Depuis deux ans, la météo printanière diminue l’impact des maladies sur l’orge d’hiver. La nuisibilité, particulièrement basse, se situait entre 7 et 8 quintaux/ha en 2020. Une seule application fongicide a suffi dans la plupart des cas.

Des coûts variables

Conséquence d’une pression réduite des maladies en 2020, le coût de la protection n’a pas augmenté. Les calculs réalisés par Arvalis montrent qu’un seul traitement bien placé donne le même rendement brut que le double traitement en 2020. En analysant le rendement net, l’avantage va clairement au traitement unique. Selon le nombre de traitements et les associations, la protection fongicide coûte environ 51 €/ha pour un traitement unique et va jusqu’à 76 €/ha pour un programme à deux traitements. La dépense fongicide varie aussi en fonction de la variété. Elle peut se limiter à 40 €/ha en 2020 pour une variété tolérante aux maladies et passer à plus de 65 €/ha pour une variété très sensible. « Les dégâts vont du simple au double selon le profil variétal », note Jean-Yves Maufras, spécialiste des maladies chez Arvalis.

De fortes différences variétales

Le niveau de résistance des variétés d’orge, tel qu’il est noté à l’inscription, peut se modifier au fil des ans. Il est donc réévalué à chaque campagne pour plusieurs maladies : rhynchosporiose, helminthosporiose, ramulariose, grillures, oïdium, rouille naine et fusariose. Parmi les variétés peu sensibles aux maladies figurent pour les orges 2 rangs : WS Cassia, LG Globetrotter, Terravista, Pleiade et Memento ; pour les escourgeons : KWS Joyau, LG Zebra, Su Laurelle, Jettoo, et les hybrides SY Scoop et Sy Galileo.

Dans les régions du nord, la résistance à la rhynchosporiose semble le critère le plus important. Face à cette maladie, les variétés les mieux placées en 2020 sont : Mascott, Sy Scoop, Tektoo, KWS Borrelly, KWS Oxygene et KWS Joyau. Parmi les variétés les plus sensibles à la rhynchosporiose figurent Etincel, Rossignola et Rafaela.
Autre maladie dommageable : l’helminthosporiose. Mal contrôlée, elle peut entraîner des dégâts importants. Elle affecte maintenant régulièrement les brassicoles Etincel et Pixel, et la fourragère LG Zebra. En revanche, les nouvelles orges brassicoles KWS Joyau, Dementiel et Mascott semblent présenter un bon comportement vis-à-vis de cette maladie. La solution la plus efficace et la plus économique pour limiter le développement de l’helminthosporiose reste de cultiver une variété résistante.

Tenir compte des résistances

Pour 2021, la stratégie de traitement sur orge garde le même cap qu’en 2020. Compte tenu des risques de résistance, Arvalis préconise d’associer et de diversifier les modes d’action. En effet, 100 % des analyses en 2020 montrent une résistance en forte hausse de l’helminthosporiose aux fongicides strobilurines (QoI). Pour les fongicides SDHI, la mutation provoquant une résistance est présente dans 80 % des échantillons et poursuit sa progression depuis 2018.

« En réponse, on doit s’efforcer d’alterner les molécules. En particulier, il faut associer les SDHI systématiquement à d’autres modes d’action (triazole, picolinamides, multisites) », souligne Claude Maumené, ingénieur chez Arvalis. Le chlorothalonil, fongicide multisites qui contrôlait bien la maladie, a été retiré du marché. D’autres associations doivent être utilisées. Dans le cas des variétés d’orge peu ou assez peu sensibles aux maladies, on peut en rester aux associations triazole + SDHI ou triazole + strobilurine. En revanche, en cas de forte pression d’helminthosporiose, il est préférable d’utiliser un mélange triple triazole + SDHI + strobilurine en T2, qui reste à réserver aux attaques graves.

Des OAD pour ajuster la protection

Des ajustements en cours de saison sont possibles grâce à des outils d’aide à la décision (OAD) comme le Fongiscope Orge. Deux modèles de risque relatifs à l’helminthosporiose et à la rhynchosporiose ont été élaborés par Arvalis pour aider au pilotage du T1 des orges. Selon le risque, ils indiquent s’il y a lieu ou non d’aller observer les parcelles aux stades 1 nœud et 2 nœuds. D’autres OAD sont accessibles. Syngenta propose Avizio, qui sera disponible sur l’orge d’hiver en 2021 avec une version mobile. Autre outil d’aide à la décision : Xarvio Field Manager de BASF permet de gérer les maladies de l’orge d’hiver du semis à la récolte.
La modulation du fongicide dans une parcelle hétérogène ouvre aussi une voie de meilleure gestion. Le système BeApi, appliqué dans le réseau coopératif d’agriculture de précision, livre des gains mesurables sur céréales. Il se base sur des diagnostics de sols fiables et géoréférencés, qui permettent de moduler précisément la dose fongicide. L’économie s’échelonne de 0,25 à 0,75 IFT en terres à faible potentiel et de 0 à 0,5 IFT dans les sols à fort potentiel. L’économie d’intrant se situe autour de 30 €/ha d’économies, avec des gains de rendement de plus de 50 €/ha. Au final, l’impact environnemental de la protection fongique peut être diminué de moitié, sans perte de compétitivité.