Avec ses cheveux argentés, son regard clair et ses manières bien aimables, le pasteur John Russell plaisait « à toutes et à tous ». Né à Darmouth dans le sud du Devon le 21 décembre 1795, l’homme de Dieu avait, entre les offices et ses ouailles, deux passions : l’équitation et la chasse au renard. Dès son plus jeune âge, il se passionne pour l’élevage des chiens de terriers. Il en faut, en effet, pour débusquer l’animal de chasse qui a regagné son repaire. John, curieusement surnommé « Jack », bat donc la campagne pour affiner ses chiens. La rumeur affirme que le religieux aurait acheté la chienne à l’origine d’une première lignée de « Russell » Terriers à un laitier en 1819, pendant sa scolarité à Oxford. Baptisé « Trump » (un nom prémonitoire ?), l’auxiliaire en question était un ardent petit chien à la roche blanche tachetée de sombre au-dessus de chaque œil et au niveau de l’attache de la queue. À peu de chose près, il ressemblait au standard actuel des Russell Terriers ! Le bon pasteur procéda ensuite à de nombreux croisements avec diverses souches de terriers d’utilité. Son souci n’était pas de créer une race, mais plutôt d’affiner un type. Il lui fallait un petit chien au caractère suffisamment trempé pour appuyer les packs de fox-hounds. Il cherche aussi des sujets à dominante blanche pour que les fox-hounds ne les confondent pas avec le renard à la sortie du terrier. Russell, par retrempes successives, va créer un chien de travail compact (36 cm pour 6,3 kilos) et endurant. Il sera l’un des membres fondateurs du Kennel Club en 1873, avant de s’éteindre en 1883, à l’âge de 87 ans.

Ramasseur de balles

Rapidement, son petit chien suscite l’engouement dans le milieu équestre. On l’emploie aussi dans les équipes de polo comme ramasseur de balles ! Ensuite, la race suit son destin. Le 1er juillet 1991, le standard officiel mais provisoire du Parson Jack Russell Terrier, dit aussi Terrier du pasteur Russell, est adopté par la Fédération canine internationale (FCI), qui régit actuellement l’élevage de la race en France. Le Club compte aujourd’hui plus de 1 100 membres et organise une quinzaine d’épreuves par an au terrier artificiel.

Le blanc prédomine dans la robe (au moins 70 %), avec des taches sombres ou fauves sur la tête (au-dessus des yeux) et au niveau de l’attache de la queue. La morphologie doit être adaptée aux conditions du travail sous terre. La longueur de la queue doit notamment être suffisante pour assurer une bonne prise en main. Deux variétés sont identifiées pour une même race, aux standards proches. Le « Parson » Russell Terrier, plus compact, s’inscrit dans un carré, et le « Jack » Russel Terrier dans un rectangle. Le mâle de « Parson », plus grand, mesure idéalement 36 cm au garrot (34 à 38 cm) et la femelle 33 cm (31 à 36 cm ). Le « Jack », plus court sur pattes, légèrement plus long, est haut de 25 à 30 cm au garrot.

Polyvalent

Intelligents, fidèles, réactifs, rustiques, courageux, ces petits chiens sont aussi populaires à la campagne qu’en ville. En Grande-Bretagne dans les fermes, il fait à la fois office de chien de chasse, de garde et de ratier. Il reste l’indispensable auxiliaire des veneurs. La veille d’un laisser-courre, les déterreurs pratiquent le « earth stopping », c’est-à-dire qu’ils vident les terriers de leurs occupants à l’aide de « Jack » ou de « Parson » avant de les reboucher. Ainsi, les renards seront dehors lors du découplé. On les transporte aussi à cheval pour qu’ils soient disponibles si le renard se terre plus loin.

En France, si leur vocation première est le déterrage du renard, du blaireau et du ragondin, les Russell Terriers s’adaptent à d’autres disciplines.

Le chien plaît aux chasseurs de grand gibier. Auxiliaire de petit pied, il dérange peu les enceintes, mène doucement et pas trop loin. Idéal pour les poussées silencieuses et les tirs sélectifs. Il est de plus en plus apprécié au sanglier pour sa quête active, sa sûreté de nez, ses aptitudes à la ronce et sa grande prudence. Le Russell Terrier est rarement blessé.

Il excelle au lapin qu’il va extirper des ronciers. C’est aussi un excellent chien de sang.

Au rapport

Et on peut le dresser au rapport. Il se jettera à l’eau pour rapporter un canard. Et comme il ne pèse pas lourd, la glace ne rompra pas sous lui. Il peut aussi lever le faisan. Son format réduit, adapté aux contraintes de la vie moderne, permet de l’emmener partout, y compris en cabine lors des trajets aériens.

Commentaire de Pascal Durantel, confrère et propriétaire : « ce sont des chiens qui ont la passion du poil, et notamment du renard. Le mien, par exemple, n’aimait pas l’eau. Mais je l’ai dressé au rapport à l’eau en Bretagne, tâche dont il s’est fort bien acquitté, y compris en mer. Par jalousie, il voulait ramener le bout de bois que je lançais au large, dans les vagues, avant les labradors. On peut en faire un chien très polyvalent même si, fondamentalement, il est plus axé poil que plume et eau. »

À la maison, le petit chien reste sage si on prend la précaution de lui faire faire de l’exercice … Il a un fort tempérament et besoin de courir beaucoup. Il faudra donc le sortir souvent, lui envoyer une balle ou un bâton, le faire jouer. Et bien sûr, en saison, le faire chasser le plus souvent possible. Ardent sur le terrain, il est doux à la maison, affectueux avec les enfants et pas forcément teigneux avec les autres animaux du foyer. Pascal le fait dormir avec son chat.

Mini chien, mais il fait le maximum !