Guillaume Gandon, vice-président de la CGB : « Nous devons retrouver une gestion de marché »

Pour permettre à l’Union européenne « de retrouver une ambition agricole » et renforcer la gestion des marchés, Guillaume Gandon a fait quatre propositions :

1- Réévaluer le prix de référence de 404 €/tonne (qui date de la période sous quotas) à 585 €/tonne pour intégrer l’inflation et inclure le sucre dans le mécanisme de l’intervention. Guillaume Gandon souligne : « c’est quand même invraisemblable que nous soyons les seuls, en agriculture, à ne pas pouvoir répercuter l’inflation sur nos produits. »

2 – Rendre l’activation des mesures de stockage privé automatique pour éviter les décalages qui rendent aujourd’hui ces mesures inopérantes.

3 – Utiliser la filière éthanol comme une « soupape de sécurité » en cas d’excédent de marché pour soutenir les prix.

4- Déclencher plus facilement des clauses de sauvegarde pour bloquer les importations lorsque le marché est jugé « beaucoup trop affecté ».

« Nos principaux concurrents ont une réelle politique sur le sucre : quotas aux USA, politique étalonnière au Brésil, prix minimum en Thaïlande et en Inde. Or, à Bruxelles, la politique commerciale vient à l’encontre de la politique agricole. Nous devons retrouver une gestion de marché », plaide Guillaume Gandon. Un souhait d’autant plus pressant que les planteurs français doivent composer avec un contexte économique morose, rappelle le vice-président de la CGB. « Depuis 2008, le soutien public à un betteravier est passé de 512 à 260 €/ha. Les charges ont quant à elle augmenté de plus de 30 % ces 5 dernières années, en parallèle de la volatilité des marchés et de l’ouverture massive des frontières. »

Yves Madre, président de Farm Europe : « Une inversion totale de la logique de la Pac »

Alors que le budget de la Pac post 2027 est annoncé autour de 300 Mrds €, en baisse de 20 % environ, Yves Madre s’inquiète de la philosophie promue par Bruxelles dans sa proposition. « Le P de Pac passe de politique à programme. C’est la porte ouverte à une inversion totale de la logique. La présidence danoise de l’UE doit proposer, lors du sommet européen du 18 décembre, un cofinancement par la Pac de 27 programmes. Cela ouvre la voie à de nouveaux coups de rabots. Un petit « C » dans la Pac est inadmissible, nous nous trompons de chemin. N’affaiblissons pas l’Europe dans la géopolitique actuelle. » Appelant l’UE à s’interroger sur ses importations, Yves Madre préconise également de faire preuve de vigilance sur les seuils et la rapidité de déclenchement des différents outils de gestion de marché prévus par Bruxelles. « Nous avons été très critiques envers l’UE mais qui aime bien châtie bien. L’Europe reste notre planche de salut. »

Brigitte Misonne, DG Agri / Commission Européenne : « Pour protéger les agriculteurs, nous devons avoir plus d’alliés »

Chargée de représenter la position de la Commission européenne face aux nombreuses critiques, Brigitte Misonne a défendu les choix opérés par l’institution. « 300 Mrds € sont réservés pour le revenu des agriculteurs. La Commission européenne est attachée à mettre un mur autour de ce budget, pour que personne d’autre ne puisse y puiser. 6,3 Mrds € sont par ailleurs prévus pour pouvoir réagir en cas de crise de marché. Ils doivent nous permettre d’utiliser tous les articles de l’organisation commune des marchés agricoles (OCM), dont des mesures exceptionnelles qui autorisent la Commission européenne à intervenir dans tous les cas. C’est une enveloppe également mise de côté pour l’agriculture. »

Concernant la colère suscitée par les négociations en cours sur plusieurs accords de libre-échange, avec en tête de ligne celui du Mercosur, Brigitte Misonne défend l’idée selon laquelle « nous ne pouvons pas nous créer de nouveaux alliés sans avoir quelque chose à offrir », et que des mécanismes de protection des marchés sont mis en place. Interpelée par Olivier de Bohan, le président de Cristal Union présent dans la salle, sur la clause de sauvegarde avec le Pakistan, qui a mis trois ans à être activée, Brigitte Misonne défend, là aussi, un changement de contexte. « Le vent a tourné, nous œuvrons pour la mise en place de clauses automatiques et plus précises. »