L’absence de rapport de l’USDA n’occulte pas le climat d’abondance de la campagne céréalière 2025-2026 et ses conséquences sur les prix. Ces trois derniers mois, il ne profite ni à l’Union européenne (UE), ni à l’Ukraine, ni à la Russie. Toutes accusent des exportations en (net) repli.
L’UE n’a expédié que 4,9 Mt de blé, soit 1,7 Mt de moins que l’an passé alors que le disponible exportable (33 Mt) est supérieur de 5 Mt à la campagne passée, selon le Conseil international des céréales (CIC). La Roumanie (2,2 Mt) et les pays baltes (1 Mt) ont vendu plus de 3 Mt de blé à des pays tiers quand la France n’en a chargé que 455 000 tonnes dans ses ports. L’Arabie saoudite est le premier pays destinataire (637 000 t), suivie par le Maroc (471 000 t) et le Nigéria (334 000 t).
À Rouen, ces quinze derniers jours, la céréale a été commercialisée autour de 180 € la tonne. Les prochaines récoltes australienne et argentine, très prometteuses, annihilent toute hausse de prix à court terme.
Le blé russe s’exporte moins
L’Ukraine rencontre aussi des difficultés pour exporter ses céréales. Selon Ukragroconsult, le pays n’a vendu que 2,84 Mt de produits agricoles au mois de septembre, soit 38 % de moins que l’année dernière (4,6 Mt). Seule 1,8 Mt de blé a été commercialisée (-21 % sur un an). En Russie, la récolte s’achève en Sibérie avec des rendements records (2,7 t/ha contre 1,9 t/ha en moyenne quinquennale). L’offre accrue alourdit le marché intérieur sans augmenter le disponible exportable, car la céréale est parfois trop éloignée des ports de la mer Noire pour y être acheminée. Quoi qu’il en soit, le blé russe s’exporte moins.
Le marché du maïs montre aussi des faiblesses. En Ukraine, les négociants peinent à commercialiser la récolte engrangée cet automne (25 Mt). En UE, « les États-Unis gagnent progressivement une position dominante en Espagne, alors que l’Ukraine, fournisseur traditionnel, y perd des parts de marché », déplore Ukragroconsult. À l’échelle de l’UE, elle fait quasiment jeu égal avec son rival étasunien. L’Ukraine n’a expédié que 700 000 t de maïs en trois mois, soit 2 Mt de moins que l’an passé, quand le Brésil en a entretemps acheminé plus de 2,7 Mt (+1,8 Mt). Pour autant, les importations européennes se sont contractées ces trois derniers mois (3,9 Mt versus sur 5,6 Mt en 2024-2025). Et selon le CIC, l’UE devrait se faire livrer 23 Mt de maïs puisque sa production, de nouveau en repli, n’excéderait pas 56 Mt. Et ce qui ne sera pas importé d’Ukraine, le sera d’Amérique.
À Bordeaux, le prix du maïs a encore diminué ces quinze derniers jours en passant largement sous le seuil de 180 € la tonne. La parité de l’euro vis-à-vis du dollar déprécie mécaniquement la céréale de près de 14 %. La France en est la principale victime en exportant sa récolte à ses voisins.
Vif succès de l’orge à l’export
L’orge européenne connaît en revanche un vif succès à l’export. 2,18 Mt ont de grains ont déjà été expédiées (0,6 Mt de plus que l’an passé), notamment en Arabie saoudite (550 000 t) et en Jordanie (390 000 t), les deux premiers clients de l’UE en ce début de campagne, toutes céréales confondues. Le marché algérien est perdu, mais 357 000 tonnes d’orges européennes ont été exportées en Turquie (200 000 t) et en Lybie (157 000 t) ; une première depuis des années !
Un autre exploit à signaler : 830 000 tonnes de blé dur européen (essentiellement roumain) livrées en Mauritanie, en Corée du Sud, aux Émirats arabes unis et en Égypte.
Dans l’UE, sa production (8,3 Mt) est toujours l’apanage de l’Italie (4,2 Mt), de la France (1,2 M) et de l’Espagne (0,7 Mt). Toutefois, la hausse de l’année (+800 000 t) est en partie due à l’essor de cette culture en Europe centrale.
La Roumanie, la Bulgarie, la Slovaquie et la Hongrie ont récolté ensemble 1,1 Mt de grains (+ 90 % sur un an) qu’elles exportent majoritairement hors UE. Mais pour que l’UE soit autosuffisante, elle devrait en produire au moins 9,5 Mt.