« La mise sur le marché et l’utilisation de semences de betteraves sucrières traitées avec des produits phytopharmaceutiques contenant les substances actives imidaclopride ou thiamethoxam sont autorisées pour une durée de cent-vingt jours », selon l’article 1 de l’arrêté publié le 1er février au Journal Officiel.

En l’absence de solution alternative, cette dérogation est temporaire et strictement encadrée. En particulier concernant les cultures implantées à la suite d’une culture de betteraves traitées aux néonicotinoïdes, afin de préserver les pollinisateurs. Par exemple, le maïs et de la pomme de terre ne pourront être implantés qu’en N +2 après une betterave traitée. Le colza, le lin, la luzerne ou le pois, seulement en N +3.

Développement des alternatives

Dans un communiqué de presse commun, les ministères de la Transition écologique et de l’Agriculture mettent en avant le fait que le développement d’alternatives aux néonicotinoïdes est « en bonne voie ».

Ils insistent aussi sur le fait que la dérogation pourra être renouvelée au maximum jusqu’en 2023, « afin de développer des solutions alternatives pour lutter contre les pucerons porteurs de virus. Après cette date, toute utilisation de produits phytosanitaires composés de néonicotinoïdes sera définitivement interdite en France ».

Le communiqué s’étend longuement sur un plan national de recherche et d’innovation (PNRI), lancé en 2020 et visant à préparer la sortie définitive des néonicotinoïdes à partir de la saison 2024 grâce à l’identification et au déploiement d’alternatives aux semences enrobées. « L’État consacre à ce programme de recherche 7 M€, qui financent 21 projets et mobilisent de nombreux acteurs », indiquent les deux ministères. Et de citer l’utilisation de cultures auxiliaires qui repoussent les pucerons, la mise en place d’infrastructures agroécologiques à proximité des champs de betteraves, la sélection variétale, le biocontrôle avec l’utilisation de médiateurs chimiques ou encore le recours à des prédateurs naturels des pucerons.

Ces alternatives sont d’ores et déjà en cours d’expérimentation dans les 500 hectares de fermes pilotes prévues par le programme de recherche auxquelles s’ajoutent, dès cette année, 250 hectares de fermes de démonstration gérées par l’interprofession pour tester des solutions en condition réelle au champ.

Assurance jaunisse

Au terme de cette première année de travaux, et sur la base des premiers résultats encourageants, l’Inrae estime que le PNRI fournira des solutions efficaces réduisant significativement le risque de jaunisse de betteraves. « Cela permettra de se passer définitivement des néonicotinoïdes au plus tard à partir de la saison 2024 dans la conduite des cultures betteravières », insistent la ministre de la Transition Écologique, Barbara Pompili et le ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, Julien Denormandie.

Les ministres ont par ailleurs décidé d’accélérer en 2022 les travaux sur la faisabilité et l’efficacité de semis avec une moindre densité de semences enrobées, « permettant de réduire l’impact des néonicotinoïdes tout en protégeant les cultures betteravières contre le virus avant le déploiement des alternatives ».

Les deux ministères souhaitent développer aussi le volet économique et indiquent que les professionnels de la filière betterave et sucre se sont engagés, avec le soutien de certaines régions et du gouvernement à l’élaboration d’un dispositif de gestion des risques, à travers l’instrument de stabilisation des revenus (ISR). Ce dispositif permettra, en cas de pertes de rendement dues au virus de la jaunisse, et si les alternatives aux néonicotinoïdes n’offrent pas une protection équivalente, de compenser une partie des pertes de revenus des betteraviers. Une assurance jaunisse en quelque sorte ! Cet ISR sera expérimenté en 2022 avec un groupe pilote, en vue de le généraliser en 2024.

Fort de ses avancées agronomiques et économiques, le gouvernement veut croire que la France sera sortie des néonicotinoïdes dans 2 ans.