« La dernière fois que nous avons connu une richesse en sucre aussi faible, c’était en 1976 ». Devant les betteraviers alsaciens réunis le 22 mai à Oberhausbergen, Franck Sander, président de la CGB Alsace, est revenu sur la campagne betteravière 2024, marquée par une pluviométrie exceptionnelle et un manque d’ensoleillement pendant toute la période végétative (à l’exception du mois d’août). « Une vraie douche froide après une campagne 2023 exceptionnelle », a commenté Joseph Behr, directeur du syndicat alsacien, qui présentait son dernier bilan de campagne.
Ramené à 16, le rendement 2024 s’établit à 71,6 t/ha, ce qui est nettement inférieur à la moyenne quinquennale 2019-2023 de l’Alsace, qui est de 83,4 t/ha. « C’est le poids racine qui a fait le rendement, constate Joseph Behr. Les betteraves ont continué à grossir mais sans s’enrichir en sucre. » Les planteurs alsaciens ont par ailleurs été confrontés à une forte pression de la cercosporiose, maladie qui avait amené certains d’entre eux à réduire leurs surfaces ou à arrêter la culture dans les années 2018 à 2020. Le pourcentage de betteraves malades a atteint 1 %, contre 0,3 % en moyenne nationale.
La marge brute à l’hectare s’en ressent. Elle est divisée par deux par rapport à 2023, mais elle reste malgré tout supérieure à celle du blé et du maïs, à 1 100 €/ha en moyenne, a souligné Joseph Behr. Les surfaces, qui avaient atteint 7 200 ha en 2024, baissent à nouveau en 2025, à 6 430 ha. Rien d’inquiétant, selon le directeur de la CGB Alsace. « Il est important que les planteurs ne perdent pas espoir », dit-il cependant.
« Le moment de se faire entendre »
La protection des cultures, en particulier contre les pucerons, potentiellement vecteurs de la jaunisse, est au centre de leurs préoccupations. La CGB demande que les betteraviers français puissent utiliser l’acétamipride, à l’égal de leurs concurrents européens, d’où la mobilisation pour faire voter la proposition de loi Duplomb à l’Assemblée nationale. « Si ce texte ne devait pas passer, ce serait terrible pour le monde agricole », prédit Franck Sander, qui juge l’opposition au texte « dogmatique et mensongère ».
« C’est le moment de se faire entendre », renchérit Nicolas Rialland. Le directeur général de la CGB rappelle que l’interdiction de cette substance « met la filière betteravière française en difficulté », mais qu’elle est loin d’être la seule. Selon lui, 20 filières de production, dont la noisette, sont confrontées à la même impasse phytosanitaire les exposant à une distorsion de concurrence. Dans ce contexte, le travail de la CGB consiste à fédérer les filières concernées. Autres combats syndicaux : la mobilisation contre l’accord UE-Mercosur et contre les importations ukrainiennes de sucre, qui « seraient passées à 700 000 tonnes si nous n’avions pas réussi à les bloquer à 260 000 t. » Le syndicat se bat enfin pour un budget de la PAC indexé sur l’inflation permettant à l’agriculture française « de relever le défi de la souveraineté alimentaire ».