Comment faire face au risque de résistance ? Pour l’orge, la principale crainte concerne l’helminthosporiose, qui résiste de plus en plus aux fongicides SDHI. « Dans ce contexte, le recours à des fongicides multisites (folpel, mancozèbe, soufre) dans les programmes de protection devient stratégique, alerte Jean-Yves Maufras, spécialiste maladies chez Arvalis. Les multisites permettent de maintenir un niveau de protection acceptable tout en ralentissant le développement des résistances. »

Ajuster les applications au T1

Comment caler le programme fongicides ? Les outils d’aide à la décision tels que le Fongiscope orge d’Arvalis permettent de déclencher ou non le premier traitement. Au T1, face à l’oïdium, la période de contrôle se situe du stade « épi 1 cm » au stade « sortie des barbes ». Pour les autres maladies – helminthosporiose et rhynchosporiose –, les modèles de risque et le Fongiscope orge indiquent si des comptages sont nécessaires sur les parcelles aux stades 1 et 2 nœuds. Ensuite, ils apportent une aide au pilotage du T1 : quand la proportion des feuilles atteintes par l’une ou l’autre des maladies dépasse 10 % ou 25 % (selon la sensibilité variétale), le seuil de traitement est atteint.

Résistance à l’helminthosporiose

Pour contrôler l’helminthosporiose, maladie fréquente de l’orge, il est préconisé d’associer deux familles de fongicides. En effet, la proportion de souches résistantes aux fongicides SDHI devient de plus en plus élevée (70 %), et l’efficacité des SDHI nettement diminuée. La résistance de l’helmintho aux fongicides de la famille des strobilurines existe aussi sur environ 30 % des souches. « Parmi ces fongicides, l’azoxystrobine reste la molécule la plus affectée par la résistance, alors que la pyraclostrobine est moins touchée. La trifloxystrobine et la fluoxastrobine présentent toutes les deux des efficacités intermédiaires », selon Arvalis. Face aux fongicides de la famille des triazoles, les souches d’helminthosporiose présentent aussi une dérive de sensibilité. Le prothioconazole reste le triazole la plus efficace contre cette maladie.
En pratique, iI est donc toujours recommandé d’associer les SDHI avec un produit efficace détenant un autre mode d’action. Faut-il passer par le mélange triple SDHI + triazole + strobilurine ? Pas forcément. Car s’il renforce significativement l’efficacité sur l’helminthosporiose de l’orge, le mélange risque d’augmenter à terme les souches multirésistantes. « Nous recommandons de recourir à ces mélanges trois voies uniquement sur les variétés sensibles à l’helminthosporiose », préconisent Arvalis, l’Inrae et l’Anses dans leur note commune 2020. Enfin, l’association de deux SDHI, même appartenant à deux groupes chimiques différents, doit être comptabilisée comme une seule application de SDHI. Ce type de mélange vise principalement à accroître l’efficacité mais n’améliore pas en pratique la gestion de la résistance.

Ramulariose et rhynchosporiose

Les souches résistantes aux maladies progressent sur d’autres fronts. En particulier, la fréquence de souches de ramulariose résistantes aux fongicides de la famille des strobilurines augmente depuis dix ans. La présence de souches faiblement à moyennement résistantes aux fongicides SDHI a été confirmée en France entre 2018 et 2019. De plus, la résistance de la ramulariose aux fongicides de la famille des triazoles détectée depuis trois ans se manifeste en 2019 à des fréquences faibles à élevées selon les échantillons.
En pratique, les substances actives les plus efficaces sur le complexe ramulariose et grillures de l’orge sont le prothioconazole ou le méfentrifluconazole et les SDHI, en l’absence de résistance. En revanche, la rhynchosporiose pose moins de difficultés, même s’il existe là aussi quelques souches résistantes aux strobilurines et aux triazoles. Face à une attaque de « rhyncho », la recommandation reste identique à celles des années précédentes : associer les triazoles à un autre mode d’action efficace.