Jamais autant de blé, d’orges et de maïs n’ont été engrangés. Le Conseil international des céréales (CIC) estime dorénavant à 2 426 Mt la production mondiale de grains durant la campagne actuelle 2025-2026. Elle est supérieure de 100 Mt à la précédente.

Depuis six mois, le CIC ajuste ses estimations à la hausse. Il prévoit dorénavant la campagne 2025-2026 excédentaire alors qu’en mai dernier, il l’avait annoncée à peine équilibrée.

À l’échelle de la planète, le réchauffement du climat profite encore à la céréaliculture. Plus de 3 000 Mt sont même disponibles dans le monde pour être consommées, transformées, commercées et stockées. Et durant l’été austral, l’hémisphère sud pourrait réserver quelques bonnes surprises.

Parmi les neuf principaux pays exportateurs de céréales de la planète, six en ont produit plus que les deux années passées.

Seules la Russie et l’Ukraine font un peu moins bien tout en restant à des niveaux très élevés (188 Mt à eux deux, -15 Mt versus 2023-2024).

Mais la récolte de blé de ces neuf pays exportateurs devrait augmenter de 31 Mt. En atteignant 418 Mt, elle équivaudra à 51 % de la production mondiale.

Retrait de la Chine des marchés

En France, les cours du blé, de l’orge et du maïs ont oscillé autour de 180 € la tonne ces quinze derniers jours. Et imaginer un redressement durable et significatif de ces prix est difficilement concevable.

La parité de l’Euro face au Dollar les dessert. En Ukraine, « le corridor céréalier continue de fonctionner sans problème malgré les menaces persistantes et les attaques périodiques contre les infrastructures portuaires », analyse Ukragroconsult. Dans les ports, les volumes de transbordement sont supérieurs de 6 à 8 % à l’an passé.

Dans le monde, la faible reprise des échanges commerciaux pèse aussi sur les prix. En atteignant 440 Mt, ils progresseraient de 18 Mt sans pour autant retrouver leur niveau de 2024 (458 Mt). Aussi, une grande partie des grains produits en plus durant la campagne sera stockée (+38 Mt sur un an à l’échelle de la planète hors Chine ; +13 %).

Alors que la Chine importait près de 57 Mt de grains il y a encore trois ans, elle n’en achèterait moitié moins cette année. Car elle récolte de plus en plus de céréales et elle puise dans ses stocks pour couvrir ses besoins et être moins dépendant de l’import.

En Asie et dans le Pacifique, l’augmentation sensible de 4 Mt des importations indonésiennes (11,8 Mt ; +2 Mt) et pakistanaises de blé (4 Mt ; +2 Mt) ne suffira pas pour compenser le retrait de la Chine des marchés.

En attendant, l’effet ciseaux prix-charges s’aggrave, en particulier dans les pays où les rendements des cultures n’ont pas suffisamment progressé pour compenser la baisse des cours. Les agriculteurs vendent alors leurs petites récoltes à petits prix.

Sur le marché du maïs, l’Union européenne est dans ce cas de figure: seules 56 Mt de grains, soit 5 Mt de moins qu’en 2023-2024 seront engrangées or les prix de vente sont inférieurs de 35 €/t à l’an passé.

En Sibérie, où les rendements de blé n’excèdent pas 3 t/ha, vendre la tonne de céréales 150 € sortie ferme, réduit les capacités de financement de la prochaine campagne… mais aussi de la guerre en Ukraine !

Bonnes affaires pour les importateurs

A contrario, les pays importateurs feront de bonnes affaires sur les marchés. Victime d’une sérieuse sécheresse, le Moyen Orient n’aura pas de difficultés pour acheter les 7 Mt qu’il n’a pas été en mesure de produire en plus des 23 Mt qu’il se fait habituellement livrer. Cette année, il n’a récolté que 40,6 Mt de blé (versus 47,6 Mt en 2024).

Mais les céréales sont toujours trop chères pour les pays les plus pauvres de la planète. L’Afghanistan n’a pas les moyens financiers d’importer les 2 Mt nécessaires pour couvrir les besoins de sa population estimés à 7 Mt. Aussi, le gouvernement des talibans fait campagne auprès des paysans pour les inciter à vendre leurs récoltes. Or leur rétention est leur épargne. Elle sécurise les besoins de leur grande famille et les protège de l’inflation.