Les plateformes expérimentales du projet inter-instituts Syppre, réunissant Arvalis-Institut du végétal, Terres Inovia et l’ITB, conduisent des systèmes de culture qui se veulent multiperformants. Concernant la réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires, l’objectif affiché aujourd’hui est une baisse de 50 % de l’IFT par rapport à la référence régionale de 2012. Dans le contexte actuel, une contrainte supplémentaire a été de tenter de se passer du glyphosate.

Sur la plateforme conduite par l’ITB en terres de craie champenoise, deux modalités sont menées en techniques culturales simplifiées, avec une implantation des betteraves précédée d’un travail du sol localisé avec le strip-till. Dans cette situation sans labour, se dispenser de recourir au glyphosate constitue un enjeu de taille.

La stratégie retenue repose sur le couple binage-traitement localisé. Après destruction des couverts, des interventions de déchaumage sont prévues jusqu’au début de l’hiver, si possible, sur gel. Le passage du strip-till vise à détruire les repousses dans les futurs rangs de betteraves. Le salissement doit ensuite être géré dans ces derniers grâce à des interventions de herse étrille et à la localisation d’herbicides. Dans l’inter-rang, les opérations de binage ont pour but de supprimer les repousses, forcément plus développées. Elles sont facilitées par la gestion des résidus de déchaumages effectués jusqu’à l’arrivée de l’hiver.

Les enseignements de l’année

Pour 2020, le salissement à l’interculture était composé de graminées (pas de cas de vulpins ni de ray-grass résistants). La première intervention de binage, probablement trop tardive, s’est révélée assez compliquée du fait des repousses importantes avec des vulpins épiés. Mais, globalement, la gestion du salissement a été satisfaisante.

Cette stratégie doit être pensée en fonction du contexte de l’année : contraintes, nature des repousses, concurrence des adventices présentes dans l’inter-rang jusqu’au premier binage… Ainsi, en 2019, des repousses de dicotylédones avaient abouti à ne pas retenir cette stratégie, jugée trop risquée. Le choix avait alors été fait d’intervenir avec du glyphosate.

Une année particulièrement intéressante pour la localisation des interventions

2020 a été marquée par une forte pression du puceron, vecteur des jaunisses, nécessitant une intervention de Teppeki et une de Movento. La localisation de ces opérations a permis une diminution de 55 % de l’IFT insecticides et une économie d’environ 35 €/ha, tout en assurant une efficacité équivalente à des interventions en plein.

Au total, la charge en produits phytosanitaires a été réduite de 180 €/ha, cette année, grâce à la rampe de localisation. Bien entendu, ces économies sont à mettre en balance avec le prix d’achat de ladite rampe. Des aides peuvent être mobilisables pour l’acquisition de ce type d’équipement, mais il est aussi envisageable d’adapter le pulvérisateur pour localiser les interventions (voir encadré).

Par rapport à la référence régionale, pour 2020 comme pour les années précédentes, la plateforme Syppre présente un IFT plus élevé pour la betterave, et ce, malgré une réduction de 40 % par rapport à un scénario où toutes les interventions auraient été faites en plein. La pression en adventices sur la plateforme oblige à de nombreuses interventions, et les passages d’insecticides en végétation viennent gonfler la valeur de l’IFT par rapport à une référence établie lorsque les néonicotinoïdes étaient autorisés.

Pour la suite, l’ambition de Syppre est d’améliorer ces performances en mobilisant une herse étrille avec réglage de pression aux stades précoces de la betterave (quatre feuilles). Ceci pour gérer mécaniquement une partie des adventices présentes dans le rang et espérer ainsi diminuer le nombre d’interventions chimiques. Il est également prévu de traiter en localisé sur une surface moindre et de réaliser les interventions insecticides d’automne sur colza avec la rampe. En effet, celui-ci est semé sur la plateforme avec le même matériel de précision que pour les betteraves.

Adapter son pulvérisateur pour traiter en localisé

Un écartement de 50 cm entre les rangs de betteraves correspond à celui existant entre les buses d’un pulvérisateur. L’utilisation d’écrous spécifiques permet de tourner les buses et de traiter une bande de 25 cm de large avec une rampe positionnée à 70 cm du sol. Il est nécessaire d’avoir un guidage RTK lors du semis et pour la pulvérisation. Au semis, il faut aussi limiter le jeu latéral du semoir. Une rampe avec suivi de terrain automatique augmentera également la précision. En revanche, certaines conditions – zones en dévers, les courbes, les fourrières et les terrains accidentés – ne permettent pas d’obtenir une précision suffisante. Ces secteurs devront donc être pulvérisés en plein.