Les planètes semblent bel et bien alignées pour faire chuter le prix des oléagineux. Cette convergence des facteurs tient globalement à l’atonie de l’économie mondiale qui entraîne une demande de moins en moins tonique. Les échanges sont en berne et les stocks anticipés à la hausse provoquent un recul général des prix, tant pour le colza et le canola au Canada que pour le soja aux États-Unis et en Amérique latine. Certes, il ne s’agit que d’un glissement, et pas d’un effondrement. Ainsi, le colza, à 415 € la tonne sur les marchés physiques rendu Rouen et Fob Moselle, n’a pas encore glissé sous le plancher ses 400 €/t.

Mais ces seuils de résistance se fragilisent au fil des semaines. Les cinq prochaines échéances trimestrielles du colza sur Euronext, jusqu’en mars 2025, s’échangent désormais au plus bas, dans la fourchette étroite des 413-420 €/t. Certains analystes pointent des surcapacités de trituration en Europe et des difficultés à trouver des débouchés pour les huiles dont les cours sont en train de chuter. La graine de tournesol en fait d’ailleurs les frais et vient de chuter à 395 €/t, ce qui n’était pas arrivé depuis trois mois.

La tendance baissière est observée partout dans le monde. Le canola canadien qui s’échange à Winnipeg vient de toucher le seuil des 600 $Can, soit 430 €, très en retrait de la moyenne de l’année 2023. Les stocks seraient en forte hausse et les volumes de trituration seraient en recul. Aux États-Unis, un autre plancher a été percé sous la barre de 450 $/t pour le soja à Chicago où la graine s’échange désormais à 440 $/t. Ce sont les très faibles importations de la Chine qui nuisent aux exportations mondiales de soja, que ce soit aux États-Unis, au Brésil ou en Argentine. Depuis le début de la campagne, les exportations américaines de graines de soja seraient en recul de 20 %, ce qui représente un volume et un manque à gagner considérables.

La chute des cours des graines est aussi couplée avec la baisse des prix du baril de pétrole, actuellement autour de 75 $. De fortes dissensions au sein des pays producteurs sont apparues et ils se livrent désormais une concurrence accrue. Résultat : les biocarburants sont aussi à la baisse, comme tous les produits dérivés des oléagineux. Il faut ajouter que la guerre au Proche- Orient n’a plus d’effet sur les risques de raréfaction de l’offre, mais qu’en revanche elle ajoute aux difficultés économiques de la Chine.

Enfin, l’Ukraine réussit à exporter ses grains et ses huiles, malgré la guerre. Elle a même pris une sorte de maîtrise de la mer Noire en détruisant la flotte russe. Mais, par conséquent, l’offre ukrainienne pèse aussi sur les cours des oléagineux en Europe. En clair, la prime de risque géopolitique a disparu, et les marchés ont intégré cette nouvelle donne.