A priori, la situation n’est pas « folichonne », comme disait Laurent Cabrol, le « Monsieur météo » d’Europe 1. Si l’on voit la situation de haut, la densité de population des lapins de garenne en Europe serait comprise entre 0,5 et 10 individus par kilomètre, avec un déclin d’environ 30 % ces dix dernières années. C’est ce fléchissement qui embête. Les paysages ont changé. Les friches et les landes sont souvent devenues des zones de culture. Le lapin s’évanouit. Que lui faut-il pour s’épanouir ? Un couvert dense et bas, un sol meuble pour creuser ses terriers, des prairies ou du maquis pas loin pour se nourrir. C’est un brave garçon. Les femelles peuvent produire entre 10 et 25 petits par an entre janvier et octobre. Cette forte productivité compense une importante mortalité juvénile puisque seuls 5 à 6 lapereaux parviennent à l’âge adulte. Les principales causes de mortalité sont les noyades dans les rabouillères dues à de fortes précipitations, la prédation (par le renard notamment), les travaux agricoles et ces terribles maladies que sont le VHD et la myxomatose. Elles peuvent entraîner des mortalités annuelles de l’ordre de 80 à 90 % chez les adultes et plus de 95 % chez les jeunes. Toutefois, certaines populations de taille importante semblent peu affectées, car immunisées.

La dynamique démographique qui résulte de ces différents facteurs est particulièrement instable. Selon les conditions climatiques, trophiques ou pathologiques, les populations peuvent exploser, stagner ou disparaître. L’aéroport de Roissy a longtemps été infesté et on procède régulièrement à d’importantes reprises. Même phénomène sur l’île de Sein où il a fallu siphonner sérieusement les colonies. Les densités sont aussi très fortes sur les îles d’Ouessant, de Porquerolles ou de Port-Cros. Elles sont faibles dans l’Est. Dans le nord du pays, il a fallu combattre une invasion en 2008. Le rongeur a causé de graves dégâts dans Le Nord-Pas-de-Calais, la Picardie et en Champagne-Ardenne. Selon les syndicats agricoles, près de 1 000 hectares avaient été endommagés dans la Somme, entre 400 et 800 dans le Pas-de-Calais.

Notre lapin peut devenir tellement abondant (plus de cent rongeurs à l’hectare) qu’il bascule dans la catégorie des nuisibles. Nuisible à quoi ? À la vigne, principalement dans le midi de la France. Mais aussi à la betterave, au tournesol, aux cultures maraîchères et à la sylviculture. On passe alors de la chasse à la destruction ou aux reprises massives, ce qui exige une intendance compliquée.

Le classement nuisible est généralement communal, mais il existe des cas où il n’intervient que sur une partie d’une commune. Pour protéger un massif forestier par exemple.

Des meutes spécialisées

La valeur cynégétique de l’animal varie considérablement en fonction des départements. Peu prisé dans le nord du pays, il devient un gibier fétiche pour les chasseurs du midi. Il est vrai qu’un lapin nourri au thym et au serpolet a plus de saveur qu’un animal de pré. Donc, dans les départements du sud de la France, on vénère Jeannot. On achète même des lapins d’Espagne que l’on acclimate dans des garennes artificielles. Celles-ci doivent être ni trop grandes ni trop petites. « Entre 50 et 100 m3 », nous précise un expert local. Constituées de palettes ou de souches recouvertes de terre meuble, elles seront orientées plein sud pour que les pensionnaires puissent se chauffer aux rayons du soleil. On le chasse « à la billebaude » avec de petits chiens vifs et ardents, qui ne sont pas forcément de noble origine.

Il existe aussi des meutes spécialisées constituées, par exemple, de beagles, de fauves de Bretagne ou de bassets vendéens.

« ratting ferrets »

La chasse la plus amusante est celle qui se pratique avec des furets. Elle consiste à placer le petit mustélidé à l’entrée d’un terrier et à attendre la sortie du locataire qui a la mort aux trousses. L’arrêté ministériel du 1er août 1986 autorise la chasse au furet mais son emploi reste toutefois soumis à autorisation préfectorale dans plus d’une trentaine de départements. Pensez-y avant de sortir « Coco », qui est le surnom le plus populaire du tueur aux yeux rouges.

Ne croyez pas que le furet ne soit réservé qu’au lapin. À Etterbeek, dans la périphérie de Bruxelles, le service communal de l’environnement a déclaré en 2015 : « nous avons expérimenté différentes solutions au fil des ans pour combattre les rats. Nous avons décidé de ne presque plus avoir recours au poison et de choisir quelque chose de naturel et plus efficace : le furet ». On peut également noter que nos voisins britanniques font pareil en ville avec des furets, qu’ils nomment « ratting ferrets ».

Sachez aussi que le furet est le plus populaire de nos animaux de compagnie (NAC) et que l’on en compterait 60 000 en France (« pucés » et tatoués).