Comment les producteurs vivent-ils l’annonce de la fermeture d’Eppeville ?

Cette décision brutale et unilatérale a été une surprise complète. Quand le groupe Südzucker a annoncé son plan de restructuration, le 28 janvier dernier, nous avions certes une petite inquiétude. Le groupe possède 29 usines en Europe, nous ne pouvions pas imaginer que sur les 700 000 tonnes de restructuration annoncée par Südzucker, la France allait en supporter 500 000 tonnes.

Quelles sont les conséquences pour les planteurs de la Somme ?

Il y a 1 300 planteurs concernés pour Eppeville. Cette décision pose la question du maintien des surfaces betteravières dans la Somme, l’Aisne, l’Oise et le Nord Pas-de-Calais. Saint Louis dit que l’essentiel des activités de la sucrerie devrait être transféré vers la sucrerie de Roye, avec un ajustement de volume. Mais nous sommes dans l’incertitude complète. L’usine de Roye ne peut pas absorber l’ensemble des surfaces d’Eppeville. Soit les planteurs d’Eppeville arrêtent totalement, soit les planteurs de Roye devront baisser leur production. Tout le monde pourra-t-il continuer à faire de la betterave ?

Quelle alternative proposez-vous ?

La première chose est d’essayer de trouver une solution avec Südzucker. Le groupe veut réduire de 700 000 t sa production de sucre. Or, 700 000 t de moins, c’est justement la production qu’il faisait il y a 2 ans ! Nous pensons qu’il vaudrait mieux que Südzucker baisse la production de 15 % dans toutes ses usines européennes pour pouvoir produire plus quand les cours seront porteurs, plutôt que de sacrifier un outil performant comme Eppeville. Je trouve que Südzucker a une vision de court terme sur ce dossier. Si l’on ferme des usines à chaque fois que les cours sont bas, on va fermer des sucreries tous les deux ans !

Quelles actions envisagez-vous ?

Les betteraviers d’Eppeville appellent à une large mobilisation le vendredi 1er mars de 10 heures à 14 heures devant la sucrerie. Tous les acteurs économiques potentiellement touchés par la fermeture et les élus politiques locaux sont invités à venir dialoguer avec nous. Car l’impact pour les planteurs est certes terrible, mais il est aussi important pour les autres partenaires et les sous-traitants.

L’arrêt de cette sucrerie serait catastrophique pour l’économie du département avec la remise en cause de plus de 600 emplois directs, indirects et induits : les salariés de l’usine, les transporteurs, les sous-traitants (chaudronnerie, mécaniciens, électriciens…), les commerces locaux (épiceries, distribution alimentaire, brasseries…) et les entrepreneurs agricoles. On est en train de désindustrialiser la France et on laisse faire. On ne peut pas subir et voir cette filière s’affaiblir.

Propos recueillis par François-Xavier Duquenne