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Le texte, adopté par l’Assemblée nationale fin mai et publié ce mardi (1er juin), propose des mesures d’urgence pour assurer la régulation de l’accès au foncier agricole au travers de structures sociétaires.

« Les terres agricoles sont « une ressource particulière » aujourd’hui sous tension », selon la proposition initiale, déposée début février par le député Jean-Bernard Sempastous (LREM) et plusieurs de ses collègues. Face au déclin inquiétant du nombre d’agriculteurs en France (ils sont aujourd’hui quatre fois moins qu’il y a encore 40 ans) en même temps que l’augmentation de la surface moyenne des exploitations (qui, elle, a doublé entre 1988 et 2013), la préservation des terres agricoles – ressource « rare, non reproductible et garante de notre souveraineté alimentaire » – serait aujourd’hui « indispensable ».

La concentration « excessive » des exploitations et l’accaparement des terres agricoles impacterait le modèle d’agriculture traditionnel de la France et entraverait l’installation de jeunes agriculteurs, selon l’exposé de motifs de cette proposition. Elle nuirait également à l’environnement et à la biodiversité de par le développement de monocultures. En outre, la standardisation des productions entraverait la « vitalité des territoires et les emplois ruraux » en conduisant à la disparition de productions locales et du métier d’agriculteur, selon le texte.

Pour rappel : alors que l’agriculture est poussée à se transformer et notamment devenir plus écoresponsable dans le cadre du Pacte vert de la Commission européenne, la question de la viabilité du modèle agricole divise les esprits en France. Face aux exigences envers le secteur se dressent des défis majeurs, notamment les questions du revenu agricole, du renouvellement générationnel ou encore de la souveraineté alimentaire du pays.

« Préserver un modèle d’exploitation à taille humaine » serait ainsi primordial pour garantir la diversité de la production agricole et donc l’indépendance alimentaire de la France, arguent les auteurs de la proposition de loi. Pour cela, « il faut agir en régulant tous les modes d’accès au foncier, y compris le marché sociétaire ».

Car si la France dispose, depuis 1960 déjà, de deux outils de régulation de l’accès au foncier agricole, ceux-ci – conçus pour le modèle de l’exploitation familiale classique – ne sont plus adaptés au développement actuel des exploitations sous forme sociétaire. « Les sociétés exploitent désormais en France près de deux tiers de la surface agricole utile », selon le texte.

Assurer la transparence des opérations

Une « agriculture de firmes » qui se trouverait dans un « angle mort » de la régulation sur l’accès au foncier agricole, bouleversant le paysage agricole en France et provoquant « une véritable rupture d’égalité entre les exploitations puisque les personnes physiques tombent sous le coup de la régulation, tandis que les cessionnaires de titres sociaux y échappent », expliquent M. Sempastous et ses collègues.

Pour remédier à cette lacune, les députés souhaitent ainsi mettre en place un nouvel outil plus adapté afin d’ « assurer la transparence des opérations sociétaires, contrôler pour maitriser les excès et surtout orienter le foncier vers les projets les plus conformes aux orientations politiques, professionnelles et territoriales ».

La proposition de loi prévoit ainsi de permettre aux préfets de région de fixer des seuils d’agrandissement excessif en hectares « par région naturelle ou par territoire présentant une cohérence en matière agricole ». Elle vise également à soumettre les cessions de titres sociaux portant sur des sociétés détenant ou exploitant des terres agricoles à une autorisation administrative. In fine, le dispositif doit permettre de mieux contrôler « l’excès de détention ou d’exploitation de terres agricoles » et de libérer du foncier « afin de relancer l’installation d’agriculteurs ».

S’il ne s’agit dans les six articles proposés dans le cadre de ce texte que de « mesures d’urgence », ils doivent constituer le « premier volet d’une réforme foncière plus globale », selon ses auteurs de la proposition.