L’assolement en commun va se développer de plus en plus, poussé par des impératifs économiques (intrants, mécanisation…). Les agriculteurs cherchent en permanence à réduire leurs coûts. L’assolement en commun permet de répondre à cet objectif tout en restant indépendant.

La première étape d’une « mutualisation indépendante » est la création d’une société en participation (SEP). Instaurée par la loi d’orientation agricole de 2005, elle peut être formée entre agriculteurs, qu’ils soient exploitants individuels ou qu’ils exercent leur activité dans le cadre d’une autre société. Attractive par son formalisme réduit et la possibilité de se constituer sans capital, elle nécessite tout de même la tenue d’une comptabilité. Soumise à l’impôt sur le revenu, elle peut opter pour l’impôt sur les sociétés et à la TVA. Elle doit aussi être déclarée à l’administration fiscale qui lui attribue un numéro pacage. Les associés sont ainsi libres de déclarer leurs surfaces au titre de la PAC séparément au nom de leur structure, ou collectivement au nom de la SEP.

Des statuts à rédiger sérieusement

Classée dans la catégorie des sociétés de personnes, la SEP a la particularité de ne pas avoir de personnalité morale distincte de celle des associés. Cette grande liberté est aussi un danger pour ses associés.

Certains organismes stockeurs ou coopératives peuvent par exemple ne pas la reconnaître du fait de l’absence de Kbis. Mais le danger est surtout juridique. Pour s’en prémunir, il convient de rédiger avec soin les statuts qu’il peut être utile de compléter d’un règlement intérieur sur les règles de vie de la SEP. Il ne faut pas hésiter à se faire accompagner dans ce formalisme afin de penser à tout, même le pire : l’entrée d’un nouvel associé, la sortie, le retraite, le décès, la répartition des bénéfices… Le plus souvent, ceux-ci sont partagés au prorata des hectares mis en commun. Les associés peuvent aussi décider de les corréler au temps de travail de chacun ou aux potentiels des terres apportées.

Le choix du gérant est également stratégique car c’est la seule personne reconnue par les tiers. C’est elle qui prend les risques même si les associés sont tenus par une responsabilité illimitée. Toutefois, plusieurs cogérants peuvent être nommés, voire même tous pour plus d’équité.

Enfin, il faut être vigilant au regard du statut du fermage. La SEP ne peut pas posséder de patrimoine propre. Les parcelles mises en commun restent détenues en propriété ou en location par l’associé. Dans ce dernier cas, le preneur est tenu d’informer son bailleur par lettre recommandée avec accusé de réception et de lui communiquer les statuts de la SEP. À défaut, il encourt la résiliation du bail (article L. 411-39-1 du code rural). Le propriétaire a ensuite deux mois pour contester le choix de son fermier, pendant lesquels les terres louées ne peuvent être mises à disposition de la SEP.

Perte d’identité de la ferme

La deuxième étape d’une mutualisation indépendante est la mise en commun du matériel et parfois des salariés. La SEP est alors souvent complétée d’un groupement d’employeurs et d’une société pour porter le matériel (SNC, SARL, Cuma ou GIE). Arrivés à ce stade, les associés de la SEP franchissent souvent un pas supplémentaire en groupant leurs achats et en commercialisant collectivement leur récolte, tout en gardant toujours leur indépendance. On le voit bien, la ferme initiale de chaque associé se fond dans l’ensemble commun, elle perd son identité. Ce n’est pas un problème si les associés ont la même vision stratégique. Sinon, il peut être difficile de récupérer son apport. Au moment de la retraite, un autre problème se pose. Sans repreneur et rebutés par les faibles montants des fermages, de plus en plus de retraités préfèrent donner à leurs associés de la SEP les terres “à faire à façon” plutôt que de les leur louer. Cela remet en cause la démarche collective. La continuité ou la sortie de la SEP doit alors être anticipée.