, alors qu’il en fallait moins de 5 depuis l’automne dernier. Or, quand la monnaie du premier exportateur flanche, ses opérateurs sont capables de vendre moins cher leur sucre libellé en dollar : ils auront – tout au moins sur le court terme – la même marge en réal. Mais la fragilité de la monnaie brésilienne n’explique pas tout.

Car, si les statistiques de fin de campagne ont confirmé que la production de sucre du pays a été exceptionnelle, c’est aussi – et surtout ? – la météo à São Paulo qui a fait plonger les cours. Les pluies tant attendues sont arrivées, et certains y voient un signe que la nouvelle campagne, qui débute, va être bonne. C’est en tout cas la perception des spéculateurs qui réduisent leurs positions à l’achat et contribuent ainsi à la chute du sucre.

Cela durera-t-il ? Tout le monde s’interroge : les fondamentaux restent tendus sur le moyen terme, les stocks sont bas… Attendons donc de voir car, dans l’immédiat, cela ressemble étonnement à ce que l’on appelle du ‘weather market’ : il suffit d’une annonce climatique, lorsqu’un marché se cherche, pour amorcer une tendance, qui peut très bien être modifiée la quinzaine suivante ! D’ailleurs, et dans l’immédiat, la demande semble se tenir : la prime de blanc (la différence entre le sucre brut et le sucre blanc, immédiatement consommable) se maintient au-dessus de 140 $/t – c’est 50 % de plus que sa moyenne quinquennale.

Du côté européen, c’est aussi la grande inconnue et le marché du spot semble bel et bien avoir arrêté sa baisse. Certes, les surfaces sont en progression dans l’Union, mais les retards de semis sont tels qu’il est de moins en moins probable que les rendements soient dans la moyenne haute. Et si l’on ajoute les pucerons déjà bien présents en plaine, les prévisions de production pour la campagne à venir sont bien difficiles à réaliser ; mais il y a peu de chance que le résultat soit réjouissant. Ce qui est sûr, cependant, c’est que le sucre ukrainien manquera, en bonne partie, à l’équilibre du marché. Le compromis trouvé à Bruxelles se traduira, pour la campagne 2024-2025, par un volume maximal de sucre ukrainien à destination de l’Union autour de 270 000 t de sucre : c’est quasiment un demi-million de tonnes de moins que ce que l’on anticipe sur la campagne en cours (2023-2024)…