La pression monte sur la Commission européenne concernant les importations de produits agricoles venus d’Ukraine. Si les responsables professionnels ont alerté depuis longtemps sur les conséquences des importations sans droits ni limites, les manifestations qui secouent toute l’Europe pourraient faire bouger les lignes. C’est en tout cas ce qu’espèrent les quatre associations spécialisées des grandes cultures (FOP, AGPB, AGPM, CGB) ainsi que les producteurs de volailles (CFA) et la FNSEA. Les syndicats agricoles avaient alerté le 19 janvier le commissaire français, Thierry Breton, pour demander la mise en place de mesures limitant les importations en provenance d’Ukraine et soutenir le Commissaire polonais à l’Agriculture vis-à-vis des autres commissaires sur ce sujet, où il n’est pas majoritaire. Les 16 présidents des organisations betteravières européennes ont aussi envoyé une lettre commune aux ministres de l’Agriculture des États-membres, alors que le collège des commissaires devrait adopter la nouvelle proposition de la Commission la semaine du 29 janvier. En effet, la Commission européenne devrait prochainement adopter sa proposition de renouvellement de l’accord temporaire libéralisant les échanges avec l’Ukraine (ATM).

Premier signe positif le 23 janvier : le Commissaire à l’Agriculture, Janusz Wojciechowski, a cité au cours d’une conférence de presse les 3 secteurs les plus sensibles aux importations ukrainiennes : la volaille, les œufs et le sucre. Il a déclaré qu’il fallait trouver une solution pour limiter les volumes importés et que des discussions sont en cours.

L’Europe fait le jeu de la Russie !

Le sujet est crucial pour le sucre. « Dès la campagne 2022-2023, près de 400 000 tonnes de sucre ukrainien sont importées dans l’Union : c’est vingt fois plus que la campagne précédente ! La zone betteravière ukrainienne étant éloignée des conflits, le pays augmente ses surfaces d’environ 30 % en 2023 et on s’attend à un flux d’au moins 750 000 tonnes pour la campagne 2023-2024. Le pays annonce même que le volume devrait atteindre 1 Mt en 2024-2025, s’inquiète Guillaume Gandon, président de la Commission économique de la Confédération internationale des betteraviers européens (CIBE). L’Ukraine laisse ainsi ses débouchés traditionnels (Ouzbekistan, Tadjikistan, etc) à la Russie et livre en Roumanie, en Pologne, mais aussi en Italie. L’Europe fait le jeu de la Russie !

La perte du marché italien pour la France représenterait 300 000 tonnes de sucre : c’est l’équivalent d’une sucrerie. Le sucre ukrainien a ainsi provoqué une nette baisse de prix dans l’Union : en Italie, il est passé de 1 000 €/t en septembre 2023 à 700 €/t actuellement. Il est donc urgent de mettre en place des contingents limitant les importations de sucre ukrainien sur le territoire de l’Union européenne ».