Trois mois après son ouverture, les prix de livraison du sucre de la nouvelle campagne 2018-2019 sont (enfin !) publiés par la Commission européenne. Pour mémoire, ces prix, qui correspondent au sucre livré en vrac (ou en sac de plus de 800 kg), sont transmis par les fabricants de sucre à leurs autorités de tutelle, qui remontent l’information à la Commission européenne. Cette dernière en fait la moyenne et diffuse un prix moyen européen ainsi que, depuis la fin des quotas, trois chiffres pour trois zones de production : celle qui comprend la France inclut également la Belgique, l’Allemagne, le Royaume-Uni et les Pays-Bas. Et alors que, entre septembre et octobre 2018, les prix mondiaux avaient gagné 11 %, la chute européenne se poursuit… Le prix d’octobre, premier mois de campagne 2018-2019, plonge de presque 10 % et atteint, pour la zone qui inclut la France, les 307 €/t. Du jamais vu: c’est presque 25 % de moins que le seuil de référence européen à 404 €/t, qui n’a certes plus grande valeur juridique, mais qui reste un marqueur de seuil de crise. Il faut garder en tête que les contrats livrés en octobre dernier ont été négociés avant l’entrée en campagne 2018-2019. Sur le marché spot, la reprise est réelle : la semaine dernière, ces contrats spots, c’est-à-dire négociés au jour le jour, se montent à 402 €/t rendu utilisateur en Europe de l’Ouest, et 440 €/t rendu utilisateur en Europe méditerranéenne. Soit un équivalent, sortie sucrerie française, autour des 370 €/t. Cet écart de 70 €/t laisse un espoir pour une remontée des cours en Europe sur le moyen terme. D’autant que le bilan européen est tendu. Si les surfaces 2018 sont quasiment identiques à celles de 2017, la sécheresse de l’été et de l’automne dernier a affecté tout le territoire européen, et on s’attend à une baisse de production de 3 Mt. L’Europe pourrait ne pas avoir suffisamment de disponibilité pour exporter davantage que ce qu’elle faisait sous les quotas ! La Commission européenne anticipe même un stock de fin de campagne à un niveau qui n’a pas été vu depuis 2015-2016… La question est désormais de savoir quand cette reprise se concrétisera dans les livraisons : cela dépendra des durées d’engagement des contrats passés.

Timothé Masson, CGB