La lecture des prix de betteraves peut s’avérer un exercice complexe en raison des spécificités de chaque groupe sucrier. Il ne faut pas s’arrêter aux annonces de prix moyens : il est nécessaire, pour le planteur, de regarder sa situation individuelle pour apprécier le plus justement possible la rémunération nette qu’il perçoit, au titre des betteraves livrées d’une part, et au titre des parts détenues dans la coopérative, le cas échéant (intérêts aux parts, dividendes, etc.), d’autre part.
En effet, les prix moyens communiqués par les groupes sucriers englobent plusieurs éléments qui constituent le chiffre d’affaires betteravier. Ces prix intègrent les primes et les indemnités diverses prévues par l’Accord interprofessionnel qui ne peuvent être considérées comme relevant du prix de la betterave. Et, le cas échéant, la valorisation du capital social est intégré au prix pour les groupes coopératifs. En revanche, les prix communiqués n’incluent pas les frais divers facturés aux planteurs (nivelage, bâchage, signalisation, déterrage, tare terre…), et d’éventuelles pénalités (retard de mise à disposition, pétioles…).
Tereos
Le groupe coopératif a communiqué à ses adhérents un détail très précis du prix 2024 en mars dernier (voir tableau). Le « complément de prix diversification » de 3,31 €/t est issu des résultats des activités du groupe et versé sur les betteraves engagées et livrées. La « part sociale avantage particulier » de 3,13 € par part sociale est une valorisation ponctuelle issue de la redistribution de réserves disponibles et non de la valorisation des betteraves 2024. Le montant versé à chaque coopérateur dépendra de la date de souscription de ses parts.
Cristal Union
Le groupe coopératif a communiqué à ses adhérents les prix définitifs 2024 en juin dernier.
Il y a trois prix de base : betteraves contractées de référence BCR 38,00 €/t (souscription à hauteur de 12 € de parts sociales par tonne de betteraves), betteraves contractées complémentaires BCC 36,00 €/t (souscription partielle en parts sociales), et betteraves contractées additionnelles BCA 36,00 €/t (contrat d’opportunité annuel sans souscription). La valorisation de la pulpe n’est pas communiquée. Parallèlement, Cristal Union a mis en réserve 50 M€ sous forme de caisse de péréquation en 2025, soit l’équivalent d’environ 3 €/t de betteraves. Le groupe avait réalisé la même opération en 2024, après avoir constitué une provision spécifique de 35 M€ en 2023. Le groupe dispose donc de 135 M€ pour compléter les prix de betteraves au cours des années à venir.
Saint Louis Sucre
Le sucrier privé a communiqué auprès de ses planteurs fin juin (voir tableau).
Ouvré Fils SA
Le prix d’acompte réglé au 31 mars est de 32,00 €/t, auquel s’ajoute la valorisation de la pulpe de la Sica Gâtinaise de 2,23 €/t. Les indemnités ou primes diverses moyennes ne sont pas communiquées. Un solde pourrait être versé le 31 janvier 2026, en fonction des ventes de sucre réalisées, conformément au contrat.
Lesaffre Frères
Le prix d’acompte à fin juin est de 30,5 €/t, auquel s’ajoute la valorisation de 2,5 €/t pour la pulpe et hors indemnités ou primes diverses. Un solde devrait être versé le 31 décembre 2025, selon les surfaces contractées et les tonnages livrés, conformément au contrat.
Guillaume Wullens, président de la CGB Nord Pas-de-Calais et livreur Tereos
La construction du prix de la betterave est bien détaillée : on peut retrouver les dividendes, les intérêts aux parts et la pulpe dans le décompte envoyé par Tereos. Bravo pour la transparence ! Le rendement moyen de 78 t/ha est décevant, il peine à couvrir les charges des betteraviers qui se sont envolées. Il faut aussi noter la revalorisation de capital, dont le montant sera de 3,13 € par part en moyenne. Cette valorisation est exceptionnelle, elle viendra compléter la rémunération de la betterave et sera calculée par la coopérative, au cas par cas, selon l’historique de chaque coopérateur.
Paul Lannoy, président de la CGB Eure et livreur à Saint Louis Sucre
L’annonce, le 30 juin, d’un solde de 3,34 €/t à 16° pour le règlement de nos betteraves 2024 a été une grande déception. Le prix des betteraves « tout inclus » à 35,34 €/t à 16° betterave entière (supplément de prix, pulpes, primes, indemnités incluses) équivaut à 38 €/t à 16° betterave décolletée. Au regard de l’année passée nous avons perdu plus de 15 euros ! Les planteurs s’attendaient un prix de 40 euros pour la récolte 2024, ils ont été déçus d’autant que le rendement en plaine (77 t/ha à 16) était en dessous de nos performances habituelles. Pour le contrat 2026-2027, nous avons besoin d’un prix minimum pour couvrir nos coûts de production et d’améliorer le partage de la valeur entre planteur et fabricant.
Bertrand Languillat, vice-Président de la CGB Champagne-Bourgogne, livreur à Cristal Union
Le prix 2024 est certes moins bon que l’année d’avant, mais la betterave reste une des meilleures marges de l’assolement en 2024.
Aujourd’hui, tous les éléments de la rémunération de la betterave sont agrégés. Il serait intéressant d’avoir plus de détail sur la décomposition du prix, comme en céréales.
Pour 2025, le coût de production risque d’être plus élevé, surtout pour les planteurs touchés par la jaunisse. Heureusement, Cristal Union a préparé l’avenir avec la caisse de péréquation dotée de 135 M€ qui permettra de distribuer des compléments de prix en cas d’année difficile, au niveau des prix ou des rendements.



