Reconnaître une adventice au milieu d’un champ de blé ou de betteraves et lui administrer la juste dose d’herbicide au bon endroit : c’est le credo de la start-up Carbon Bee AgTech. Tout commence au milieu des années 2010. Gérald Germain, un informaticien spécialisé dans l’intelligence artificielle, crée un prototype dans son garage à Valence (Drôme). « Il s’agissait d’une caméra capable de reconnaître ce que l’œil ne voit pas et de l’interpréter ensuite grâce à un algorithme d’intelligence artificielle », explique ce Géo Trouvetout des temps modernes, âgé de 40 ans aujourd’hui.

Il s’associe avec des amis pour financer le développement de son innovation. La start-up Carbon Bee est créée en 2015. Durant quatre ans, ils se financent sur fonds propres et frappent à plusieurs portes. Ils entrent en contact avec des industriels des produits phytosanitaires comme Corteva et des fabricants de pulvérisateurs comme Berthoud et Kuhn. Tous engagent des tests grandeur nature avec des prototypes. Le principe ? Des caméras hyperspectrales sont installées sur la rampe du pulvérisateur tous les 3 mètres. Elles permettent de donner des informations sur la forme et la texture de la plante et de confirmer ou non la présence d’une adventice. « La reconnaissance doit se faire très vite, en un cinquième de seconde maximum, le temps que le jet arrive et que la buse s’ouvre. Un désherbage de qualité se fait entre 12 et 18 km/h pour éviter le maximum de dérive », explique Gérald Germain.

1 500 euros le mètre en 2021

Différents modèles sont proposés, en fonction du produit utilisé et de la culture traitée. « Sur maïs, nous avons quatre modèles possibles : tous sauf maïs, vivaces, dicotylédones et stress en azote », ajoute le fondateur de Carbon Bee. Mais, pour l’instant, les équipements proposés par Carbon Bee tardent encore à être commercialisés. « Ils sont en phase de pré-série et testés en plein champ par des agriculteurs partenaires », souligne Gérald Germain. Le prix de vente reste un frein. Il faut compter environ 2 500 euros pour un mètre de la rampe à équiper, soit 25 000 euros pour une rampe de 10 mètres ! « Mais cela permet de diviser par dix la quantité de produit pulvérisé sur un désherbage de rattrapage », insiste le fondateur de Carbon Bee, qui affirme que pour une exploitation de 400 à 500 ha, le retour sur investissement se fait entre 3 et 4 ans. Carbon Bee, qui a réalisé 2 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2020, travaille à réduire sensiblement ses tarifs, avec des caméras moins coûteuses. Le prix pourrait descendre au printemps à 1 500 euros le mètre, avance Gérald Germain. « Avec les différentes subventions du gouvernement pour renouveler son pulvérisateur, le surcoût de l’équipement pourrait être pris en charge à près de 100 % », promet-il. De quoi permettre un lancement en grande série, peut-être en 2021. D’ici cinq ans, Carbon Bee espère atteindre 30 millions d’euros de chiffre d’affaires.