Mardi 10 décembre, lors de son discours d’ouverture à l’occasion de la Conférence 2019 sur les perspectives agricoles de l’UE, le nouveau commissaire à l’agriculture Janusz Wojciechowski a annoncé que l’exécutif européen se concentrerait sur le développement de l’agriculture biologique, l’accès à la terre pour les jeunes exploitants agricoles et les transports.

Cette importante conférence rassemble chaque année plusieurs acteurs européens, et a pour but d’ouvrir le dialogue sur l’avenir de l’agriculture en Europe. Elle permet aussi d’esquisser des mesures pour surmonter les défis qui se profilent Les pratiques agricoles tournées vers le bio seront aux centres des préoccupations, a souligné le commissaire, avançant qu’il souhaitait réduire l’agriculture intensive, notamment l’utilisation de pesticides et de fertilisants.

Pour ce faire, un plan d’action adéquat et « offensif » doit être mis en place, dans le courant de l’année prochaine, estime-t-il. Cette nouvelle disposition impliquera également une contribution financière à la stratégie européenne « de la fourche à l’assiette ». Celle-ci s’intéresse à la façon dont le bio peut aider le secteur agroalimentaire à améliorer sa durabilité tout au long de sa chaîne d’approvisionnement.

Il a ajouté qu’il préférait ainsi manier « la carotte plutôt que le bâton », indiquant que politique agricole commune (PAC) devait être utilisée pour encourager de meilleures pratiques agricoles.

Selon lui, L’UE compte plus de 12 millions d’hectares de surface agricole bio répartis dans quelque 200 000 exploitations agricoles. Mais la propension à produire et consommer bio n’est pas la même pour tous les États membres, avec des taux de consommation allant 0,5 % à 10 % à travers tout le bloc.

En outre, lors de la conférence, le Polonais a affirmé que se tourner vers l’agriculture bio « n’était pas une sinécure » pour nombre de personnes et que le prix constituait souvent un frein auprès des consommateurs potentiels.

Interrogé par Euractiv, M. Wojciechowski a déclaré que « la consommation était l’obstacle majeur au bon développement du bio en Europe », et que le marché était semé d’embuches, en particulier liées à la vente de produits bio.

À ses yeux, le deuxième pilier de la PAC pourrait permettre de résorber cette problématique. La PAC devrait être assortie « d’un instrument d’intervention pour soutenir l’agriculture bio » qui n’inclurait pas seulement les agriculteurs, mais s’adresserait aussi aux consommateurs et œuvrerait à la promotion du bio.

L’accès à la terre pour les jeunes pousses

L’accès à la terre pour les jeunes exploitants agricoles était aussi l’un des points sur lesquels le commissaire souhaitait attirer l’attention lors de son discours. Pour lui, les mesures de soutien pour les jeunes agriculteurs ne sont pas adéquates. Il faudrait les encourager davantage à ne pas quitter la profession et à affronter vaillamment « les défis liés au secteur ».

Le manque d’accès aux terres arables bon marché pour les jeunes est reconnu comme étant un frein majeur à l’arrivée des nouveaux agriculteurs. Plus de la moitié des surfaces agricoles en Europe est ainsi cultivée par des exploitants âgés de plus de 55 ans, un tiers par des sexagénaires, et 6 % par des agriculteurs de moins de 35 ans.

Une source de la Commission a récemment révélé à Euractiv que rendre le secteur attrayant aux agriculteurs en herbe et les aider à s’implanter dans des business viables était l’une des priorités de la PAC post-2020.

Les importations de soja posent-elles problème ?

Janusz Wojciechowski a également indiqué que le secteur des transports était problématique, indiquant qu’une grande partie de nos importations de nourriture et de bétail impliquaient de longs trajets.

Il a déclaré que la Commission se concentrerait sur la réduction de la distance entre « la fourche et l’assiette », augmentant ainsi l’autonomie de l’Europe dans ce processus.

À cet égard, il a cité l’exemple controversé de 36 millions de tonnes de soja importées dans l’UE en provenance des Amériques chaque année.

Toutefois, réduire les transports de longue distance d’aliments pour animaux ou de produits agricoles, à commencer par le soja, se heurte, en principe, à la politique commerciale mise en place par l’ancienne Commission européenne.

En juillet 2018, l’ancien président de la Commission, Jean-Claude Juncker, avait en effet accepté d’importer davantage de soja des États-Unis afin de mettre un terme au différend sur les droits de douane sur l’acier et l’aluminium et ouvrir des négociations pour renforcer les relations commerciales.

Au début de cette année, la Commission a aussi autorisé l’importation de soja pour la production de biocarburants, venant ainsi à la rescousse des États-Unis après les tensions commerciales avec la Chine, où les exportations de soja américain avaient été supprimées au cours des mois précédents.

Natasha Foote (Euractiv.com) – traduit par Nathanaël Herman