Coup de chaud sur le marché mondial au tout début juin, quand le sucre raffiné, après avoir gagné 10 % sur le seul mois de mai, a frôlé les 600 $/t, un niveau qui n’avait jamais été vu depuis 5 ans. Après l’annonce, par l’Inde, de limiter ses exportations de sucre (à 10 Mt tout de même, soit un niveau qui reste bien conséquent), plusieurs pays ont annoncé la suspension de leurs exports afin de juguler les hausses de prix domestiques.

L’effet a été net : la prime de blanc (différence entre la valeur du sucre raffiné et celle du sucre brut) a dépassé les 150 $/t, un record depuis 11 ans ! Car le sucre brut a, en revanche, un peu flanché sur la dernière quinzaine – tout en restant au-dessus de 19 cts/lb sur l’échéance de mars 2023 ! Il subit de plein fouet les tendances chaotiques de la valeur de la monnaie brésilienne face au dollar, qui a perdu ces 15 derniers jours les 5 % qu’il avait gagnés en un mois !

Mais la crainte vient également de l’attente d’annonces, de la part du gouvernement brésilien, de mesures autorisant ses différents États à ajuster leur politique fiscale en matière de carburant pour soutenir le pouvoir d’achat des automobilistes. Cela pourrait affecter la rentabilité de l’éthanol par rapport au sucre. Mais dans une moindre mesure : le pétrole retrouve son niveau le plus élevé depuis la guerre en Ukraine, et frôle les 125 $/baril.

L’UE déficitaire

Du côté européen, le marché du sucre spot continue sur des records, au-dessus des 870 €/t en sortie sucrerie. Certes, il n’y a plus de volume d’échange en cette période de l’année mais, alors que les négociations sont en cours pour le sucre à livrer à partir de septembre 2023, la situation est à l’avantage des vendeurs.

D’autant que l’on a la garantie que le bilan communautaire 2022-2023 sera déficitaire : avec la baisse des surfaces dans l’Union à 27 (- 2,2 %), le déficit devrait approcher 1 Mt si chaque pays atteint son rendement olympique moyen. Et même en atteignant des rendements records de l’ordre de ceux atteints en 2017, l’Europe resterait à l’équilibre, malgré la perte du marché britannique.

Enfin, l’éthanol pourrait encore limiter l’offre en sucre communautaire. Il bénéficie à plein de la situation du pétrole et de la demande des automobilistes (la part de marché de l’E10 a franchi la barre des 55 % des essences) : il dépasse les 100 €/hl, même sur les échéances du printemps 2023 – du jamais vu…