10 %, c’est l’objectif d’économie de prélèvement d’eau du « plan d’action pour une gestion résiliente et concertée de l’eau ». Selon le ministère de l’Agriculture, les prélèvements agricoles globaux ne sont pas directement visés par cette mesure. « Nous saluons l’annonce du ministre de l’Agriculture qui assure la stabilisation des prélèvements au global pour l’agriculture car il n’y a pas d’agriculture sans eau, et il n’y aura pas de souveraineté alimentaire sans eau », affirment la FNSEA, les JA, la Coopération agricole, Chambres d’Agriculture France, et les Irrigants de France dans un communiqué daté du 4 avril.

Cependant, selon le ministère de l’agriculture, localement, certains bassins pourraient être touchés par des restrictions.

Les Irrigants de France très inquiets

Sur les 53 mesures de ce texte, la 11ème inquiète particulièrement Sabine Battegay, animatrice d’Irrigants de France. Selon le texte, « il sera progressivement mis fin aux autorisations de prélèvement au-delà de ce qui est soutenable dans les bassins-versants dits en déséquilibre. (Au fur et à mesure du renouvellement des autorisations qui s’échelonne jusqu’en 2027) ». « Cette affirmation menace des milliers d’irrigants qui pourraient se voir supprimer leur accès à l’eau », s’inquiète Sabine Battegay. Si la notion de déséquilibre demande à être précisée, il semblerait que ces bassins soient plutôt localisés dans la moitié sud de la France et donc peu dans la zone betteravière. Pour les Irrigants de France, si plusieurs mesures semblent aller dans le bon sens, plusieurs d’entre elles éveillent vivement leur inquiétude. Ils vont ainsi demander à être pleinement associés à la déclinaison concrète du Plan Eau.

La mesure numéro 25 rappelle les restrictions d’usage de produits phytopharmaceutiques sur les zones sensibles, envisagées par le règlement SUR de l’Union Européenne. « La France adaptera ses usages de produits phytopharmaceutiques au regard des forts enjeux de santé-environnement sur les aires d’alimentation de captages » peut-on lire dans le dossier de presse au point 25.

Mais des mesures favorables à l’irrigation

Le texte présente cependant un certain nombre de points positifs pour les agriculteurs irrigants. Un décret facilitant la réutilisation des eaux usées et traitées pour l’irrigation (entre autres), devrait sortir avant l’été. Le ministère précise que cette avancée concernera prioritairement les stations d’épuration du littoral, qui, pour des raisons liées au tourisme, relarguent souvent des eaux beaucoup plus propres. Pour être réutilisées, les eaux usées devront posséder un niveau de qualité suffisant sur les critères bactériologiques et chimiques. « 50 M€/an supplémentaire d’aides des agences de l’eau seront consacrés à la mise aux normes des stations d’épuration prioritaires », précise la mesure 29 du plan. Le financement de matériel d’irrigation permettant d’économiser de l’eau est aussi au programme.

Le Président de la République soutient les réserves de substitutions

Quelques jours après les violentes oppositions au stockage de l’eau à Sainte-Soline, dans les Deux-Sèvres, le plan présenté par Emmanuel Macron prévoit de « remobiliser et moderniser les ouvrages de stockage de l’eau existants », via le curage des réserves entre autres (appelé improprement « bassine » par leurs opposants), et de développer de nouveaux projets. « Nous avons également entendu, avec une grande satisfaction, la volonté du président de la République de développer des solutions de stockage adaptées à chaque territoire. Nous attendons maintenant des règles claires, adaptées et transparentes ainsi que des précisions chiffrées sur cet engagement. », commente Eric Frétillère, le président d’Irrigants de France.

> À lire aussi : La lutte anti-bassines est-elle vraiment écologique ? (22/11/2022)

À noter que le ministère assume le fait qu’avec le changement climatique, on aura besoin d’irriguer de nouvelles surfaces.

Un soutien financier jugé insuffisant

Le plan prévoit plusieurs enveloppes de financement dont certaines concernent directement les agriculteurs :

  • 30 M€/an via les agences de l’eau pour accompagner la sobriété, principalement les dispositions en matière d’irrigation (mesure 4) ;
  • 30 M€/an pour le curage et la création de retenues d’eau « dans le respect des équilibres et des usages » (mesure 21). Le ministère de l’Agriculture précise qu’il y a quelques centaines de réserves d’eau, individuelles ou collectives, en projet aujourd’hui sur toute la France ;
  • 50 M€/an pour accompagner les agriculteurs pour améliorer la qualité de l’eau dans les airs d’alimentation de captage, via les MAEC et la revalorisation des aides bio. Ce dispositif (mesure 27) relève de la PAC ;
  • 30 M€/an pour poursuivre l’expérimentation sur le paiement pour services environnementaux (mesure 27 également) ;
  • Un montant encore indéterminé pour financer la récupération des eaux de pluie de toiture des bâtiments agricoles (notamment bâtiments d’élevage, pour l’abreuvement des animaux), via les agences de l’eau (mesure 19).

Dans leur communiqué, les 5 organisations agricoles saluent ces moyens financiers mais « estiment cependant que les enveloppes annoncées restent insuffisantes ».

La portée de ce texte va s’éclaircir dans les semaines à venir. Affaire à suivre.