Quelles sont les propositions des candidats en matière d’agriculture et d’alimentation ? Ils ont tous, lors de leurs meetings, donné quelques pistes sur ce sujet. Leurs porte-parole sont aussi venus défendre leurs programmes agricoles le 15 février dernier, lors des Controverses de l’agriculture et de l’alimentation, organisées par Réussir Agra.

Souveraineté alimentaire

La notion de souveraineté alimentaire fait l’unanimité chez les candidats à la Présidentielle ; la crise de la Covid est sans doute passée par là ! Plusieurs parlent d’augmenter la part des produits locaux dans la restauration collective. Marine Le Pen (Rassemblement national) va le plus loin sur cette question en proposant 80 % de produits alimentaires français dans les cantines, tandis qu’Eric Zemmour (Reconquête) veut un « Patri-score » sur les produits d’après le modèle du Nutriscore. Cet objectif est parfois associé à une politique d’aide alimentaire. L’idée du chèque alimentaire fait son chemin, y compris chez Emmanuel Macron (La République en Marche). Fabien Roussel (Parti Communiste Français) propose un fonds alimentaire national de 10 Mrds€ pour généraliser le repas à un euro dans les cantines scolaires. Jean-Luc Mélenchon (La France Insoumise) propose quant à lui une « sécurité sociale de l’alimentation » : un chèque de 100 à 150 euros par mois et par foyer les plus modestes, à dépenser dans des circuits de distribution labellisés pour développer les filières locales.

Revenu des agriculteurs

Pour Valérie Pécresse (Les Républicains), un des éléments pour améliorer le revenu passe par la simplification administrative. « Il nous faut un choc de simplification : c’est une méthode qui va passer en revue tout le stock de complexification administrative et toute la dérive normative », explique Pascal Coste, président du conseil départemental de la Corrèze, qui fait partie de l’équipe agricole de Valérie Pécresse. La candidate LR veut également une rémunération des agriculteurs pour leur rôle environnemental, notamment par le stockage carbone. Le programme d’Emmanuel Macron s’appuie sur une meilleure répartition de la valeur et l’approfondissement de la loi Egalim. Julien Denormandie, qui est pressenti pour être le directeur de campagne d’Emmanuel Macron, défend cette politique : « Être payé au juste prix, c’est la loi Egalim 2 : un objet politique qui vient mettre à mal une organisation de 15 années (avec la loi LME de 2008) qui, au nom du pouvoir d’achat des Français, a détruit le revenu des agriculteurs ». Nicolas Dupont-Aignan (Debout la France) propose d’exonérer les agriculteurs des charges sociales et des frais de succession sur les 100 premiers hectares. Jean-Luc Mélenchon souhaite la fixation de prix planchers pour mieux rémunérer les agriculteurs. « Notre objectif est de jouer sur les marges intermédiaires au niveau de la transformation et de la distribution pour permettre de mieux rémunérer les producteurs », indique Loïc Prud’homme, député de Gironde, représentant de Jean-Luc Mélenchon. Le député (Parti Socialiste) Dominique Potier, qui représentait Anne Hidalgo aux Controverses, a plaidé pour une « régulation du marché foncier, du marché intérieur autour des prix et des volumes, et du marché extérieur avec les clauses miroirs, le partage de la valeur au sein des filières et un juste partage des aides de la PAC ». Anne Hidalgo avait, de son côté, indiqué vouloir renforcer les organisations de producteurs par grands bassins de production. Fabien Roussel propose la fixation de prix de référence des productions agricoles, tandis que Nicolas Dupont Aignan souhaite remettre en place des quotas (en particulier pour le lait) et des prix garantis. Eric Zemmour propose d’augmenter la dotation des Jeunes Agriculteurs et Marine Le Pen compte sur sa politique « localiste » pour assurer un juste revenu aux producteurs.

Agroalimentaire et négociations commerciales

Emmanuel Macron veut faire respecter sa loi emblématique Egalim 2. Eric Zemmour indique qu’il va « mettre fin au regroupement de la grande distribution » et interdire la vente de produits en dessous de leurs coûts de production. L’interdiction de la vente à perte, c’est ce que propose aussi Fabien Roussel, qui veut réformer les négociations avec la grande distribution. Anne Hidalgo souhaite mettre en place des contrats de filière sur 5 ans avec l’industrie et Valérie Pécresse prône « un choc d’investissement sur les filières ».

PAC

Le député européen Les Verts, Benoît Biteau, représentant de Yannick Jadot, a indiqué vouloir « rémunérer les acteurs de la ruralité qui prennent soin de l’intérêt commun et des ressources vitales grâce aux paiements pour les services écosystémiques ». Le programme de la France Insoumise prévoit de diviser par deux le budget du premier pilier de la PAC et de multiplier par trois celui du second. Et le Rassemblement National veut mettre en place une politique agricole localiste et protectionniste.

Commerce international

La nécessaire mise en place de mesures miroirs à l’ensemble des produits agricoles importés fait consensus. Julien Denormandie fait de la question de la réciprocité dans les échanges et des clauses miroir un point central. « Non au Mercosur ! », s’est exclamé le ministre lors des Controverses. « Je suis contre les traités de libre-échange », a surenchéri Fabien Roussel, qui veut mettre fin aux importations déloyales et imposer la réciprocité des normes à imposer au niveau européen. Pour le candidat de Debout la France, Nicolas Dupont-Aignan, protéger l’agriculture française passera forcément par une redéfinition des accords de libre-échange, voire une sortie de ces accords. Eric Zemmour veut « interdire les importations de produits que nous consommons mais qui sont produits dans des conditions sanitaires et sociales moindres que celles que nous garantissons ».

Modèle agricole

Le débat sur la pérennité du modèle agricole français est très clivant. Si Valérie Pécresse veut mettre fin à la décroissance agricole, Jean-Luc Mélenchon parle d’une « agriculture paysanne et écologique » et d’une sortie de l’élevage industriel. En revanche, Fabien Roussel précise qu’il veut de la vraie viande et qu’il va « falloir produire plus et mieux ». Yannick Jadot (Europe Écologie Les Verts) veut aller vers la fin des pesticides à échéance 2035 et vers la fin des élevages en cage. Anne Hidalgo souhaite quant à elle plus de 30 % de surface en bio à l’horizon 2030 et les tiers restants engagés dans des processus agroécologiques.

Pesticides

Tous les candidats reconnaissent la nécessité de réduire l’usage des pesticides. Mais les méthodes proposées divergent. Le « pas d’interdiction sans solution » est souvent repris, notamment par Julien Denormandie pour La République en Marche. Le député PS, Dominique Potier veut « s’affranchir des pesticides les plus toxiques », notamment les néonicotinoïdes pour qui « il y a une gamme de solutions ». Anne Hidalgo a indiqué vouloir sortir du glyphosate et des néonicotinoïdes dans les 100 premiers jours du quinquennat. Jean-Luc Mélenchon souhaite aussi interdire le glyphosate. Yannick Jadot veut la sortie de pesticides d’ici 2035, interdire les néonicotinoïdes, le glyphosate et les fongicides SDHI. En revanche « le zéro phyto, ce n’est pas réaliste à ce stade », selon Valérie Pécresse.

NBT – recherche

Concernant les nouvelles techniques de sélection (NBT), la position de Valérie Pécresse est « d’être en capacité de défendre le principe d’innovation ». Même son de cloche du côté de Julien Denormandie : « Je suis pour investir massivement dans la recherche : oui aux NBT, à la robotique, au numérique, au biocontrôle et à la sélection variétale ». Le Rassemblement National veut investir massivement dans des innovations technologiques. Le député européen Identité et Démocratie, Gilles Lebreton (représentant de Marine Le Pen) ajoute : « nous sommes contre les OGM, mais si les NBT ne sont pas considérées comme OGM, nous sommes prêts à les envisager ». La France Insoumise et Europe Écologie Les Verts considèrent ces technologies comme des OGM et sont contre leur utilisation.