Au tout début de la campagne, début juillet, le prix de la tonne de blé était relativement élevé, proche de 200 € à Rouen. Mais mi-août, les cours se sont emballés, dépassant allègrement le seuil de 250 €/t. L’USDA, le ministère américain de l’Agriculture, avait alors annoncé que la consommation mondiale de blé (786 Mt) serait supérieure de 10 Mt à sa production. Celle-ci serait équivalente à la récolte record de l’an passé (776 Mt). Or, au mois de juillet, les places de marché tablaient sur 792 Mt pour couvrir une demande mondiale annoncée en hausse de 10 Mt. Aussi, les pays exportateurs seront contraints de puiser dans leurs stocks pour combler ce déficit.

Aucune autre céréale n’est en mesure de prendre le relais. La production mondiale d’orges (149 Mt) serait, elle aussi, déficitaire (- 4 Mt) et celle de maïs, à peine à l’équilibre (1 186 Mt). Et d’ici l’automne prochain, aucun pays producteur n’est à l’abri de nouveaux ajustements de production. Aux États-Unis, l’USDA a d’ores et déjà révisé ses prévisions à la baisse : 374 Mt sont actuellement susceptibles d’être récoltées, soit 11 Mt de moins qu’annoncé au mois de juillet. Or, quoi qu’il arrive, la consommation mondiale de maïs augmenterait de 43 Mt pour s’établir à 1 183 Mt.

Des records de production toujours insuffisants

En cette fin d’été 2021, la Russie, le Canada et les États-Unis ont dressé un premier bilan des pertes de production subies après plusieurs semaines de températures caniculaires. Certes, la Russie restera le premier pays exportateur au monde de blé mais elle ne sera pas en mesure de renouveler l’exploit de l’an passé. Elle n’exporterait que 35 Mt, comme en 2018 et en 2019, et non plus 40 Mt comme en 2020-2021. En fait, le pays ne produirait que 72,5 Mt de blé, alors que le mois passé l’estimation de l’USDA portait encore sur 85 Mt. Au Kazakhstan, seules 12,5 Mt seraient moissonnées (-1,7 Mt sur un mois).

Comme l’Ukraine sera en mesure d’exporter 23,5 Mt de blé (+ 7 Mt sur un an), elle prendra des parts de marché à la Russie. Dans le bassin de la mer Noire, elle est le seul pays à afficher une production de blé en nette progression sur un an (33 Mt ; + 8,5 Mt).

Le Canada ne pourra pas vendre plus de 17 Mt de grains à des pays tiers, car la production de blé n’excédera pas 24 Mt. Or, au mois de juillet dernier, l’USDA estimait encore celle-ci à 31,5 Mt. Et l’an passé, 35 Mt avaient été engrangées.
Dans ces conditions, le retour de l’Union européenne sur les marchés de l’export est bienvenu. Elle sera en mesure de livrer 35 Mt de blé à des pays tiers qui n’avaient pas pu s’approvisionner auprès d’elle la campagne passée, faute de grains. Et ses voisins nord-africains sont d’ores et déjà prêts à revoir à la baisse leur niveau d’exigence en matière de qualité. Ils privilégieront aussi la carte de la proximité afin de réduire les frais d’affrètement devenus très élevés.

L’orge fourragère dans le sillage du blé tendre

Le prix de la tonne d’orge fourragère a progressé tout l’été. Mi-août, il a même atteint et dépassé le seuil de 240 €. Depuis que le Canada a annoncé qu’il n’engrangerait que 8,8 Mt de grains, le pays devra se contenter de n’en exporter que 2,7 Mt. Or, l’an passé, il avait vendu jusqu’à 4,5 Mt de grains. Le Canada fait toujours partie des six pays exportateurs majeurs d’orge de la planète mais cette année, il sera relégué au 6ème rang mondial. Il n’est plus en mesure de vendre à la Chine 3 Mt d’orge, comme la campagne passée. Mais l’Union européenne (7,1 Mt exportables) et l’Ukraine (5,8 Mt) prendront le relais puisque l’empire du milieu boycotte toujours l’orge australienne.
Au Canada, l’ensemble des cultures céréalières a été affecté par la période de chaleur survenue durant le mois de juillet. Les pays importateurs de blé dur ne peuvent plus compter sur le Canada pour s’approvisionner auprès de lui, autant que l’année dernière.