« C’est une véritable course contre la montre dans laquelle s’est engagée la filière Protéines végétales », a déclaré Gilles Robillard, le président de Terres Inovia au Salon de l’Agriculture Porte de Versailles, le 1er mars dernier. Il participait alors à un point de presse pour présenter la vingtaine de résultats obtenus à mi-parcours du programme Cap Protéines coordonné, depuis son lancement au début de l’année 2021, par l’institut qu’il préside mais aussi, l’Institut de l’élevage et le ministère de l’Agriculture.

Car depuis la fermeture des ports maritimes ukrainiens en mer Noire et la perturbation de l’activité des ports russes en mer d’Azof, l’Union européenne, et par conséquent la France, sont privées d’une source d’approvisionnement importante en tourteaux de soja et d’huile de tournesol. Or ces commodités sont massivement employées pour fabriquer des aliments pour animaux.

« Mais ce énième plan protéines est le bon », s’est réjoui Martial Marguet, le président de l’Idele. L’enveloppe de 20 millions d’euros (M€) allouée par France Relance et le ministère de l’Agriculture renforce le budget de 33,5 M€ dédiés par la filière des huiles et protéines végétales à la recherche. « Mais surtout, Cap Protéines est une pièce maitresse du plan de relance relatif aux protéines végétales, doté par le gouvernement de 100 M€ », précise Terres Inovia. Et il porte comme objectif principal la souveraineté protéique de la France à l’horizon de 2030 ».

2 millions d’hectares de colza et de tournesol

Depuis quelques mois, une des preuves du dynamisme retrouvé de la filière oléo-protéagineuse est que « l’objectif deux millions d’hectares est en voie d’être atteint l’an prochain ou en 2024 », se réjouit Laurent Rosso, directeur de Terres Inovia. L’automne passé, les 100 000 agriculteurs producteurs d’oléo-protéagineux ont déjà semé 1,15 Mha de colza (+ 200 000 ha sur un an). Et au printemps prochain, ils s’apprêtent à ensemencer plus ou moins 700 000 ha de tournesol. Tout dépendra alors des conditions météorologiques et du prix de l’engrais azoté.

Outre les questions de dépendance à l’égard des importations de tourteaux ou d’huiles, « le changement climatique oblige les agriculteurs à adapter leurs pratiques et à intégrer de nouveaux repères techniques », a expliqué Gilles Robillard.

Aussi, pour produire avec succès davantage d’oléo-protéagineux sur leur exploitation, dans de bonnes conditions et avec des variétés adaptées, les agriculteurs ont dorénavant à leur disposition myVar, l’outil d’aide au choix variétal. Cet outil a récemment été étendu à trois nouvelles espèces (pois chiche, lentilles et lupin) et à des listes recommandées de pois et de féverole pour les semis de 2022.

Par ailleurs, plus de 400 parcelles de soja, de pois et de féveroles dans de nombreux bassins de production ont été semées pour référencer les variétés les plus adaptées. Les résultats obtenus seront partagés aux techniciens, aux conseillers et aux agriculteurs.

Donner la priorité au pâturage

Des itinéraires techniques de rupture en colza sont aussi testés en semant en automne des variétés de printemps. La production de colza pourra aussi être associée à celle de luzerne.
Pour alimenter les animaux, Terres Inovia est parvenu à produire par pressage du tourteau de tournesol à plus de 50 % de protéines et du tourteau de colza à plus de 42 % de protéines avec des teneurs en huile résiduelles.

Dans les 330 fermes pilotes et expérimentales du réseau de l’Idele, des rations de troupeaux moins riches en tourteaux ont été testées. Dans la ferme expérimentale de Trévarez (Finistère), les vaches pâturant des prairies avec 80 % de trèfles ont ingéré l’été jusqu’à un kilogramme de tourteau en moins par jour. L’emploi de pois dans des rations d’agneaux de bergerie réduit de 6 € à 8 € le cout alimentaire par rapport à l’emploi d’un aliment complet.