Benoît Piétrement
« Ma principale problématique, c’est la gestion du temps, affirme Benoît Piétrement, betteravier à La Villeneuve-lès-Charleville dans la Marne. Mes nombreuses responsabilités professionnelles (président d’Intercéréales et de sa coopérative Novagrain, vice-président de l’AGPB…) m’obligent à m’absenter très régulièrement en dehors de mon exploitation. Pour faire face à cette situation, j’ai adapté l’organisation de mon exploitation selon 3 principes : rationalisation, simplification, stabilité ».
Rationalisation
« L’ensemble de ma plaine est divisée en parcelles d’environ 10 hectares », explique Benoit Piétrement, qui a organisé son assolement selon une rotation stable dans le temps : betterave, blé, colza, blé et orge dans les terres où il peut mettre des betteraves. Là où ce n’est pas possible, il les remplaçait par des féveroles et aujourd’hui, par du maïs.
Pour la commercialisation des céréales et du colza, Benoît Piétrement opte pour le prix moyen, un prix proposé par la coopérative Novagrain dont il est président, bien qu’il reste connecté en permanence aux marchés, notamment en raison de la présidence du conseil spécialisé grandes cultures de FranceAgriMer. « Ce choix m’apporte un véritable gain de temps en termes d’organisation et une tranquillité d’esprit ». Un système éprouvé et gagnant à long terme.
Recours à de la main-d’œuvre extérieure
Côté mécanisation et organisation du chantier, Benoit Piétrement a travaillé pendant 15 ans avec un de ses voisins en mutualisant l’ensemble du matériel sur plus de 300 hectares. Il a depuis peu choisi de se réorganiser seul, en faisant appel à un voisin éleveur. Ce dernier l’aide dans la conduite et l’entretien du matériel, pour l’équivalent d’un mi-temps. Une collaboration qui n’empêche néanmoins pas le travail aux champs. « Je réalise moi-même toute la pulvérisation », affirme l’agriculteur en reconnaissant que son emploi du temps l’empêche parfois d’intervenir au moment optimal et l’oblige à anticiper certains traitements.
Par ailleurs, « suite au partage du matériel que j’avais en copropriété, je me suis retrouvé avec des tracteurs et des outils dimensionnés pour plus de 300 hectares alors que j’en ai moins de 200 ». Mais c’est aujourd’hui devenu une réelle force puisque cela lui permet d’intervenir très rapidement.
Enfin, l’agriculteur a choisi de louer et non d’acheter un de ses deux tracteurs de têtes, avec un forfait d’entretien et de réparation. « Quand on fait la somme de l’ensemble des frais, c’est un petit peu plus cher mais, là encore, cela simplifie mon organisation et m’apporte une réelle flexibilité ».
Stabilité de l’assolement
L’agriculteur raisonne sur le long terme, avec un assolement stable, quel que soit le contexte économique. « J’ai d’ailleurs toujours gardé la même surface de betteraves depuis la période des quotas », explique le planteur de Connantre, dont le rendement moyen est compris entre 80 et 85 t/ha. Il est cependant descendu en 2024 à 70 t/ha en raison de la cercosporiose, qui a fait chuter la richesse à 14,5°.
Biodiversité et décision politique
Benoît Piétrement est aussi fermement engagé pour la biodiversité. Au-delà des différentes actions qu’il a menées, notamment au sein de la FDSEA de la Marne dont il a présidé la commission environnement, il agit concrètement dans sa ferme en faveur des oiseaux. Par exemple, il veille à ce que les rapaces puissent nicher dans ses bâtiments d’exploitation et abreuve les oiseaux l’été dans ses champs.
L’agriculteur se désole d’ailleurs de devoir arrêter la culture de féverole. « C’était un très bon réservoir de nourriture pour les abeilles et les bourdons. Pendant la floraison, on entendait de loin le bruit des pollinisateurs nombreux sur les parcelles ». Mais, malheureusement, l’interdiction de l’insecticide qui permettait de protéger la culture contre les bruches a eu pour conséquence de réduire drastiquement les rendements, privant ainsi les pollinisateurs d’apports nutritionnels. À noter que Benoît Piétrement a connu de très bons rendements en féverole. « Je ne descendais jamais en dessous de 50 qtx, à part les très mauvaises années ». Il a même atteint 84 qtx/ha une année et 78 qtx/ha l’année suivante. « J’ai finalement dû arrêter la culture après plusieurs années de cultures catastrophiques ».
Autre incohérence politique que le céréalier regrette : la réduction de la boîte à outils des traitements de lutte contre les adventices pour céréales. « Cela nous oblige à utiliser toujours les mêmes molécules, ce qui accélère l’apparition de résistance », se désole-t-il, alors que le développement des graminées met en danger cette année certaines de ses parcelles de blé ou d’escourgeon.