Les larves de grosses altises et charançons du bourgeon terminal peuvent exercer une forte pression dans de nombreux secteurs. En parallèle, leur résistance aux insecticides de la famille des pyréthrinoïdes a encore gagné du terrain cette année. Plusieurs mécanismes de résistance sont impliqués sur la grosse altise d’hiver, ce qui rend le contrôle de moins en moins facile, en particulier dans les zones à l’Est*. Pour ce ravageur, des niveaux de résistance très élevés sont apparus en 2020 dans de nouveaux départements de la Champagne à la Bourgogne, au-delà des zones déjà touchées : l’Yonne, l’Aube, l’ouest de la Haute-Marne, la Côte-d’Or et la Nièvre. « Les premiers cas de résistance élevée super-KDR sur grosse altise ont été identifiés dans treize autres départements cette année », note Céline Robert, ingénieure chargée d’études ravageurs des cultures et faune auxiliaire chez Terres Inovia. Cette résistance super-KDR aux pyréthrinoïdes entraîne des niveaux d’efficacité faibles, voire nuls, pour ces insecticides. Dans les autres régions comme les Hauts-de-France et le Nord-Ouest, le niveau de résistance reste plus bas : l’efficacité des pyréthrinoïdes fluctue entre 25 et 65 % avec une moyenne à 45 % dans les essais Terres Inovia. « En Normandie, les gros problèmes de larves d’altises et de charançons de la tige ont été dans l’ensemble maîtrisés cette année, mais pas partout », commente Jean Lieven, ingénieur de développement chez Terres Inovia.

Sur altise, le Boravi reste la seule alternative

En présence d’adultes d’altises, l’intervention se décide après avoir observé des morsures ou des attaques sur plantes. Le seuil d’intervention se situe quand huit pieds sur dix présentent des morsures. En cas de levée tardive du colza après début octobre, le seuil de traitement est abaissé à trois plantes sur dix avec des morsures. Plus que les adultes, les larves issues des pontes de grosse altise peuvent générer de gros dégâts sur des colzas jeunes.
Dans les zones où le niveau de résistance aux pyréthrinoïdes est faible, ces insecticides peuvent encore être utilisés, mais l’efficacité semble aléatoire. La liste des autres familles insecticides s’est sérieusement raccourcie. Depuis le printemps 2020, le chlorpyriphos-méthyl seul ou associé (Daskor, Reldan 2M…) n’est plus autorisé. La seule alternative repose sur l’insecticide Boravi WG formulé à partir de phosmet. Dans les secteurs où la résistance aux pyréthrinoïdes est forte, Terres Inovia conseille le recours à cet insecticide. Le Boravi ne peut être utilisé que deux fois par campagne. « Lorsque les applications autorisées de Boravi ont déjà été utilisées pour la protection de la culture à l’automne, seules les pyréthrinoïdes sont disponibles pour les ravageurs du printemps à l’exception de l’indoxacarbe », souligne Laurent Ruck, responsable national de l’évaluation des insecticides et du biocontrôle des ravageurs chez Terres Inovia dans le Nord-Est.

Charançon du BT : les vols peuvent être précoces

Ce ravageur survient dès septembre, à la reprise de végétation, avec des vols parfois échelonnés. Si le colza se développe bien en début de cycle, le risque de dégâts reste limité. Il faut pourtant surveiller la présence des premiers charançons au cours de septembre. Si les premières captures sont précoces, le Bulletin de santé du végétal (BSV) détermine le meilleur créneau d’intervention. En général, il est conseillé de contrôler le charançon une quinzaine de jours après les premières captures. Si ces dernières arrivent plus tard courant octobre,Terres Inovia conseille d’intervenir huit à dix jours après, en confirmant si possible le risque par des données BSV (vol, maturation, pontes). Si un nouveau pic de vol survient plus de deux ou trois semaines après le traitement, l’application peut être renouvelée, en particulier sur des colzas chétifs ou mal développés.
Dans les secteurs ayant une résistance avérée ou suspectée du charançon aux pyréthrinoïdes, Terres Inovia conseille d’utiliser du Boravi WG, seul produit homologué appartenant à une famille différente des pyréthrinoïdes. Dans les secteurs où les charançons du bourgeon terminal ne sont pas porteurs de mutations et où les grosses altises présentent des résistances faibles à moyenne, un pyréthrinoïde seul peut encore être utilisé.

La résistance touche d’autres ravageurs

Les ravageurs résistants ne sont pas présents uniquement à l’automne. Parmi quelques populations printanières de charançons des siliques ou de la tige, des mutations « KDR » et « SKDR » ont été détectées. De plus, la résistance du puceron vert aux pyréthrinoïdes est généralisée depuis de nombreuses années. La résistance du puceron vert au pirimicarbe a aussi été confirmée dans le nord-est de la France et semble très répandue. Et l’on redoute aussi l’essor d’une forme de résistance du puceron vis-à-vis d’un large spectre d’insecticides comme les pyréthrinoïdes, le pirimicarbe et les organophosphorés.

* de nouveaux secteurs de résistance ont été identifiés en 2020, à consulter sur le site www.terresinovia.fr.