La guerre avec la Russie suffit ! L’Ukraine n’a pas l’intention de se lancer dans un conflit commercial contre l’Union européenne. Le site ukrainien Ukragroconsult (UAC) rappelle que le pays a perdu beaucoup de sa splendeur sur la scène internationale. Les quantités de grains exportées depuis le début de la campagne sont bien inférieures à leurs niveaux d’avant-guerre.

L’Ukraine n’a vendu que 22 millions de tonnes (Mt) de céréales et de légumineuses, dont 8,7 Mt de blé, 1,3 Mt d’orge et 1,0 Mt de seigle. Par ailleurs, seules 12 Mt de maïs ont été vendues.

Certes, le pays profite pleinement du marché européen : 3,8 Mt de blé, 6,2 Mt de maïs et 690 000 tonnes d’orges ont été livrées à une partie des vingt-sept états membres, selon la Commission européenne.

Mais l’Ukraine commerce aussi avec la Chine, le deuxième pays importateur de produits agricoles ukrainiens (2 Mds d’€), avec la Turquie (1,8 Mds d’€) et l’Égypte (1 Mds d’€).

Sans le rétablissement d’un corridor maritime sur la mer Noire, les céréales vendues n’auraient pas pu être expérdiées, selon UAC. Sur les 6,36 Mt de produits agricoles expédiées au mois de janvier dernier, 4,3 Mt ont été acheminées par voie maritime.

Parmi les vingt-sept pays européens livrés par l’Ukraine, la Roumanie est en tête (2,6 Mds d’euros de produits agricoles) mais une partie des importations est réexportée.

La Pologne n’est donc plus le premier client de l’Ukraine depuis qu’elle a imposé une série de restrictions commerciales à ses frontières. Ses importations sont inférieures d’un tiers à leur niveau de l’année passée (1,6 Mds d’€).

Les Pays-Bas, l’Allemagne, l’Italie et d’Espagne ont importé 4 Mds d’€ de produits agricoles, dont une partie des 6,2 Mt de maïs qu’ils achetaient auparavant au Brésil. ’

L’Ukraine prend acte des dispositions prises par la Commission européenne pour éviter la déstabilisation des marchés européens par ses importations de produits agricoles. Mais il souhaite la levée des interdictions unilatérales des pays frontaliers.

Si l’Ukraine reconquiert l’intégralité de son territoire, une fois la paix revenue, elle récolterait 112 Mt de céréales et d’oléagineux par an et en exporterait jusqu’à 80 Mt, affirme UAC.

Politique de prix très agressive de la Russie

En Russie, le site Sovecon.ru souligne le dynamisme des expéditions de blé au mois de janvier dernier, avant l’entrée en vigueur, le 15 février prochain, du prochain quota d’exportations de céréales de fin de campagne. Il est fixé à 24 Mt.

Les cours mondiaux des céréales restent faibles tant que le maïs disponible à l’export sera abondant. La politique de prix très agressive de la Russie pèse aussi sur les prix du blé. Selon Argus, la Russie doit vendre 22 Mt de blé d’ici la fin du mois de juin pour ne pas commencer la campagne 2024-2025 avec des stocks pléthoriques.

Les marchés intègrent très bien les données climatiques parvenant des différents bassins exportateurs. Les risques météorologiques sont de mieux en mieux appréhendés et par conséquent circoncrits. Les productions des bassins exportateurs orientent les échanges commerciaux.

Les opérateurs ont ainsi appris que la prochaine récolte française de blé n’excéderait pas 30 Mt, puisque les fortes précipitations de l’automne passé ont empêché une partie des emblavements prévus. Mais en Russie, la couverture neigeuse protège bien les céréales d’hiver. Selon Sovecon.ru, le pays projette de produire 92 Mt de blé. Et au Brésil, des précipitations retardent la première récolte de soja et de maïs, mais elles améliorent les conditions de semis de la Safrina.

A contrario, la géopolitique est de plus en plus un facteur de risque redouté. Les marchés ont tous été surpris par les attaques des cargos dans le golfe d’Aden au mois de décembre dernier et en 2022, par l’embargo russe imposé sur les exportations de céréales ukrainiennes. Un retour de Donald Trump aux affaires effraie.

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