En s’attaquant à l’une des icônes animales des Français, le président des chasseurs Willy Schraen a lâché une petite bombe. « Il est en train de détruire la biodiversité », a-t-il déclaré dans une interview à Chassons.com, ajoutant que « le piégeage du chat à plus de 300 mètres de toute habitation serait une bonne chose ». Stupeur et tremblements. On ne touche pas à notre matou !

Pourtant le président des chasseurs n’a fait que répéter ce qu’affirment depuis des années les naturalistes les plus réputés.

Lisons, par exemple, l’étude américaine documentée publiée dans Nature Communications. Les auteurs montrent en effet que ces animaux qui nous sont si chers se révèlent de terribles prédateurs, tuant oiseaux et petits mammifères. « Nous estimons que les chats en liberté tuent entre 1,4 et 3,7 milliards d’oiseaux et entre 6,9 et 20,7 milliards de petits mammifères par an », expliquent les scientifiques. Ces chiffres concernent les États-Unis.

Si l’on connaît le nombre de chats ayant un maître aux USA (environ 80 millions), les chiffres sont plus évasifs en ce qui concerne les chats errants (entre 30 et 80 millions). On sait également que les premiers tuent entre cinq et dix oiseaux par an, les seconds entre trente et cinquante.

Jusqu’à présent, aucune recherche scientifique de cette ampleur n’avait été menée sur la question. « On considérait que la responsabilité des chats dans la mortalité des petits animaux était négligeable, comparée aux menaces liées aux hommes, qu’il s’agisse des risques de collisions automobiles, des tours d’immeubles ou de la destruction des habitats », soulignent les scientifiques.

Différentes études ont montré que l’introduction de chats là où il n’y en avait pas auparavant a provoqué des désastres. « Sur les îles, les chats laissés en liberté ont provoqué ou contribué à la disparition d’oiseaux, de reptiles et de mammifères. Trente-trois au total, dont plusieurs espèces d’oiseaux », précise l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).

En France, la Ligue de protection des oiseaux (LPO) estime qu’un chat domestique en liberté tue entre cinq et dix oiseaux par an. Rapporté aux 13 millions de chats possédés par les Français, les dégâts sur les pies, mésanges ou autres moineaux seraient de 75 millions par an. Quand il quitte la maison, le chat domestique maraude et tue aussi bien des oiseaux que des lapereaux, des levrauts ou de jeunes écureuils.

J’ai moi-même eu un chat. À la campagne, il quittait le logis, passait la nuit dehors et rapportait régulièrement un passereau ou un lapereau. Le chat est incontrôlable. Ni Dieu ni maître. Il peut aussi vous abandonner définitivement et se reproduire dans la nature avec ses congénères. Il devient ainsi un faux chat sauvage, celui qu’autrefois on pouvait détruire « en tout temps et en tous lieux » à plus de trois cents mètres des maisons.

En France, le chat haret a été retiré de la liste des espèces chassables (arrêté du 26 juin 1987) et de la liste des animaux susceptibles d’être classés nuisibles (arrêté du 30 septembre 1988). Le maire devient seul responsable de la divagation des chats au titre de l’article L.211-20 de 2000 du code rural et de la pêche maritime. Par ailleurs, sa limitation peut continuer de s’effectuer dans le cadre de la police de la rage, qui dépend du ministère de l’Agriculture.

Totem

Globalement l’animal est aujourd’hui protégé, ce qui le met à l’abri de toute régulation digne de ce nom. Les propriétaires de chats ne se soucient pas toujours de les stériliser. L’animal se reproduit donc à grande vitesse. À la campagne les portées se succèdent et on laisse tout ce beau monde prendre le maquis. Même en ville le nombre de chats en rupture de ban est important. Il faut bien qu’ils se nourrissent ! On les retrouve bien vite dans les jardins publics où ils se régalent d’oisillons.

Les défenseurs des oiseaux constatent le phénomène mais ne proposent pas de solutions. Le chat est un totem. Il poursuivra donc ses méfaits dans l’insouciance générale.