Pas de trêve de Noël sur le marchés des céréales ! Avant les fêtes, les opérateurs avaient déjà compris que la campagne de commercialisation 2020-2021 s’achèverait avec des stocks de report quasiment identiques à leurs niveaux de 2019-2020. Les pays exportateurs majeurs de céréales finiront même cette campagne affaiblis. Pourtant, la planète n’a jamais autant produit de blé, d’orges et de maïs.
Dans ces conditions, il n’en fallait pas plus pour que les opérateurs réagissent au fil des mesures protectionnistes annoncées et prises par la Russie et l’Argentine, premier et troisième pays exportateurs de blé et de maïs au monde. Les deux nations veulent privilégier l’approvisionnement de leur marché intérieur.

Mais les décisions de leurs gouvernements respectifs tendent à raréfier l’offre mondiale de céréales alors que la demande est toujours très soutenue. La seconde partie de la campagne 2020-2021 s’annonce donc bien agitée.

Le prix de la tonne de blé a allègrement franchi le seuil de 210 €/t sur le marché de Rouen depuis le 5 janvier dernier, sans avoir encore atteint 220 €. En un mois, il a augmenté de 12-14 €. L’orge n’est pas en reste. Le seuil de 200 €/t a été atteint le 6 janvier dernier avant de baisser à 195 € deux jours plus tard. Mais c’est le maïs qui remporte la palme des hausses : +14 €/t depuis le 10 décembre dernier sur le marché de Bordeaux. Le cours de la céréale a même crû de 35 €/t en quatre mois. La hausse de l’euro par rapport au dollar n’a pas freiné l’emballement des marchés des céréales.

Les restrictions à l’exportation

Fin décembre, le gouvernement argentin a décidé de contingenter les exportations de maïs à 30 000 t par jour, alors que l’El Nina sévit toujours en Argentine. Seules 47,5 Mt de grains seront produites (-3,5 Mt sur un an) et la production mondiale de maïs est déficitaire de 20 Mt. Le 13 janvier, le gouvernement argentin est revenu sur sa décision. Toutefois, la situation reste tendue : l’USDA estime dorénavant la production américaine à 360 Mt (- 8 Mt sur un mois).
En Russie, le gouvernement va taxer en février prochain ses exportations de blé : 25 €/t dans la limite de 17,5 Mt et probablement 50 €/t au-delà. En apprenant la nouvelle, les opérateurs n’ont pas attendu pour réagir. Les cours de la céréale ne cessent de progresser. Pourtant, la production mondiale de blé est excédentaire de 18 Mt. Mais l’offre et la demande sont particulièrement déséquilibrées.
En effet, la Russie dispose d’un cinquième des capacités d’exportation mondiale de la céréale (40 Mt sur 192 Mt) tandis que le Canada et l’Australie ont pris le relais de l’Ukraine et de l’Union européenne, qui font défaut. Aussi, les pays méditerranéens, partis pour importer des quantités records de blé, comptent sur la Russie pour répondre à leurs appels d’offres.
En conséquence, le marché de l’orge fourragère, coincé entre celui du blé et du maïs, n’a pas manqué, lui non plus, de réagir à ces tensions. Or, la production et la demande mondiales étaient justes à l’équilibre au début de la campagne.
Mais la céréale a les faveurs des industriels de l’alimentation et la Chine, boycottant l’importation d’orge australienne, s’impose sur les marchés ukrainien et européen pour s’approvisionner.

Accord de commerce et de coopération UE-RU

En vigueur depuis le 1er janvier dernier, l’accord de commerce et de coopération complique les échanges commerciaux transmanche entre l’Union européenne et le Royaume-Uni. Un document de 1 450 pages détaille le cadre de l’ensemble des futures relations (commerciales, judiciaires, sociales etc.) entre le RU et l’UE à vingt-sept.
Toutes les importations devront se conformer aux règles de la partie importatrice. Toutefois, les céréales expédiées de France vers le Royaume depuis le 1er janvier, restent, comme par le passé, exemptées de taxes et de quotas.
Mais les nouvelles formalités douanières vont générer des coûts estimés à 5 % de leur valeur. Il reste à savoir qui les supportera !